Champagne, le bilan de la vendange 2021
Du désespoir à l’espoir, voilà comment le SGV (Syndicat Général des Vignerons de Champagne) a qualifié l’année 2021. A première vue, le bilan semblerait catastrophique. Du jamais vu depuis le milieu des années 50 : L’année 2021 a subi des conditions climatiques épouvantables. Ainsi, le gel à lui seul a occasionné en 12 jours, 30 % de perte de rendement. La grêle de son côté a touché 500 ha dont la moitié détruit à 100 %. Des pluies à répétition depuis le printemps ont favorisé le mildiou responsable de 25 à 30 % de pertes.
I/ Le bilan des vendanges 2021
Pour 2021, un rendement fixé à 10 000 kg/ha. Malgré cette avalanche de catastrophes, la perspective globale reste néanmoins positive. En effet, le dispositif de réserve interprofessionnelle va permettre de palier les effets directs des pertes quantitatives. On pourra ainsi approcher le rendement en appellation de 10 000 kg/ha. Quant au rendement agronomique moyen, il sera proche de 6500 kg/ha mais la qualité est au rendez-vous. Un seul mot qualifie cette vendange 2021 : hétérogénéité avec des écarts très importants selon les secteurs et les exploitations. Heureusement, sur le plan qualitatif, le potentiel des raisins est plus que rassurant. Ajoutons que les vins de réserve utilisés pour les assemblages sont d’une excellente qualité.
II/ Quelles répercussions sur l’économie du Champagne ?
Des objectifs de vente sont plutôt optimistes. Les expéditions de janvier à août 2021ont progressé de 41,3 % par rapport à 2020 et de 5,6 % par rapport à 2019. Si depuis 2010 elles avaient tendance à décliner, leur valorisation progressait grâce notamment à la demande des consommateurs vers des cuvées spéciales, millésime, rosé …. Mais ce beau mécanisme s’est brusquement brisé sur la pandémie. A fin 2020, les tendances des ventes retrouvaient, avec 244 millions de bouteilles, les niveaux oubliés depuis 25 ans (247 millions en 1995). Et pourtant, pour 2021, les perspectives sont plus que bonnes. La projection d’ici à la fin d’année se monte à 305 millions de bouteilles expédiées et un chiffre d’affaires s’approchant des 5 milliards d’€.
Bon à savoir ! Les coopératives et les vignerons représentent 26 % des expéditions et le négoce, 74 %.
- Vers la France : en moyenne, 55 % des expéditions par le négoce et 45 % par le vignoble.
- Vers l’Union Européenne : 85 % des expéditions par le négoce et 15 % par le vignoble.
- Vers les autres pays : 90 % par le négoce et 10 % par le vignoble.
III/ Le foncier et la fiscalité sur les transmissions
Comment résoudre le problème de la fiscalité sur les transmissions ? Le SGV (Syndicat Général des Vignerons de Champagne) demande au gouvernement et au parlement de faciliter les transmissions des exploitations dans un cadre familial au travers d’une exonération de 100 % des droits de donation et de succession pour les biens loués pendant une longue durée (au moins 18 ans) comme le pratiquent l’Allemagne, l’Italie et la Suisse.
Quelques chiffres pour mieux saisir les problèmes de la transmission :
- 250 % est l’augmentation du prix moyen des vignes (entre 1991 et 2020).
- 44 % des vignerons sont âgés de 50 ans et plus.
- 25 années sont nécessaires pour couvrir le montant des droits de succession.
Un foncier rare et cher. Le prix moyen des vignes a augmenté de plus de 250 % entre 1991 et 2020 pour un prix moyen en Champagne de 1,1 million d’€/ha et un prix minimum de 1,8 million d’€/ha dans certains grands crus. Aujourd’hui, les repreneurs sont encore nombreux mais le coût des transmissions reste un énorme problème. Conséquence, un fort morcellement du vignoble qui s’accentue d’ailleurs (281 000 parcelles) d’année en année. Le prix du foncier est un frein lorsqu’il faut racheter les parts familiales ou s’agrandir. La fiscalité frappe durement les transmissions familiales. En conséquence, les héritiers auraient tendance à les céder plutôt qu’à les louer à des membres de la famille. Ainsi, en 14 ans, les exploitations de taille moyenne (entre 1 et 5 ha) ont baissé de 5,4 %. Le recul en nombre et en superficie des exploitations de taille intermédiaire témoigne de cette difficulté à transmettre une unité d’exploitation viable.
Déjà le gouvernement a fait voter un allégement de la fiscalité sur les successions en 2019 au travers d’un triplement du plafond d’abattement de 75 %. Est-ce suffisant sachant qu’en Champagne, la rentabilité reste faible ? 25 années sont nécessaires pour couvrir le montant des droits de succession (rendement net d’impôts de 0,35 % par rapport à la valeur en capital).
Au final, les 4 mesures que préconise le SGV
1/Exonération de 100 % des droits de donation et de succession pour les biens loués pendant une longue durée (au moins 18 ans) comme le pratiquent l’Allemagne, l’Italie et la Suisse.
2/Raccourcissement du délai de rappel fiscal
3/Rétablissement de la réduction de droits pour les donations consenties avant un certain âge
4/Rehaussement des exonérations partielles notamment
IV/ Les ambitions environnementales de l’AOC Champagne
La filière champenoise est engagée depuis de nombreuses années dans une démarche progrès environnemental. Ainsi,
- 50 % des surfaces sont sous certification environnementale et l’objectif est de 100 % en 2030
- Objectif 0 herbicide en 2025
- 50 % des surfaces sont couvertes par la technique de confusion sexuelle (quasi-suppression des insecticides)
- 100 % des effluents vinicoles et sous-produits sont valorisés, 90 % des déchets industriels sont traités et valorisés.
Cette démarche de progrès environnemental a été renforcée par la demande récente d’intégration de mesures agro-environnementales au sein du cahier des charges de l’AOC Champagne, votée en 2021 par le Conseil d’Administration du SGV Champagne. Ainsi :
- l’introduction d’une variété résistante aux maladies de la vigne et adaptée à l’évolution du climat. Il s’agit du voltis, dont les qualités organoleptiques semblent assez compatibles avec l’identité des vins de Champagne. L’objectif de l’introduction de ce nouveau cépage à titre expérimental est de permettre aux vignes de résister au mildiou et à l’oïdium, tout en s’adaptant au réchauffement climatique grâce à des débourrements plus tardifs
- L’obligation du traitement des plants à l’eau chaude
- Le maintien du couvert végétal hivernal
- L’évolution de la densité de plantation tout en préservant la qualité et la typicité des vins de Champagne pour accompagner la transition écologique dans un contexte de changement climatique.