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Oïdium (maladie de la vigne)

Oïdium
L’oïdium en pleine recrudescence due au réchauffement climatique © J.-C. Gutner

L’oïdium est une maladie fongique de la vigne. L’oïdium de la vigne est la première maladie cryptogamique à pénétrer en France. Elle fait son apparition dès 1845 (venue des Etats-Unis) dans une serre à vigne de Margate en Angleterre. Elle se propage ensuite en Belgique et en France pour atteindre le Languedoc en 1851. Elle est due à un champignon (comme le mildiou*) l’Uncinula  necator, encore appelé l’Erysiphe necator qui se développe sur tous les organes verts de la vigne. Il s’installe sournoisement dans les parcelles et provoque non seulement des pertes de rendement mais aussi une dégradation de la qualité du vin. La particularité de cette maladie est sa vitesse de propagation. De 1853 à 1854, l’ensemble du vignoble du sud de la France est contaminé, un véritable désastre qui anéantit jusqu’au deux-tiers de la récolte. La production française de vin chute de 75 %. Elle passe de 45 à 11 millions d’hl entre 1850 et 1854. Partout, on arrache les vignes obligeant les populations à s’expatrier.

*Le mildiou fut repéré en France, quelques années plus tard en 1878. En 3 ans, il devait s’étendre sur tout le vignoble. Les vignerons sont ainsi depuis le milieu du XIXe siècle confrontés à ces deux maladies endémiques qu’ils combattent en adaptant produits et techniques de plus en plus sophistiqués.

L’oïdium appelé aussi maladie de la cendre ou blanc de la vigne

L’oïdium souille la vigne d’inflorescences blanches. On l’appelle d’ailleurs la maladie de la cendre ou blanc de la vigne. Il provoque souvent également une déformation des feuilles, qui se crispent et se mettent en gouttière. C’est en général de mai à juin et par temps pluvieux, que le champignon s’attaque aux rameaux et aux grappes. Les feuilles deviennent jaunâtres et se nécrosent, donnant à la vigne cette impression d’avoir été blanchie. Si l’attaque est précoce, les baies de raisins peuvent éclater. Face à l’oïdium, tous les cépages ne sont pas égaux. Certains sont plus sensibles que d’autres. Ainsi en blanc, le chardonnay est l’un des plus touchés. En rouge, c’est le carignan, cépage méditerranéen qui est particulièrement sensible à l’oïdium.

Oïdium
L’oïdium est du à un champignon, l’Erysiphe necator parasite obligatoire qui est strictement inféodé au genre Vitis.

Traitement au soufre de l’oïdium

Dès son apparition, on connaît les moyens de lutter contre l’oïdium aussi bien aux Etats-Unis (vers 1829)  qu’en Angleterre (1846). Le produit miracle trouvé est le soufre utilisé à sec en poudrage ou, en suspension dans l’eau par pulvérisation. Ce traitement sur la vigne est mis au point par Henri Marès vers 1850* et appliqué en France dès 1857. La vigne souffre, soufrons la vigne proclamait alors une lithographie d’Honoré Daumier. Deux autres inventions vont venir compléter ce traitement, l’une est due au languedocien Laforgue : la boîte à soufrer et l’autre à un propriétaire bordelais, le comte de la Vergne qui met au point le soufflet. Rien, même aujourd’hui n’est plus efficace que le soufre pour combattre cette maladie.

*On lui doit  d’avoir établi le protocole du soufrage des vignes.

Comment reconnaître l’oïdium ?

D’abord en faisant confiance aux sentinelles, ces rosiers plantés à chaque rangée de vignes. C’est eux les premiers attaqués. Donc, le vigneron est prévenu ! En effet, l’une des grandes caractéristiques de l’oïdium, comparativement aux autres maladies épidémiques de la vigne est sa capacité d’expression très brutale sur grappes après la floraison sans manifestation alarmiste préalable sur la végétation. Sur les feuilles, il est ainsi possible d’observe des tâches diffuses de poussières grisâtres. La décoloration est moins marquée que dans le cas du mildiou.  Sur la face inférieure apparaît un feutrage grisâtre. La partie attaquée du limbe croît plus lentement provoquant la déformation de la feuille qui se crispe. Sur les sarments, le même revêtement poussiéreux grisâtre se développe. Les grappes et les grains contaminés se recouvrent d’une fine poussière grisâtre qui provoque des nécroses noires. La croissance des parties atteintes s’arrête, alors que la partie du grain sain continue de croître, par conséquent les baies éclatent et laissent apparaître les pépins. Ces lésions sont très favorables à la pénétration de la pourriture grise et compromettent la récolte.

Oïdium grappe contaminée
L’oïdium, grappe et grains contaminés. De gauche à droite : grappe saine, grappe attaquée, feuille saine, feuille attaquée (Photos ICV et BASF)

Aujourd’hui, recrudescence de l’oïdium due au réchauffement climatique

Depuis quelques années, l’oïdium s’étend en dehors de sa zone traditionnelle de développement du pourtour méditerranéen. II touche désormais les vignobles du nord-est et de l’ouest de la France. Sa présence est notoire en Alsace, en Bourgogne et en Champagne. La Charente avec le vignoble de Cognac, le Val-de-Loire et le Bordelais sont également touchés. Un élément peut expliquer cette extension : le réchauffement climatique, associé à une augmentation des températures moyennes et à des moindres précipitations printanières et estivales.

L’impact quantitatif et qualitatif de l’oïdium sur la récolte, le raisin et le vin

L’impact quantitatif de l’oïdium sur la récolte est mal évalué puisque souvent invisible. Il peut aller jusqu’à 60 % de perte de poids des grappes. Les premières attaques, peu après la floraison, peuvent entraîner de fortes coulures, allant jusqu’à la chute de bouquets d’inflorescence. L’oïdium empêche ainsi le développement des grappes et génère une perte de rendement invisible au moment des vendanges. On a pu calculer que des grappes touchées à 25 % perdent 28 % de poids par rapport aux grappes saines et au-delà de 60 %, les pertes estimées sont à plus de 62 %.

L’oïdium, son impact sur le raisin et le vin

L’oïdium modifie profondément la composition du raisin et son comportement à la cave. Il contribue à des vins plus instables et fragiles. Il provoque une forte élévation du pH* générant des vins plus instables en couleur, plus fragiles sur le plan microbiologique et donc plus difficiles à protéger. Les moûts de vendanges touchés par l’oïdium sont en effet particulièrement riches en potassium ce qui provoque une diminution de l’acide tartrique et une élévation du pH (par combinaison sous forme de tartrate de potassium).

*Le pH est la mesure de l’acidité du vin. Un pH moins élevé indique une augmentation de l’acidité et un pH plus élevé  indique une augmentation de l’alcalinité (base ou milieu neutre).

Des arômes indésirables et désagréables

Les jus issus de vendanges impactées par l’oïdium vont développer des arômes indésirables et désagréables dus à des composés phénolés comme l’eugénol (clou de girofle), la zingérone (gingembre)… ; à des arômes herbacés et à des composés responsables d’odeurs de champignons. L’oïdium va donc altérer significativement le profil sensoriel et donc la spécificité d’un vin.

  • En matière d’arôme, il réduit les arômes fruités et confiturés, augmente les arômes désagréables comme ceux liés au moisi, à l’animal, au végétal. Résultat, disparition de la typicité variétale.
  • En matière de goût, les vins en bouche seront plus tanniques, plus astringents, plus amers, plus secs.
oidium, impact qualitatif de la maladie
L’impact de l’oïdium sur la qualité du vin (document ICV et BASF)

Le programme de recherche In vivo qualitas mené pendant 6 ans par le groupe BASF et l’ICV (Institut Coopératif du Vin) a pu dresser des seuils de tolérance à ne pas dépasser. Ils ont établi qu’à partir de 8 % d’oïdium dans la vendanges, des défauts aromatiques sont perceptibles et qu’au-delà de 13 %, les défauts du vin sont alors irréversibles.

Le traitement contre l’oïdium

Grappe attaquée par l'oïdium
A quand l’homologation de cépages résistants ?

La lutte contre l’oïdium ne peut être que préventive, systématique (il n’y a pas d’avertissements) et menée sans discontinuité durant la période de sensibilité de la vigne. Elle nécessite une bonne prophylaxie et une lutte chimique raisonnée. En effet, en raison de l’apparition de souches résistantes à certains IBS*, une attention particulière doit être portée au choix des produits. Elle doit donc débuter tôt, en phase avec les premières interventions contre le mildiou. Quant à  l’utilisation de soufre mouillable (8 g  par litre d’eau avant la floraison et 4  g par litre d’eau après floraison), celui ci a l’avantage de pouvoir être mélangé aux bouillies cupriques (bouillie bordelaise, oxychlorure etc.). Le délai d’utilisation du soufre permet de traiter encore une semaine avant la récolte, mais le soufre présent sur les baies peut être la cause de la formation de mercaptan lors de la vinification. Un délai de 3 semaines limite ce risque.

*l’utilisation massive des IBS (Inhibiteurs de la Biosynthèse des Stérols) a entraîné l’émergence de souches résistantes. Ces fongicides (ils datent des années 1960) imidazoliques et triazoliques représentent actuellement le plus gros marché des fongicides

Contre l’oïdium, quelques règles à respecter

Des règles strictes sont à respecter dont l’observation précise et méticuleuse de l’avancée de la maladie. C’est la seule manière de bien évaluer l’opportunité d’une intervention précoce.  Il faut en effet savoir que des traitements dits curatifs de rattrapages sur grappes atteintes sont inutiles. Après la fermeture des grappes, il faut alors choisir des produits anti-mildiou actifs sur oïdium pour minimiser les attaques sur feuilles et prévenir les formations de cléistothèces*.

*les cléistothèces sont produits à l’automne par le champignon à partir du mycelium qui recouvre les feuilles et les extrémités immatures des pousses. Après le lessivage des pluies, les cléistothèces se conservent dans les infractuosités des écorces. Au printemps, par temps pluvieux ces fructifications libèrent des ascospores responsables des contaminations.

Des mesures prophylactiques contre l’oïdium

Il est essentiel de mettre en œuvre, dès la mise en place du vignoble, les mesures prophylactiques ou agronomiques susceptibles de limiter le développement du parasite : aération des grappes (palissage, etc.) et équilibre de la vigueur des souches (choix du porte-greffe, fertilisation adaptée, enherbement). En outre, en permettant une meilleure pénétration des produits, ces mesures amélioreront l’efficacité des traitements*.

*Au moment des traitements, l’efficacité de la protection est fortement liée à la qualité de la pulvérisation, notamment en localisant les traitements sur grappes et en privilégiant l’application “face par face”.

Traitement contre l'oïdium
Le coût du traitement. En prenant l’exemple du Languedoc, un hectare de chardonnay à raison de 5 traitements annuels contre l’oïdium revient en moyenne à 200 € au producteur ce qui, reporté à une bouteille, correspond entre 5 et 10 % de son prix.

L’avenir : un bio-fongicide

Aux Etats-Unis, un bio-fongicide est employé dans la lutte contre l’oïdium. Il s’agit d’un champignon Ampelomyces quisqualis qui parasite et détruit l’oïdium de la vigne. Pulvérisé au moins 2 fois de suite entre 7 et 14 jours d’intervalle, selon la pression d’oïdium, ce fongicide permet de diminuer l’utilisation du soufre en fin de saison. Il est aussi appliqué en alternance notamment avec les IBS (voir plus haut).

(Sources : ICV et BASF)

François

  • 1990 – Les grands vins du monde, préfacé par Gérard Depardieu. 
  • 1992 – Grands et petits vins de France, préfacé par Jean Carmet.
  • 1996 – Le guide des grands et petits vins de France, préfacé par Alain Favereau.
  • 2000 – The Flammarion Guide to World Wines
  • 2013 – Les vignobles mythiques, aux éditions Belin préfacé par Pierre Lurton (Cheval Blanc et Yquem).
  • 2014 – Prix Amunategui-Curnonsky décerné par l’APCIG (association professionnelle des chroniqueurs de la gastronomie et du vin).
  • 2016 – Cépages & Vins aux éditions Dunod.
  • 2020 – Cépages & Vins, nouvelle édition, éditions Dunod.

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