Champagne 2021, dossier complet de A à Z en 32 articles
En 32 articles, pour découvrir tout ce qui a fait l’actualité du champagne en 2021 (Cliquez sur l’article qui vous intéresse, colonne de droite dans la table des matières)
Bilan des vendanges 2021
Du désespoir à l’espoir voila comment le SGV (Syndicat Général des Vignerons de Champagne) a qualifié l’année 2021. A première vue, le bilan semblerait catastrophique. Du jamais vu depuis le milieu des années 50 : L’année 2021 a subi des conditions climatiques épouvantables. Ainsi, le gel à lui seul a occasionné en 12 jours,30 % de perte de rendement. La grêle de son côté a touché 500 ha dont la moitié détruit à 100 %. Des pluies à répétition depuis le printemps ont favorisé le mildiou responsable de 25 à 30 % de pertes.
Un rendement fixé à 10 000 kg/ha. Malgré cette avalanche de catastrophes, la perspective globale reste néanmoins positive. En effet, le dispositif de réserve interprofessionnelle va permettre de palier les effets directs des pertes quantitatives. On pourra ainsi approcher le rendement en appellation de 10 000 kg/ha. Quant au rendement agronomique moyen, il sera proche de 6500 kg/ha mais la qualité est au rendez-vous. Un seul mot qualifie cette vendange 2021 : hétérogénéité avec des écarts très importants selon les secteurs et les exploitations. Heureusement, sur le plan qualitatif, le potentiel des raisins est plus que rassurant. Ajoutons que les vins de réserve utilisés pour les assemblages sont d’une excellente qualité.
Economie du Champagne, l’optimisme après le désespoir !
Des objectifs de vente sont plutôt optimistes. Les expéditions de janvier à août 2021ont progressé de 41,3 % par rapport à 2020 et de 5,6 % par rapport à 2019. Si depuis 2010 elles avaient tendance à décliner, leur valorisation progressait grâce notamment à la demande des consommateurs vers des cuvées spéciales, millésime, rosé …. Mais ce beau mécanisme s’est brusquement brisé sur la pandémie. A fin 2020, les tendances des ventes retrouvaient, avec 244 millions de bouteilles, les niveaux oubliés depuis 25 ans (247 millions en 1995). Et pourtant, pour 2021, les perspectives sont plus que bonnes. La projection d’ici à la fin d’année se monte à 305 millions de bouteilles expédiées et un chiffre d’affaires s’approchant des 5 milliards d’€.
Une reprise rapide
Après des vendanges 2021 compliquées et une récolte quasiment divisée par deux, la filière champagne est en mesure de rebondir comme elle l’a toujours fait. De plus, malgré une quantité plus faible qu’espérée, la qualité de la vendange 2021 promet des vins à la hauteur de l’appellation Champagne. Enfin, en ce qui concerne l’économie, une reprise plus rapide qu’annoncée avec des chiffres plutôt encourageants en prévision pour la fin de l’année, et une dynamique particulièrement marquée sur l’export.
Enfin, l’année 2021 se termine par la naissance d’un géant : Terroirs & vignerons de Champagne
La Coopérative régionale des vins de Champagne (CRVC, Champagne Castelnau) vient en effet d’être absorbée par le Centre vinicole-Champagne Nicolas Feuillatte (CV-CNF), marque leader en France et la troisième dans le monde en volume. Terroirs & vignerons de Champagne se classe dorénavant parmi les trois premiers opérateurs de la Champagne ; un groupe coopératif qui regroupe 6.000 vignerons et 3.000 hectares (près de 9 % de la surface agricole du vignoble champenois). Il est devancé par le numéro 1 du secteur, le groupe LVMH détenant les marques Moët & Chandon, Ruinart, Veuve Clicquot, Krug, Dom Pérignon. Il fera par contre jeu égal avec des groupes comme Pernod-Ricard avec les marques Mumm et Perrier-Jouët ; Vranken-Pommery Monopole ; Laurent-Perrier ou Lanson. Terroirs & vignerons de Champagne avec un potentiel de production de 24,5 millions de bouteilles, ambitionne un chiffre d’affaires de 300 millions d’€. Le siège de la nouvelle entité est au domaine Plumecoq à Chouilly avec comme présidente, l’ancienne présidente du Centre vinicole Nicolas Feuillatte, Véronique Blin, et comme directeur général, Christophe Juarez.
Sommaire de A à Z, tout ce qui fait le champagne
- Bio, qui fait quoi en bio en Champagne
- Bulles de champagne, tout savoir sur les bulles !
- Capitales du Champagne : Epernay, Reims et Hautvillers
- Catégories : Les 7 champagnes dont la mention figure sur l’étiquette
- Cépages du Champagne, les cépages oubliés, les nouveaux cépages
- Champagne de Vignerons et SGV (Syndicat Général des Vignerons de la Champagne)
- Chef de Caves en Champagne, son rôle, son profil
- Chiffres clés du champagne 2020/2021
- Classement des villages en Champagne : Grand Cru, Premier Cru, Second Cru
- Climat et changement climatique en Champagne
- Clos, les rares clos de champagne
- Concurrence. Le Champagne a-t-il des concurrents, oui !
- Coopératives champenoises
- Délimitation et révision de la zone en appellation Champagne
- Dosage et les 8 spécificités de goût du champagne
- Echelle de prix propre au champagne. Combien le kilo de raisin en 2021 ?
- Elaboration du Champagne en dix étapes : des vendanges à l’habillage des bouteilles
- Environnement, les nouvelles ambitions environnementales de l’AOC Champagne
- Foncier et fiscalité sur les transmissions
- Géologie et nature du sol en Champagne
- Grandes marques et grandes maisons de Champagne
- Histoire du champagne, l’apport de Dom Pérignon. Protection de l’appellation Champagne dans le monde
- Les Mentions sur une étiquette de Champagne. Que signifient RC, RM, SR, ND, MA, CM ?
- Patrimoine mondial, les sites champenois inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco
- Millésimes, grands millésimes, origines. Qu’est-ce qu’un millésime en champagne ? Tableau des plus grands millésimes jusqu’à 2020.
- Règlementation, les 6 règles principales et Taille de la vigne en Champagne
- Top 30 des marques de champagne les plus admirées au monde en 2020
- Top 15 des grandes fortunes champenoises en 2020
- Verre de Champagne : flûte, coupe ou… Tout est une question de bulle
- Vignoble champenois et ses 4 grands vignobles (Montagne de Reims, Vallée de la Marne, Côte des Blancs, Côte des Bar)
- Vins sur lattes, côté sombre du champagne !
- Vignerons indépendants en Champagne, les raisins de la colère !
Le Bio en Champagne
3,5 % du vignoble en viticulture biologique. Le mouvement fut engagé dans les années 70 par des pionniers comme Jacques Beaufort (Ambonnay), Jean Bliard (Hautvillers), Serge Faust (Vandières), Roger Fransoret (Mancy), Georges Laval (Cumières), Yves Ruffin (Avenay Val d’Or) et Pierre Thomas (Oger). En 2020, 3,5 % des surfaces de l’appellation Champagne étaient en agriculture biologique, soit un peu plus de 1100 ha concernant 260 domaines. Et 2 % des surfaces étaient en conversion selon les derniers chiffres du Comité interprofessionnel des vins de Champagne (CIVC). Des chiffres qui restent nettement inférieur à celui d’autres appellations mais qui correspondent à une progression très prometteuse en surface, de 24 % par rapport à 2018. Pour rappel, 16 % du vignoble français était conduit en AB en 2020. Pour illustrer ce dynamisme champenois, on enregistrait un démarrage de la conversion de 137 nouveaux domaines, soit 685 ha de vignes supplémentaires, de janvier à fin août 2020. Pascal Doquet, vigneron bio à Vertus près de 15 ans et président de l’Association des champagnes biologiques* est très optimiste : On a doublé les surfaces en conversion par rapport aux années précédentes, il y a un vrai effet notamment avec les formations qu’on propose depuis des années…et en plus on a eu une année 2020 assez facile au niveau climatique.
*En 2020 l’ACB (Association des champagnes biologiques) représentait 114 adhérents Vignerons et Maisons, et une dizaine de sympathisants.
Quand les grandes maisons de Champagne s’y mettent. L’annonce en 2020 de la conversion en bio du Champagne Vranken-Pommery devrait avoir un effet d’entraînement pour le vignoble champenois. A ce jour, seuls 175 ha sont concernés par cette conversion bio, soit 60 % des vignes de Vranken-Pommery avec une promesse pour la totalité (sachant que l’arrêt des herbicides a débuté il y a déjà une bonne dizaine d’années). Chez Roederer le pionnier, la moitié des vignes seront certifiées en agriculture biologique en 2021. Ainsi, 116 ha sur 240 ha seront officiellement certifiés bio lors de la vendange 2021 entraînant une augmentation de 20 à 30 % du nombre d’heures de travail pour les 55 salariés de la maison.
2020 fut une année record pour les conversions. L’année 2020, pourtant marquée par la crise sanitaire et un recul significatif des ventes de champagne, devrait être une année record en matière de conversion vers l’AB, confirmant l’intérêt porté pour ce mode de culture, par les vignerons et désormais, par les coopératives et Maisons de Champagne. La conversion à l’Agriculture Biologique correspond à la phase de transition vers la certification en Agriculture Biologique. Pour la production de raisins, c’est la quatrième vendange réalisée après l’engagement du domaine auprès d’un organisme certificateur, qui sera certifiées en AB. De plus l’AOC Champagne impose une mise en bouteille au plus tôt le mois de janvier suivant la vendange ainsi qu’un vieillissement en bouteilles de 15 mois minimum, soit 2 années minimum de vinification. Il faut donc compter au minimum 6 ans, pour produire des Champagnes Certifiés AB, pour un domaine qui démarre une conversion. Certains vignerons engagés, membres de l’ACB, ne commercialisent donc pas encore de champagne Bio en raison de ce délai.
Les champagnes Bio en (Association des champagnes biologiques)
(Liste non exhaustive)
- Champagne Robert Barbichon à Gyé-sur-Seine
- Champagne Barrat-Masson à Villenauxe-la-Grande
- Champagne André Beaufort à Polisy
- Champagne Laurent Bénard à Aÿ-Champagne
- Champagne Vincent Bliard à Hautvillers
- Champagne Jérôme Blin à Vincelles
- Champagne Colette Bonnet à Eguilly-sous-Bois
- Champagne Bonnet-Ponson à Chamery
- Champagne Francis Boulard & Fille à Cauroy lès Hermonville
- Champagne Bourgeois-Diaz à Crouttes-sur-Marne
- Champagne Emmanuel Brochet à Villers-aux-Noeuds
- Champagne Charlot-Tanneux à Mardeuil
- Champagne Éric Collinet à Bragelogne-Beauvoir
- Champagne Cordeuil à Noé-les-Mallets
- Champagne Vincent Couche à Buxeuil
- Champagne de Sousa à Avize
- Champagne Éliane Delalot à Nogent l’Artaud
- Champagne Pascal Doquet à Vertus
- Champagne Didier Doué à Montgueux
- Champagne Drappier à Urville
- Champagne Charles Dufour à Landreville
- Champagne Julie Dufour à Landreville
- Champagne Durdon-Bouval à Vincelles
- Champagne Élémart Robion à Lhéry
- Champagne Fleury à Courteron
- Champagne Gaiffe-Brun à Fontaine-sur-Aÿ
- Champagne Hugues Godmé à Verzenay
- Champagne Gustave Goussard à Avirey-Lingey
- Champagne Olivier Horiot à Les Riceys
- Champagne Benoît Lahaye à Bouzy
- Champagne Philippe Lancelot à Cramant
- Champagne Georges Laval à Cumières
- Champagne David Léclapart
- Champagne Leclerc Briant à Epernay
- Champagne Christophe Lefèvre à Bonneil
- Champagne Lelarge-Pugeot à Vrigny
- Champagne Marguet à Ambonnay
- Champagne Pascal Mazet à Chigny-les-Roses
- Champagne Bruno Michel à Pierry
- Champagne Mouzon Leroux à Verzy
- Champagne Thomas Perseval à Chamery
- Champagne Piollot Père & Fils à Polisot
- Champagne Yves Ruffin & Fils à Avenay Val d’Or
- Champagne Ruppert-Leroy * à Essoyes
- Champagne Solemme à Villiers-aux-Nœuds
- Champagne Val’frison à Ville-sur-Arce
- Champagne Vouette & Sorbée à Buxières-sur-Arce
* Le domaine Ruppert-Leroy à Essoyes dans l’Aube est conduit en bio depuis 2010 et certifié Demeter depuis 2014. Le diagnostic biodiversité a permis de recenser 79 espèces animales dans les parcelles et dans un tampon de 100 m autour de celles-ci. 34 espèces d’oiseaux ont été inventoriées. Parmi elles, 10 espèces sont inscrites en liste rouge régionale et/ou nationale, comme le Bruant zizi et l’Alouette des champs.
Le bio difficile en Champagne. 2021 en est le plus bel exemple. Le climat froid et humide de la Champagne rend la vigne particulièrement sensible aux attaques des parasites et des ravageurs ce qui ne facilite pas la conversion au bio. Bon nombre de vignerons qui travaillent en bio ou en biodynamie n’en font pas état pour ne pas se priver de la possibilité de traiter en cas de besoin. Autre point, les champagnes certifiés en bio sont en moyenne 20 % plus chers que les vins conventionnels.
A côté du bio, la viticulture durable en Champagne. Si le bio n’est pas encore tout à fait au rendez-vous, le développement durable l’est avec moins de 50 % d’intrants en 15 ans. Il s’agit de tous ces produits servant à augmenter les rendements comme les fertilisants ou les produits phytosanitaires de type fongicides, herbicides, insecticides, etc. Et sur les 50 % restants, près de la moitié sont autorisés en agriculture biologique. De plus, la quasi-totalité des sous-produits et déchets sont maintenant valorisés. A ce jour, 50 % des surfaces de vignes sont certifiées Viticulture Durable en Champagne pour atteindre à terme, 80 %.
Suppression des traitements d’insecticides. La Champagne est la première région française pour le développement de la technique biologique de confusion sexuelle. Elle permet la quasi-suppression des traitements insecticides classiques sur 15 000 ha soit près de la moitié des surfaces de l’appellation*. On assiste également à un triplement en 10 ans de l’enherbement du vignoble (les contours des parcelles sont désormais enherbés naturellement à plus de 95 %).
*Moët Hennessy annonçait que fin 2020, la maison Moët & Chandon arrêtait l’utilisation des herbicides sur son vignoble.
Une bouteille plus légère. Autre effort apporté par la filière n’est autre que la réduction de 7 % du poids de la bouteille de Champagne (de 900 g à 835 g). La Champagne a ainsi réduit en 10 ans ses émissions de gaz carbonique de 15 % par bouteille expédiée. Elle fait partie des rares filières économiques à avoir réduit ses émissions en valeur absolue. Aujourd’hui, 100 % des exploitants du vignoble champenois sont intégrés dans cette démarche.
Deux certifications possibles en Champagne
1/VDC (Viticulture Durable en Champagne) : C’est une certification mise en place par les instances champenoises et ciblée sur les spécificités locales. Elle est complémentaire de l’approche HVE (Haute Valeur environnementale). 4 enjeux dans cette démarche :
- Maîtriser le recours aux intrants dans un objectif de respect de la santé et de l’environnement,
- Préserver et mettre en valeur le terroir ; la biodiversité et les paysages viticoles,
- Gérer de manière responsable l’eau, les effluents, les sous-produits et les déchets,
- Réduire la dépendance énergétique et l’empreinte carbone de notre exploitation et de la filière.
Une démarche qui contient 140 critères allant de l’aménagement du vignoble à la formation du vigneron, en passant par l’entretien des sols et la gestion des déchets, cet ensemble constituant le référentiel « Viticulture Durable en Champagne ».
2/HVE (Haute Valeur Environnementale) : HVE est une certification environnementale issue du Grenelle de l’Environnement. Il s’agit d’une démarche officielle, encadrée par la loi, et accessible à l’ensemble des exploitants sur la base du volontariat. Elle comporte 3 niveaux d’exigence :
- Niveau 1 : le respect de la réglementation environnementale. C’est un prérequis indispensable pour accéder aux autres niveaux.
- Niveau 2 : le respect d’un référentiel de bonnes pratiques environnementales, composé de 4 thématiques (biodiversité, fertilisation, protection phytosanitaire, gestion de l’eau). Il s’agit d’une obligation de moyens sur le principe de l’Agriculture raisonnée. Ce niveau n’est pas obligatoire pour accéder au niveau 3.
- Niveau 3* : c’est le seul qui permette d’obtenir la mention « Haute Valeur Environnementale ». Il implique des obligations de résultats dans les 4 thèmes cités précédemment. La performance environnementale de l’exploitation est alors évaluée par des indicateurs de résultats précis (indice de fréquence des traitements, balance globale azotée…
Les députés ont validé le crédit de 2500 € d’impôts pour la HVE niveau 3 pour les vignerons certifiés et en cours de certification. Le SGV Champagne et la filière viti militaient pour ce crédit d’impôt et se félicitent de ce vote et du soutien du gouvernement.
Bulles de champagne
Le cœur du champagne, c’est la bulle. Ah, ces bulles dans lesquelles voyagent si bien Gérard Liger-Belair* ! Elles sont faites de 99 % de CO2 dissous et d’arômes sachant qu’une bouteille de 75 cl contient 5 litres de CO2. Elles naissent d’un vin parfait, le champagne alors que sa source de bullage est l’imperfection. Celle-ci est faite de ces microscopiques impuretés collées à la paroi du verre, souvent déposées par le torchon qui les essuie. Ce sont elles qui permettent à des molécules de dioxyde de carbone de fusionner et de former des bulles. Donc, sans ces impuretés, pas de bulle et elles sont 80 millions dans une bouteille et environ 2 millions dans une flûte. Le choix entre coupe et flûte a une influence primordiale sur la grosseur de ces bulles. On le sait, les bulles grossissent lorsqu’elles remontent dans le verre. Plus leur parcours est long plus elles finissent grosses. Elles seront donc plus grosses dans une flûte que dans une coupe. Pour être précis, une flûte de 10 cm de haut engendrera des bulles d’un millimètre de diamètre (et une flûte de 20 à 30 cm, des bulles de 2 ou 3 mm). Pour la coupe, le dégazage est accéléré, et les bulles restent plus petites.
* Gérard Liger-Belair est le seul chercheur au monde à travailler sur les bulles. Toutes ces constatations ont été fondées sur la science grâce à une technique de visualisation laser initiée par le co-auteur de Voyage au cœur d’une bulle de champagne chez Odile Jacob. Gérard Liger-Belair est professeur de physique. Il codirige le laboratoire d’œnologie et chimie appliquée à l’Université de Reims Champagne-Ardenne et a rejoint le Groupe de Spectrométrie Moléculaire et Atmosphérique, au sein duquel il a créé l’équipe Effervescence. En collaboration avec Moët & Chandon, au moyen d’un laser et d’un spectroscope, il a décrit, pour la première fois, les propriétés des bulles de champagne : leur naissance, leur comportement, leur grosseur, leur vitesse de remontée, et finalement leur éclatement qui libère des molécules aromatiques.
Dernier livre de Gérard Liger-Belair (2020) : Un monde de bulles – Le champagne ou la science de l’effervescence (préface de Michel Onfray) : de manière scientifique, comment s’opère l’élaboration du champagne : la formation des bulles et leurs mouvements ; les mécanismes qu’elles induisent en dégustation et la mise en équation de tous ces processus. Un ouvrage pour tous ceux qui souhaitent découvrir le champagne du côté de la science ! (28,50€ chez Ellipse)
Le dernier livre de Gérard Liger-Belair, le spécialiste mondial de la bulle du Champagne.
Les capitales du Champagne : Epernay, Reims, Hautvillers
Entre Epernay, Reims, quelle est la véritable capitale du Champagne ? En fait, le cœur des champenois balance. Epernay et son Avenue de Champagne inscrite depuis 2015 sur la Liste du patrimoine mondial de l’humanité ; cette avenue qui va accueillir début 2021, le musée du Vin de Champagne et d’Archéologie régionale au sein du Château Perrier entièrement restauré. Mais le Champagne se devait d’avoir aussi pour capitale Reims l’une des villes les plus prestigieuses de France. Elle s’honore de sa cathédrale classée au Patrimoine mondial de l’Unesco au même titre que 3 autres bâtiments de la ville : le palais du Tau, le Musée Saint-Rémi et la basilique Saint-Rémi. Un quatrième site rémois, la colline Saint-Nicaise* consacré par l’Unesco en 2015 vient compléter cet ensemble exceptionnel. Quant à Hautvillers, qui lui contesterait le titre de capitale historique du Champagne ? C’est là que repose Dom Pérignon dans la célèbre abbaye où il vécut en tant que moine cellérier. Sa mort (quelle coïncidence !) correspond avec celle du roi soleil.
*Il s’agit d’anciennes carrières de craie exploitées à l’époque médiévale et reconverties en caves de champagne. Les sous-sols conservent à l’abri de la lumière et à température constante (10°) la production de six grandes maisons de champagne : Charles-Heidsieck, Ruinart, Pommery, Veuve Clicquot, Martel et Taittinger.
Epernay et son avenue du Champagne
Epernay c’est Champagne sur toute l’avenue. LesChamps Elysées du Champagnea-t-on pu dire.Sous les pavés de cette prestigieuse avenue, 200 millions de bouteilles dorment dans la craie, de l’or en bulles estimé à 4 milliards d’€.Epernay encerclée par la vigne est effleurée par la Marne qui de Châlons à Château-Thierry n’en finit pas de se perdre dans ses circonvolutions. Alors tiendrait-elle à distance Reims, sa grande rivale située plus au nord ? Une montagne sur 27 km les sépare. Et quelle montagne ! La mythique Montagne de Reims ! Un obstacle qui sied à Epernay, décrétée capitale du Champagne. Pour Franck Leroy, maire réélu d’Epernay en 2020 : le sujet est réglé depuis longtemps, Epernay est la capitale du champagne. Le comité interprofessionnel du vin de Champagne est ici, la plus grande maison, Moët & Chandon, est ici. Nous avons 110 km de caves, et l’avenue de Champagne est classée au Patrimoine mondial de l’Unesco.
Quand Epernay inscrit son nom au patrimoine mondial de l’humanité. Aÿ, entre coteau et canal, situé à 5 km d’Epernay, (presque un faubourg de la ville !) avec ses 429 ha de vignes classées Grands Crus et ses célèbres maisons de Champagne (Ayala, Bollinger, Deutz…) contribuent aussi à l’aura de la cité sparnacienne auxquels pourrait s’ajouter évidemment Hautvillers mais aussi nombre de villages alentours classés premier crus : Pierry, Cumières, Mareuil-sur-Aÿ (Champagne Philipponnat…), Dizy, Chouilly… Last but not least, Epernay et la Champagne, le 4 juillet 2015, après 8 ans d’attente, étaient inscrits* officiellement sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Unesco.
*Dans la catégorie Paysage culturel, 3 sites de la Champagne ont été retenus : l’avenue de Champagne à Epernay, la colline Saint-Nicaise à Reims et les coteaux historiques autour d’Epernay.
Château Perrier au 13 avenue de Champagne : le nouveau musée du Vin de Champagne et d’Archéologie régionale
Depuis une bonne dizaine d’année, la Ville d’Epernay s’est engagée dans un vaste projet de réhabilitation du Château Perrier. Elle y accueille depuis mai 2021, le Musée du Vin de Champagne et d’Archéologie régionale ; un musée reconnu patrimoine majeur par le Ministère de la Culture lors de son récent classement Monument Historique. Il réunit plus de 100 000 pièces archéologiques et viti-vinicoles. En matière d’archéologie, le fonds du musée est constitué actuellement de 80 000 pièces régionales. C’est la première collection d’archéologie régionale en France, après le musée d’archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye. Pour le fonds viticole, il est composé de 6 000 pièces consacrées à l’histoire du champagne. Ces richesses sont uniques ! Notre ambition est de les préserver, de les mettre en valeur et de les rendre accessibles à tous précise Franck Leroy, le maire d’Epernay.
A l’arrière du château, un jardin à l’anglaise, mais adapté pour le XXIe siècle. C’est une succession de tableaux avec, autour d’un vallon central, des constructions mystérieuses à vocation ornementale
Petite histoire du Château Perrier. Il est de style Louis XIII. Il fut construit de 1852 à 1857 pour les époux Perrier à l’époque de l’expansion du Champagne à travers le monde. Il devait servir d’hôtel particulier et de caves à Charles Perrier, directeur de la maison de champagne Perrier-Jouët. Sa construction est l’œuvre de l’architecte sparnacien, Pierre-Eugène Cordier. A la fois lieu de résidence, de réception et d’élaboration du Champagne, grâce aux caves reliées directement à la ligne de chemin de fer, le château constitue le premier témoignage du style éclectique en province. Par la suite, le château servit successivement de quartier général aux armées britanniques (1940), allemandes (de 1942 à 1944) et américaines (1945) avant d’abriter momentanément la bibliothèque et le musée municipal. Il sera bientôt ouvert à l’un des plus beaux musées français consacrés au vin et à l’archéologie régionale.
Epernay, capitale du Champagne ! Elle l’est assurément avec une bonne quinzaine de marques présentes (la plupart avenue de Champagne) dont :
- Pol Roger,1 rue Sir Winston Churchill : 1,7 millions de bouteilles
- De Venoge, 46, avenue de Champagne : 2 millions de bouteilles
- Gosset*, 12 rue Godart Roger : 1,2 millions de bouteilles
- De Castellane, 57 rue de Verdun : 2,2 millions de bouteilles
- Charles Mignon, 6 et 7 rue Joliot Curie : 600 000 bouteilles
- Esterlin, 25 avenue de Champagne : 1,2 millions de bouteilles
- Ellner, 6 rue de la Côte Legris : 500 000 bouteilles
- Perrier-Jouët, 28 avenue de Champagne : 2,5 millions de bouteilles
- Mercier, 75 avenue de Champagne : 4,3 millions de bouteilles
- Boizel, 46 avenue de Champagne : 600 000 bouteilles
- Besserat de Bellefon, 22 rue Maurice Cerveaux : 1,4 millions de bouteilles
- Moët & Chandon, 20 avenue de Champagne : 32 millions de bouteilles
- Comtesse Lafond, 79 avenue de Champagne : (production ?)
- Alfred Gratien, 30 Rue Maurice Cerveaux : 300 000 bouteilles
Y sont également recensé 150 exploitants viticoles dont 57 récoltants manipulant avec leurs sièges à Epernay ou même leurs sites de production. Ajoutons 3 institutions installées elles aussi à Epernay, l’une a été fondée en 1882, c’est l’Union des Maisons de Champagne, la plus vieille institution champenoise ; autre institution, (depuis 1904), le Syndicat général des vignerons et enfin, le Comité interprofessionnel du vin de Champagne né ici en 1941.
*La Maison Gosset dont le siège est maintenant à Epernay, 12 rue Godart-Roger. C’est la plus ancienne maison de vins de Champagne puisque fondée à Aÿ en 1584. La cuvée 430 ans marquait en 2014, l’anniversaire de la maison ; une cuvée élaborée à partir des millésimes 1995, 1996 et 1998, trois millésimes jugés les plus beaux dans la décennie 90. L’assemblage de Chardonnay (60 %) et de Pinot Noir (40 %) est issu de raisins provenant des meilleurs crus de la Champagne : Aÿ, Bouzy, Ambonnay et Verzenay (430 a été tirée en 430 magnums).
Quand la Maison Belle Epoque de Perrier-Jouët ouvre ses portes, avenue de Champagne
La Maison Belle Époque propriété de Perrier-Jouët est l’un des joyaux de l’avenue de Champagne. Elle a été totalement restaurée en 2017, un chantier de deux ans pour cette demeure construite à la fin du XVIIIe siècle. Aujourd’hui, après de longues années de recherches, elle rassemble un mobilier, objets et œuvres d’art, la plupart signés des grands maîtres Gallé, Majorelle, Guimard, Daum, Lalique, Mucha, Georges de Feure… ; une impressionnante collection d’Art Nouveau français : la plus grande collection privée en Europe précise Perrier-Jouët.
L’avenue de toutes les folies. Cette ville de 24 000 habitants, de tous les pores de ses pierres respire le Champagne. Pour lui, elle s’est bâtie en dessus et en dessous, à la lumière, à l’ombre. Quelle autre ville aurait su avec autant de talent métamorphoser son Faubourg de la Folie traversé autrefois par l’ancienne route royale reliant Paris à l’Allemagne, devenue rue du commerce, en une brillante avenue connue du monde entier : l’avenue de Champagne entièrement réaménagée en 2009 selon un concept d’avenue-parc qui attire 400 000 visiteurs par an (hors période Covid). Les voici donc les Champs Elysées de la Champagne ! Elle serait dit-on l’avenue la plus riche du monde. Une allée triomphale de 1,5 km avec deux univers qui se superposent : dans l’ombre, un inframonde avec son incroyable labyrinthe de caves et de galeries (110 km) et au-dessus, à la lumière, l’apparat des grandes demeures construites à la gloire du Champagne : châteaux (Perrier, Gérard, Pékin), hôtels particuliers (Auban-Moët, Chandon, Maigret, Gallice, de Billy ou Mercier), villas (la villa rose notamment), Maison Belle-Epoque, propriété Perrier-Jouët, joyau de l’Art Nouveau. Ainsi, cours d’honneur, portails, grilles monumentales et même un lycée alternent le long de cette avenue avec des bâtiments à usage plus fonctionnels ; un mélange détonnant de styles Renaissance et néoclassique illustré par l’ancien hôtel Gallice (au numéro 33), prix de Rome en 1896, sans doute le plus bel exemple de ce style. Mais c’est surtout la vision d’un XIXe siècle triomphant à l’architecture toute emprunte du style Louis XIII en brique et pierre tel le château Perrier (aujourd’hui, Musée du Vin et de l’Archéologie régionale, voir plus haut) ; et enfin, cette étonnante réplique du Trianon de Versailles à l’entrée de l’avenue qui marque le plus les visiteurs.
Reims, l’autre capitale du Champagne
Reims partage le titre envié de capitale du Champagne avec Epernay. Reims, douzième commune de France par sa population (180 000 habitants) est ni curieusement le chef-lieu du département de la Marne (Châlons-en-Champagne) ni le chef-lieu de la région grand-Est (anciennement région Champagne-Ardenne). Mais le Champagne se devait d’avoir pour capitale l’une des villes les plus prestigieuses de France avec sa cathédrale classée au Patrimoine mondial de l’Unesco au même titre que 3 autres bâtiments de la ville : le palais du Tau, le Musée Saint-Rémi et la basilique Saint-Rémi. La cathédrale qui fêtait en 2011 le 800e anniversaire de sa consécration est le site du baptême de Clovis et du sacre des Rois de France. Elle montre aujourd’hui ses atours retrouvés grâce à de généreux mécènes américains, mais aussi aux vignerons et aux maisons de champagne.
Reims sous l’emprise du vin et du Champagne. Une chapelle consacrée à Saint-Vincent, patron des vignerons, fut érigée près de l’ancienne porte Mars vraisemblablement au temps de Saint-Rémi. Elle dut être détruite à la fin du XVIIe siècle, sans que la ferveur des fidèles pour le culte de Saint-Vincent ne diminue pour autant. Sans doute reste-il encore dans la ville quelques arpents de vignes. Ainsi le Clos Lanson. C’est une parcelle unique d’un hectare de chardonnay posé sur les caves de la maison de Champagne Lanson et ceint de murs à seulement quelques pas de la cathédrale de Reims. Il faut aussi mentionner l’impressionnant réseau de 250 km de caves et de galeries dites crayères* creusées entre 20 et 40 mètres dans le sous-sol et pour la plupart gallo-romaines. Enfin, la production des terroirs viticoles de la Montagne de Reims, proches de Reims, contribue aux assemblages de Grandes Marques de Champagne.
Les crayères de Reims. Après la mise en bouteille, le Champagne est conservé dans les caves. Des kilomètres de galeries s’étendent dans les sous-sols de Reims et de nombreuses crayères, ces puits de lumières en témoignent. La craie qui en était extraite est un matériau fondamental dans les édifices rémois. A titre d’exemple, le mur d’enceinte (abattu au XIXe siècle), qui protégeait la ville au XIVe siècle, a nécessité, selon les estimations, quelques 15 000 m3 de craie. L’extraction de la craie fut intensive du Xe au XVIIIe siècle offrant au Champagne, l’un de ses atouts, des caves idéales pour sa maturité. Un milliard de bouteilles y dorment aujourd’hui.
Le Champagne prend ses quartiers… Boulevard Lundy (le plus prestigieux de la ville) et rue de Savoye, voici sans conteste le triangle d’or du Champagne à Reims avec Krug, Henriot, Roederer, Mumm et Palmer. A proximité de la butte Saint-Nicaise et ses pentes crayeuses (les derniers vestiges des remparts de Reims construits à partir du XIIIe siècle), l’empire Pommery et Veuve-Clicquot, et, non loin, Taittinger.L’allée du Vignoble qui héberge le champagne Paillard, le champagne Chanoine abrite maintenant le nouvel empire de Piper et Charles-Heidsieck.
… et ses marques. La présence du négoce à Reims est très marquée avec une vingtaine de marques. En faisant un calcul approximatif, on atteint au moins les 80 millions de bouteilles portant l’étiquette de Reims :
- Vranken Pommery / Demoiselle (20 millions)
- Lanson (6 millions)
- Ruinart (1,7 million)
- Taittinger (5 millions)
- Veuve-Clicquot (16 millions)
- Henri Abelé* (300 000)
- Louis Roederer (8 millions)
- Mumm (9 millions)
- Krug (1 million)
- Henriot (1,5 million)
- Montaudon (2 millions)
- Charles et Piper-Heidsieck (8 millions)
- Paillard (500 000)
- Chanoine Frères (1,2 million + gamme prestige (Tsarine) : 500 000 )
- Alain Thiénot (400 000)
Sans oublier les marques des coopératives :
- Palmer (300 000)
- Jacquart (8 millions)
- De Castelnau (150 000)
Un sourire qui pétille
Henri Abelé, propriétaire d’une grande maison de champagne (50, rue de Sillery à Reims) et mécène réputé de la cathédrale fonde après la guerre, avec l’architecte Max Sainsaulieu, la Société des Amis de la cathédrale de Reims. II propose aussi à l’archevêque de Reims, la commercialisation d’une marque de Champagne, le Champagne des cathédrales dont les bénéfices iraient à l’archevêché. On dit que le prélat qui ne voulait froisser personne (tout au moins dans le monde du champagne), refusa. Henri Abelé déposera cependant le 27 mai 1918 la marque Sourire de Reims devenue depuis une grande cuvée. Fondée en 1757, la Maison de champagne Henri Abelé (crée à Epernay par Théodore Van der Veken) est une des plus anciennes dans l’histoire de la Champagne. Elle a été rachetée en 2019 par le Centre Vinicole – Champagne Nicolas Feuillatte. Pour sa cuvée emblématique le Sourire de Reims Brut, la maison sélectionne les meilleurs crus de chardonnay (60 %) et de pinot noir (40 %) récoltés dans la Côte des Blancs et la Montagne de Reims lors d’années exceptionnelles. La cuvée Sourire de Reims Rosé (100 % pinot noir des Riceys) millésime 2006, assemblage unique parmi les maisons de Champagne est issu d’un processus de macération courte (36 à 48 heures).
Hautvillers, la capitale historique du Champagne
Hautvillers abritant la tombe de Dom Pérignon mériterait le titre de capitale historique du Champagne. Elle n’est qu’une petite commune viticole de la Marne dont le vignoble est classé en premier cru. Hautvillers, au cœur de la Champagne, à 5 km au nord d’Épernay, se situe au carrefour entre la vallée de la Marne et la Montagne de Reims. Ce gros village construit à flanc de coteau mérite amplement le titre de perle du Champagne avec dans son dos, la grande forêt domaniale d’Hautvillers et à ses pieds, une mer de vignes descendant jusqu’à la Marne. Les vignes couvrent 285 ha (41 % pinot meunier, 41 % pinot noir, 18 % chardonnay), travaillées par 141 exploitants dont quelques grandes marques (Moët & Chandon, Roederer, Taittinger). Mais que serait Hautvillers sans Dom Pérignon, le Grand Cellérier de l’abbaye du village qui fit naître, vers 1681, les premières bulles de Champagne, tout au moins celles qui révolutionnèrent les techniques de ce vin exceptionnel ? Ici, On est dans le berceau de la légende du Champagne.
Hautvillers, le village aux 140 enseignes. Avant de rejoindre l’abbaye, à la lisière du village, une promenade s’impose dans ses rues et ses ruelles pavées. Elles sont jalonnées d’enseignes en fer forgé de style naïf. Sobres ou très colorées, les enseignes dévoilent l’activité des maisons et des bâtiments. Aujourd’hui près de 140 enseignes ornent les rues Altavilloises. Au premier coup d’œil, certaines peuvent paraître difficiles à déchiffrer. Il faut dire que cette tradition qui vient du Moyen Âge a été remis au goût du jour depuis les années 1950.
L’abbaye de Dom Pérignon. C’est ici, dans l’ancienne abbaye bénédictine Saint-Pierre d’Hautvillers fondée en l’an 650 et pillée près de 17 fois qu’on voit arriver en 1668 un jeune moine de 30 ans. Il est moine bénédictin, il porte le nom Dom Pérignon et il a des idées plein la tête. Ne revient-il pas d’un pèlerinage à l’abbaye bénédictine de Saint-Hilaire où il a découvert la méthode de vinification des vins effervescents de Limoux. Se doute-t-il qu’il occupera la charge de cellérier-intendant (économe) de cette abbaye jusqu’à sa mort en 1715. Oenologue de génie, il met au point ici même, la méthode de champagnisation du vin. C’est grâce à ses observations et à ses expérimentations que l’on doit le vin saute bouchon que le monde entier tente de copier ; des innovations qui révolutionnent toutes les techniques de l’époque. Il repose dans le cœur de l’église abbatiale Saint-Sindulphe de Hautvillers, face au choeur sous une dalle en marbre avec cette inscription : Ci-gît Dom Pérignon, pendant quarante-sept ans cellérier dans ce monastère, son administration des affaires familières lui mérita les plus grands éloges, recommandable par ses vertus et plein d’amour paternel pour les pauvres. Il s’en fut dans sa soixante-dix septième année, l’année 1715. Qu’il repose en paix, Amen.
L’abbaye (mais pas l’abbatiale) est aujourd’hui propriété privée des Champagne Moët & Chandon (Groupe LVMH). Pour l’anecdote, la maison (Moët) fut fondée par Claude Moët qui, dit-on, aurait été l’ami de Dom Pérignon. Un bel hommage lui a été rendu avec la cuvée Dom Pérignon connue dans le monde entier.
Catégories de Champagne, 7 grandes familles
Sous l’appellation Champagne blanc et rosé existent 7 catégories dont la mention figure sur l’étiquette.
- Champagne Brut sans année (ou BSA). Les champagnes sont rarement millésimés, aussi les champagnes BSA représentent-ils plus des deux tiers de la production champenoise. Ils sont le fruit d’un assemblage de vins de plusieurs années et de plusieurs crus. Ils sont la signature de la maison. Chaque année, le chef de cave cherche à reproduire le même style avec des vins différents. Aucun intérêt à les garder en cave.
- Champagne Millésimé : vin effervescent blanc et rosé
- Champagne Cuvée Spéciale de Prestige : vin effervescent blanc et rosé
- Champagne Blanc de Blancs : vin effervescent blanc. Un champagne Blanc de Blancs est un champagne élaboré uniquement à base de jus blanc issu de raisins à peau blanche, donc de chardonnay. Pourquoi un « s » à « blanc de blancs » ? Parce que d’autres cépages blancs à jus blanc autorisés mais, moins connus peuvent entrer dans certaines cuvées (le pinot blanc ou l’arbane par exemple).
- Champagne Blanc de Noirs : vin effervescent blanc. Un champagne Blanc de Noirs est un champagne, blanc d’apparence qui est élaboré à partir de cépages rouges tels que le pinot noir et le pinot meunier, soit ensemble, soit individuellement.
- Champagne Rosé : vin effervescent rosé. Les deux façons d’élaborer un champagne rosé. 1/Le rosé d’assemblage. L’appellation champenoise est la seule autorisée à produire du champagne rosé de cette façon. Avant la champagnisation, on assemble au vin blanc, un vin rouge de pinot noir (AOC Coteaux Champenois) pour lui donner la couleur rosée. 2/Le rosé de saignée, qui consiste à extraire le jus des raisins, et le faire macérer avec des peaux de raisins noirs (pinot meunier ou pinot noir) pendant quelques jours pour atteindre la couleur rosée désirée. Cette méthode demande un grand savoir-faire.
- Champagne méthode « Solera ». Méthode qui commence à se répandre en Champagne : la Solera appelée aussi réserve perpétuelle est un système d’élevage de vin empruntée à l’Andalousie. Si le champagne est élaboré à partir d’une année principale, à laquelle on ajoute des vins de réserve (ou d’une seule année dans le cas d’un millésime), la Solera est par contre constituée des vins d’une première vendange qui se voit rafraîchir tous les ans par des vins de la nouvelle vendange (on empile ainsi les années d’où le nom réserve perpétuelle).
Les cépages du Champagne, ceux d’aujourd’hui, ceux d’hier et ceux de demain
Les cépages d’aujourd’hui. Depuis 1927, sept cépages sont autorisés en Champagne : pinot noir, meunier, chardonnay, arbane, petit meslier, pinot blanc et pinot gris. Et pourtant, 3 cépages écrasent tous les autres.
- Pinot noir : 38,3%
- Chardonnay : 30,4 %
- Meunier : 31 %
- Les autres* : 0,3 % (pinot blanc, arbane, petit meslier, pinot gris). Et ceux d’autrefois : morillon, pinot aigret, fromenteau et le gouais, que sont-ils devenus ?
* Autorisés sans doute mais pas en plantation nouvelle, que sur des droits d’arrachage ! Le CIVC (Comité Interprofessionnel des Vins de Champagne) veille au grain.
A chacun son terroir
- Le pinot noir (38 % du vignoble) se satisfait de terrains calcaires et frais. C’est le cépage dominant de la Montagne de Reims et de la Côte des Bar ; un cépage qui offre des arômes de fruits rouges et une structure marquée. Il apporte à l’assemblage du corps et de la puissance.
- Le meunier (31 % du vignoble), cépage vigoureux qui convient plus particulièrement aux terroirs plus argileux, comme ceux de la vallée de la Marne. Il s’accommode mieux de conditions climatiques plus difficiles. Le meunier donne des vins souples et fruités qui évoluent un peu plus rapidement dans le temps et apportent à l’assemblage de la rondeur.
- Le chardonnay (31 % du vignoble). Voici le cépage de prédilection de la Côte des blancs qui se caractérise par des arômes délicats, des notes florales, d’agrumes parfois minérales. A évolution lente, c’est le cépage idéal pour le vieillissement des vins. Seul, il sert à élaborer le Blanc de Blancs.
Ces cépages d’autrefois, boutés hors de l’appellation. Le genre Vitis remonte à plus de 60 millions d’années (au début de l’ère tertiaire). Cette vigne primitive se cantonnait alors à l’hémisphère nord et donc en Champagne. Une feuille de vigne fossilisée datant du paléocène (-60 millions d’années) a d’ailleurs été trouvée dans la région de Sézanne. Il faut attendre les Romains entre le IIe et le Ille siècle de notre ère pour que la vigne soit cultivée en Champagne. Les premiers documents ampélographiques sur la Champagne remontent au XVIe siècle. La Maison Rustique (encyclopédie d’agriculture pratique publiée au XIXe siècle) cite parmi les meilleurs plants le morillon, le pinot aigret, le fromenteau ou pinot gris et le gouais. Le meunier, le pinot gris et le pinot blanc sont apparus à la faveur de mutations du pinot noir. Le petit meslier est issu d’un croisement entre le gouais et le savagnin. Enfin l’arbane est un cépage dont l’origine reste à ce jour un mystère. Les cépages champenois sont donc pour la plupart des variétés anciennes, auxquelles vient s’ajouter le chardonnay, plus récent puisqu’il remonterait à moins de 150 ans.
Les cépages de demain. Un programme de création variétale « régional » a été lancé avec pour objectif la mise au point de nouvelles variétés de vignes résistantes aux maladies fongiques permettant de conserver la typicité des vins champenois. Ce programme a démarré en 2014 avec une première série de croisements (hybridation) entre le chardonnay et une variété résistante. Les pépins issus de ce croisement donneront chacun une nouvelle variété qu’il faudra évaluer durant de longues années. Il faudra compter 15 à 20 ans avant la fin de ce programme et l’inscription de ces nouvelles variétés
Face au recours systématique de produits phytosanitaires, quelles solutions alternatives ? Dès les années 2000, l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) s’engageait dans un programme de création variétale innovant. L’ambition fut de favoriser le développement d’une viticulture durable, plus respectueuse de l’environnement ? Un but, la création de nouvelles variétés offrant une résistance efficace et durable avec de bonnes aptitudes culturales et une bonne qualité organoleptique des futurs vins. La Champagne s’est associée au programme en évaluant in situ des variétés candidates à l’inscription au Catalogue français. Comme stratégie, les croisements. Ils permirent d’associer deux gènes de résistance au mildiou et deux gènes de résistance à l’oïdium provenant d’une part, de l’espèce Vitis rotundifolia et, d’autre part, d’un groupe d’espèces où domine Vitis rupestris. Les nouvelles variétés se sont dotées ainsi de résistances polygéniques, ce qui permet de conforter leur potentiel de durabilité. Résultat : l’inscription de quatre nouvelles variétés* : voltis, floréal (variétés blanches), artaban et vidoc (cépages rouges).
*Variétés évaluées sur un certain nombre de critères phénologiques, comportement agronomique, composantes du rendement, qualité du vin sans pourtant être sélectionnées pour répondre à un type de vin en particulier.
Qu’attendre des nouvelles variétés : voltis, floreal, artaban, vidoc ? Ces quatre variétés présentent une résistance totale à l’oïdium et élevée au mildiou. Elles nécessitent un nombre réduit de traitements fongicides complémentaires. Ainsi, les économies peuvent aller entre 80 % et 90 %. La précocité des nouvelles variétés convient pour de nombreuses régions viticoles françaises dont la Champagne. Il en est de même pour la productivité, qui s’échelonne entre celles du chardonnay et du grenache. La qualité organoleptique des vins produits est jugée comparable aux cépages témoins, avec des profils bien tranchés entre artaban et vidoc (vin rouge) et entre floreal et voltis (vin blanc).
OGM ou pas OGM ? De nouveaux cépages oui mais sont-ils à classer dans les OGM ? Une plante est dite « génétiquement modifiée » lorsqu’on a introduit dans son génome un ou plusieurs gènes qui lui sont étrangers et ceci de façon artificielle (technologie de génie génétique). A l’opposé, l’hybridation exploite le mécanisme naturel de reproduction des plantes avec le brassage génétique qui l’accompagne. Le tri du caractère recherché se fait sur la descendance du croisement. Donc, ce n’est pas OGM.
Ces nouveaux cépages vont-ils modifiés la typicité des vins de Champagne ? Les phases d’expérimentation prévoient des dégustations à plusieurs stades de vinification et sur plusieurs années. Chaque nouvelle variété est comparée à une variété existant en Champagne, comme le chardonnay par exemple. Ce sera aux professionnels champenois de décider si une variété est typique ou pas et si elle mérite ou pas de faire partie de l’encépagement. Si c’est bien le cas, son inscription au cahier des charges de l’appellation Champagne sera demandée à l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO). La conclusion revient à Michel Drappier et à son fils Hugo (Champagne Drappier à Urville en Côte des Bar) : c’est l’avenir de notre profession. On va inventer de nouveaux cépages qui vont faire les champagnes des années 2030, 2040, 2050 et au-delà.
Champagne de Vignerons, le SGV (Syndicat Général des Vignerons de la Champagne)
La bannière collective Champagne de Vignerons a été créée en 2001 par le Syndicat Général des Vignerons de la Champagne (SGV) afin de développer la notoriété des champagnes élaborés au vignoble. Elle regroupe aujourd’hui plus de 4000 vignerons et coopératives de Champagne répartis dans les 319 villages de l’AOC Champagne. Point essentiel, ils commercialisent leurs propres champagnes. Et c’est la seule bannière collective portée par un syndicat viticole, le (SGV) qui rassemble environ 20 000 viticulteurs.
Les vignerons sous la bannière collective Champagne de Vignerons, garantissent :
- 1/ des champagnes issus d’exploitations familiales ;
- 2/ des vignes cultivées par les vignerons eux-mêmes. Ils assurent la vinification sur leur propre domaine ou au sein d’unions de vignerons.
Ces vignerons faisant partie de la famille Champagne de Vignerons
Le SGV (Syndicat Général des Vignerons de la Champagne). Créé en 1919, le SGV regroupe 99 % des vignerons champenois, soit près de 20 000 adhérents. Ce sont des adhérents déclarants de récolte, vendeurs au kilo, récoltants-manipulants et récoltants-coopérateurs. Le SGV Champagne est une organisation professionnelle, ses instances sont composées de viticulteurs élus par les représentants des villages viticoles. Afin de construire une image et de valoriser les vins élaborés au vignoble, le Syndicat engage, depuis quelques années, des actions de promotion via la bannière collective Champagne de Vignerons derrière laquelle se sont regroupés quelque 4 300 vignerons et unions de vignerons
Co-gestionnaire de la filière « Champagne ». Le SGV est également avec l’Union des Maisons de Champagne (UMC), au sein du Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC), Co-gestionnaire de la filière « Champagne. Il est en effet de tradition, en Champagne, de se concerter pour toute décision relative aux intérêts communs des vignerons et des négociants. Que ce soit en matière d’organisation de la filière, d’économie, de communication collective, de technique ou encore d’environnement, un grand nombre de décisions sont ainsi prises de manière paritaire par l’interprofession champenoise
Chef de caves en Champagne, son rôle, son profil
S’il devait y avoir une aristocratie en Champagne, nul doute que les chefs de caves en seraient les princes. Mais l’apprentissage est long et méthodique. La plupart ont débuté comme second à ce poste. Par ce statut, ils acquièrent presque naturellement cette prestance qui fait d’eux, les ambassadeurs de la marque. Un chef de caves (beaucoup d’hommes mais de plus en plus de femmes) est le personnage clé d’un établissement de Champagne. Il est le garant du style de la Maison. Il est le détenteur de sa mémoire (du goût) qu’il transmet. Ainsi quand un chef de caves s’en va, la mémoire demeure. Il doit aussi incarner les valeurs de cette Maison. Voyez son programme. Il est partout : à la vigne, à la cuverie, dans son laboratoire, devant les distributeurs de la marque, devant les media.
Il est « le faiseur » de champagne. Son rôle couvre la quasi-totalité du processus champagne : contrôle des vignes, vendanges, assemblage, vinification, dégustations permanentes durant l’élevage (avec tenue de carnets de dégustation), gestion des stocks de vins de réserve, choix œnologiques, création de nouvelles cuvées, commercialisation jusqu’à la communication. Rien ne doit lui échapper. S’il est aussi un faiseur de millésime, ne pas oublier que près de 90 % des champagnes sont des Bruts sans année. Heureux, le chef de cave de Dom Pérignon qui ne concocte que le goût d’un millésime. C’est l’âme et la raison d’être de cette très grande marque. Richard Geoffroy (féru de philosophie zen, diplômé de médecine), son mythique chef de cave jusqu’en 2019, en a façonné 15 depuis 1990. Son successeur n’est autre que son plus proche collaborateur, Vincent Chaperon. Depuis qu’il a commencé à épauler Richard Geoffroy en 2005, Vincent Chaperon a participé à treize vendanges et déclaré quatre millésimes à ses côtés (2005, 2006, 2009 et, plus récemment, 2008).
D’abord les Bruts sans année (BSA) avant de s’attaquer aux cuvées de prestige. Les millésimes étant l’exception, au chef de caves d’élaborer avec son équipe, des vins qui doivent se ressembler d’une année à l’autre et cela malgré les aléas du climat et de la vigne, tout en se différenciant évidemment des autres maisons. Il va donc composer avec les crus et les cépages (chardonnay, pinot noir et meunier) de la vendange de l’année tout en ajustant son assemblage avec l’apport des vins de réserve. Le défi serait immense pour n’importe quel néophyte. Comment, quelques mois après les vendanges se projeter dans l’avenir alors que les vins tranquilles n’en sont qu’à leur première fermentation alcoolique et qu’il faut anticiper les résultats de la deuxième fermentation et du vieillissement en cave. Quand on assemble les cuvées, on doit se projeter de plusieurs années pour imaginer l’évolution du vin. Parfois, dans notre dosage, 1 % d’un certain cru ou d’une certaine année peut faire la différence pour trouver le bon équilibre précisait François Domi ancien chef de cave chez Billecart-Salmon à Mareuil-sur-Aÿ. Après 33 ans passés à la Maison Billecart-Salmon, il a transmis le relai à Florent Nys, le nouveau chef de cave qui fut son second depuis 2005.
Un calendrier qui semble être un perpétuel recommencement. Dès décembre, dégustations de pré-assemblage. Il faut au chef de caves mémoriser, tous les crus selon les années, les cépages et les terroirs (lieux-dits) ou parcelles. C’est un travail de dégustation de deux heures quotidiennes à partir de plusieurs dizaines d’échantillons ; étape très importante qui précède l’assemblage. Il commence en janvier. C’est presque de l’alchimie puisqu’à partir d’échantillons prélevés en cuverie, il faut, éprouvettes et pipettes en mains, marier plusieurs dizaines de vins et quelques fois jusqu’à 50 vins clairs différents pour reproduire la bonne formule. Le but en effet est de trouver l’harmonie parfaite, c’est-à-dire l’assemblage de divers crus, et parfois de différentes années ; et cela pour élaborer chaque cuvée dans l’esprit et l’identité de la maison. Quand tout est validé, le chef de caves va alors donner l’ordre de passer à l’assemblage grandeur nature. Il s’effectue dans d’énormes cuves équipées de mélangeurs qui assurent la parfaite homogénéité souhaitable.
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Aujourd’hui, un chef de caves, œnologue et communicant. Le « nouveau » chef de caves est arrivé il y a une bonne dizaine d’années. Oui il continue de faire les assemblages, de mémoriser ses cuves, c’est bien sûr la base du métier. Mais à partir de là, la fonction diverge. Certains se concentrent davantage sur le vignoble, (n’est-il pas est le socle de la qualité des vins ?). Ceux-là sont plutôt dans la discrétion. Ils assurent souvent la direction des vignes. D’autres se tournent vers la communication. Leur expérience, ils l’ont acquise en Californie, en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Argentine… Diplômés en œnologie, ils ont fait agro, une école de commerce, HEC… Leurs premières armes se sont faites dans des coopératives ou au sein de bonnes maisons champenoise. Ils sont polyglottes, ils portent la bonne parole partout dans le monde où la marque est présente. Combien sont-ils à tenir la dragée haute dans ce microcosme champenois où tout le monde se connaît. A les recenser, ils seraient une bonne quarantaine, véritables stars du champagne. Pour les débaucher, dirions-nous qu’il existe une sorte de mercato entre les grandes maisons ! Mais modérons le propos, chez Veuve Clicquot, depuis la fondation de la Maison en 1772, seulement onze chefs de cave se sont succédé. Didier Mariotti est le 11e (depuis 2019). Autre exemple, depuis quatre générations, la famille Jaeger, chefs de caves de père en fils, veille sur le style du Champagne Alfred Gratien. Aujourd’hui, c’est au tour de Nicolas Jaeger.
L’AACCCC. Il existe une Association Amicale des Chefs de Caves de Champagne (AACCC) qui regroupe plus de 70 membres. Elle est à l’écoute des nouvelles technologies et à tout ce qui touche aux nouvelles réglementations administratives. Ses membres participent aux dégustations des vins clairs de l’année, des assemblages et des millésimes en cours de commercialisation (agréments officiels INAO et suivi aval de la qualité CIVC. Après Hervé Deschamps (Perrier Jouët) qui en assurait la présidence depuis 1999, c’est au tour de Laurent Fresnet depuis 2019, (ex Henriot, maintenant chez Mumm) de prendre le relai.
Liste des chefs de caves en activité (par ordre alphabétique)
(La plupart sont membres de l’Association Amicale des Chefs de Caves)
- Sébastien BARBIER : Champagne H. Blin
- Xavier BERDIN : Champagne Palmer
- Christophe BONNEFOND : Champagne Mercier
- Odilon de Varine : Champagne Gosset
- Cyril BRUN : Champagne Charles Heidsieck
- Damien CAMBRES : Champagne Pol Roger
- Vincent CHAPERON : Dom Pérignon
- Bruno CHARLEMAGNE : Champagne Bauchet
- Sylvie COLAS : CIVC
- Jérôme CORBON : Champagne La Ruche
- Hervé DANTAN : Champagne Lanson
- Michel DAVESNE : Champagne Deutz
- Philippe DESLESCOT : Champagne Edouard Brun
- Hervé DESCHAMPS (ancien chef de caves) : Champagne Perrier-Jouët
- Arnaud DESCÔTES : CIVC
- Gilles DESCÔTES : Champagne Bollinger
- Cyrille DINIZ : Champagne Lallier
- Philippe DUPUIS : Covama
- Laurent ETIENNE : Champagne Esterlin
- Floriane EZNACK : Champagne Jacquart
- Michel FAUCONNET : Champagne Laurent-Perrier
- Laurent Fédou : Champagne Canard-Duchêne
- Emmanuel FOURNY : Champagne Veuve Fourny
- Séverine FRERSON-GOMEZ : Champagne Perrier-Jouët
- Alice TÉTIENNE : Champagne Henriot
- Arnaud GALLOIS : Champagne La Vigneronne
- Thierry GARNIER : Champagne Philipponnat
- Benoît GOUEZ : Champagne Moët & Chandon
- Laurent GUYOT : Champagne Bruno Paillard
- Hervé DANTAN : Champagne Lanson
- Cédric JACOPIN : Union Champagne
- Nicolas JAEGER : Champagne Alfred Gratien
- Gilles DESCÔTES : Champagne Bollinger
- Caroline LATRIVE : Champagne Ayala
- Jean Baptiste LECAILLON : Champagne Louis Roederer
- Julie Cavil : Champagne Krug
- Sébastien LAPIERRE : Champagne Vincent d’Astrée
- Sébastien LE GOLVET : Champagne Henri Giraud
- Charlotte ESCHBACH : Champagne J. de Telmont
- Sandrine LOGETTE-JARDIN : Champagne Duval-Leroy
- Didier Mariotti : Champagne Veuve Clicquot
- Sébastien MONTCUIT : Champagne Mailly Grand Cru
- Franck NICAISE (ancien chef de caves) : Champagne Abelé
- Florent NYS : Champagne Billecart Salmon
- Yanick OLIVIER : Les Viticulteurs d’Avize
- Michel PARISOT : Union Auboise
- Alain PAILLEY : Champagne Alexandre Bonnet
- Frédéric PANAÏOTIS : Champagne Ruinart
- Dominique PICHART : Champagne Vranken-Pommery
- Clément PIERLOT (et Directeur Général Vignobles) : Champagne Vranken-Pommery
- Alexandre PONNAVOY : Champagne Taittinger
- Guillaume ROFFIAEN : Champagne Nicolas Feuillatte
- Elisabeth SARCELET : Champagne de Castelnau
- Isabelle TELLIER : Champagne Chanoine
- Philippe THIEFFRY : Champagne Veuve Clicquot
- Franck THOMAS : Fleury la Rivière
- Edouard TISSIER : Champagne Mont-Hauban
- Nicolas Uriel : Champagne Thiénot
- Laurent VAILLANT : Champagne Lombard & Médot
- Odilon de VARINE : Champagne Gosset
- Sébastien WALASIAK : Champagne Collet
Chiffres clés du champagne en 2021
Le champagne est sans conteste le vin le plus célèbre du monde. Son vignoble le plus septentrional de France occupe 34 298 ha (4,5 % du vignoble français) sur 5 départements :
- Marne : 22 764 ha
- Aube et Haute-Marne : 8106 ha
- Aisne et Seine-et- Marne : 3428 ha
Les chiffres de l’appellation Champagne : La Champagne avec 319 crus compte 281 801 parcelles d’une superficie moyenne de 12,15 ares. 3 cépages sont dominants :
- Le pinot noir : 38 % (13 129 ha)
- Le meunier : 31 % (10 483)
- Le chardonnay : 31 % (10 556 ha)
- Autres (arbane, petit meslier, pinot blanc, pinot gris) : 1 % (130 ha)
Âge des vignes
- 2746 ha (8 %) <10 ans
- 5595 ha (17 %) de 10 à 20 ans
- 5569 ha (16 %) de 20 à 30 ans
- 10 040 ha (29 %) de 30 à 40 ans
- 10 348 ha (30 %) >40 ans
La Champagne recense 16 129 vignerons dont 3752 RM-RC : Récoltants Manipulants : 1658 et Récoltants Coopérateurs : 2094. On dénombre 128 Coopératives (dont 41 commercialisent du champagne). Elles comptent 1000 salariés et fédèrent 14 000 vignerons adhérents. De plus, la Champagne recense 382 négociants. En superficie des exploitations la moyenne est de 2,1 ha :
- <1 ha : 9305
- 1-3 ha : 3248
- 3-7 ha : 2652
- 7-10 ha : 592
- >10 ha : 386
Âge des exploitants. 48 % sont en fermage, 17 % en métayage nature, 18 % en métayage espèce et seulement 17 % en propriété
- -25 ans : 281
- 25-35 ans : 1036
- 35-50 ans : 3094
- 50-60 ans : 2971
- +60 ans : 4189
(le fermage et le métayage sont des baux ruraux, dans lesquels un propriétaire, le bailleur, confie à un exploitant, le preneur, le soin de cultiver une terre. Dans le cadre du fermage, le preneur verse une somme fixe prédéfinie au bailleur. Dans le cadre du métayage, le preneur verse une quote-part de la récolte (le tiers, le quart) soit sous forme de raisins (métayage nature) soit en argent (métayage espèces).
Les rendements 2021
10 000 kg/ha rendement AOC 2021 (dispositif de réserve interprofessionnelle qui permet d’approcher le rendement en appellation).
6500 kg/ha rendement agronomique moyen 2021
Evolution des marchés de 2010 à 2021. Passant de 320 en 2010 à 297 millions de bouteilles en 2019, les expéditions de Champagne en volume depuis 2010 tendaient à décliner légèrement tandis que leur valorisation progressait nettement. Cette évolution est liée à la demande des consommateurs pour les cuvées spéciales, millésimes, rosés…
Les conséquences du Covid ont cassé ces tendances. Les ventes à fin 2020 retrouvaient avec 244 millions de bouteilles, des niveaux oubliés depuis 25 ans (247 millions en 1995). Malgré une année 2020 compliquée, les prévisions pour 2021 sont très bonnes, avec une projection à 305 millions de bouteilles expédiées et un chiffre d’affaires de 5 milliards d’€.Tout opérateur confondu (vignoble + négoce), les volumes ont considérablement augmentés :
- +41,3 % par rapport à 2020
- +5,6 %par rapport à 2019
Expéditions par marché de janvier à août 2021. Par rapport à 2020, on enregistre une progression de +24,7 % en volume en France et + 55 % à l’export.
Répartition des expéditions en volume par zone géographique.
- Vers la France : 55 %des expéditions par le négoce et 45 % par le vignoble
- Vers l’Union Européenne : 85 % par le négoce et 15 %par le vignoble
- Vers les autres pays : 90 % par le négoce et 10 % par le vignoble
Classement du champagne en trois catégories
Le vignoble champenois est classé en 3 catégories. Il comprend 320 villages sachant que chaque village est considéré comme un cru.
Première catégorie : 17 villages classés Grands Crus. Ces 17 villages sont tous situés dans le département de la Marne. Seuls les propriétaires ayant la totalité de leurs vignes dans un ou plusieurs villages grands crus peuvent mentionner Grand Cru sur l’étiquette de leurs bouteilles. Ce classement est fondé sur des critères de sous-sols, de pente et d’exposition. : Ambonnay, Avize, Aÿ, Beaumont-sur-Vesle, Bouzy, Chouilly, Cramant, Louvois, Mailly-Champagne, Le Mesnil-sur-Oger, Oger, Oiry, Puisieulx, Sillery, Tours-sur-Marne, Verzenay, Verzy.
Deuxième catégorie : 44 villages classés Premiers Crus : Avenay, Bergères-les-Vertus, Bezannes, Billy-le-Grand, Bisseuil, Chamery, Champillon, Chigny-les-Roses, Chouilly (pinot noir), Coligny (chardonnay), Cormontreuil, Coulommes-la-Montagne, Cuis, Cumières, Dizy, Ecueil, Etrechy (chardonnay), Grauves, Hautvillers, Jouy-les-Reims, Les Mesneux, Ludes, Mareuil-sur-Aÿ, Montbré, Mutigny, Pargny-les-Reims, Pierry, Rilly-la-Montagne, Sacy, Sermiers, Taissy, Tauxières, Tours-sur-Marne (chardonnay), Trépail, Trois-Puits, Vaudemanges, Vertus, Ville-dommange, Villeneuve-Renneville, Villers-Allerand, Villers-aux-Noeuds, Villers-Marmery, Voipreux, Vrigny.
Troisième catégorie. Elle regroupe tous les autres, les 255 villages restants sur 25 000 ha. Ils ont droit à l’appellation Seconds Crus qui est très peu utilisée.
Le climat et la Champagne. Les défis du réchauffement climatique
Le vignoble de Champagne est le plus septentrional de France, jouissant d’un climat continental. Et, paradoxalement, c’est la partie la plus au nord du vignoble qui produit les meilleurs raisins, malgré les durs vents d’hiver, venus en droite ligne de l’Atlantique sans rencontrer d’obstacles majeurs. La température annuelle moyenne ne dépasse jamais 10° C, et les gelées peuvent atteindre -30° C, comme ce fut le cas en 1985. Cependant, les nombreux vallonnements, les forêts et les cours d’eau stabilisent les températures et maintiennent une certaine humidité. Les redoutables gelées de printemps frappent surtout les vallées et les dépressions. C’est pourquoi les vignes sont plantées à mi-côte, et orientées vers le sud ou le sud-est, à deux exceptions près : Verzenay face au nord et la Côte des Blancs face à l’est.
Augmentation climatique en Champagne, 1 degré en 25 ans. Que du bonheur mais au-delà ! En 2020, commencée le 17 août dans les secteurs les plus hâtifs, les vendanges furent les plus précoces de l’histoire de la Champagne. Alors que l’an passé, le record de température avait été battu (42,9°C), cette année, c’est le mois de juillet le plus sec de l’histoire qui a été enregistré. En 25 ans, la Champagne a vu sa température moyenne augmenter de 1,2° avec comme conséquences, un risque de gelée dû à un débourrement trop précoce et des vendanges avancée de 13 jours*. Autres points liés au réchauffement, on constate une teneur en sucre de plus de 8 %, une baisse d’1 g du taux d’acidité et une augmentation de 50 % du poids des grappes de raisin passant de 97 à 140 g. Pour corollaire positive, la viticulture champenoise utilise aujourd’hui moitié moins d’engrais. Donc, plus de rendement et des raisins de meilleure qualité. Cependant si l’augmentation de la teneur en sucres permet de limiter la liqueur de dosage, on note depuis une vingtaine d’années, une diminution de l’acidité, gage essentiel de fraîcheur pour le Champagne. Afin de contrer cette perte d’acidité, certaines maisons ont d’ores et déjà fait l’impasse (et cela au détriment de la complexité aromatique) sur la fermentation malolactique.
* Depuis 2000, 7 vendanges ont démarré au mois d’août (2003, 2007, 2011, 2017, 2018, 2019, 2020).
Gain de sucre, perte d’acidité et propagation de maladies de la vigne. Si en Champagne, l’oïdium se montrait très discret, on le voit réapparaitre depuis une bonne dizaine d’année. Le CIVC (Comité interprofessionnel des vins de Champagne) constate également l’apparition de nouveaux virus et champignons pathogènes comme le black rot, ou encore l’eudémis (un ravageur de la grappe). Il a également tout mis en œuvre pour lutter contre la flavescence dorée et travaille aussi pour mettre au point des cépages offrant une plus grande résistance aux maladies. Toutes ces recherches se font à partir de trois vignobles expérimentaux gérés par le Comité Champagne : Plumecoq, Gionges et Essoyes. Concrètement on assiste à de nouvelles pratiques culturales pour lutter contre le réchauffement climatique comme des haies arbustives, l’enherbement des rangs de vigne pour réduire l’érosion, de nouveaux systèmes de taille, une réduction de l’effeuillage pour protéger les raisins du soleil, plus d’espace donné aux plants de vigne, etc.
Domaine expérimental de Plumecoq : comment faire du champagne dans un climat méridional ? Le domaine expérimental de Plumecoq à Chouilly près d’Epernay (l’un des 3 sites expérimentaux du CIVC) couvre 10 ha. C’est en quelque sorte un laboratoire en plein air qui mène des recherches grandeur nature afin de continuer à faire du bon champagne malgré le réchauffement climatique. A côté de la conservation de 350 ceps anciens pour assurer la biodiversité historique du vignoble champenois, Plumecoq travaille sur la création de nouvelles variétés. Elles devraient être capables de s’accommoder d’un climat proche de celui de Montpellier aujourd’hui. Arnaud Descotes qui est directeur des services techniques du Comité Champagne explore des scénarios de rupture (chaleur, sécheresse, précocité) permettant de conserver la typicité du champagne dans l’hypothèse d’un climat méridional et d’une augmentation de +2° à l’horizon 2050.
Clos, les grands et petits clos en Champagne
Les grands clos en Champagne se comptent sur les doigts d’une main. En Bourgogne, le Clos est une parcelle de vigne entourée d’un mur de pierres sèches avec deux entrées, l’une pour les voitures à cheval et l’autre pour le vigneron (voir Clos de Vougeot, Clos de Tart, Clos Saint-Denis… pour les plus connus en Côte de Nuits). En Champagne, à l’instar de la Bourgogne, quelques grandes maisons, et une poignée de petits et moyens propriétaires ont la chance d’entretenir ces fameux clos (donnant leur nom à une cuvée spécifique), facteur considérable de prestige pour leurs maisons.
En Champagne, 11 clos « historiques ». Soyons concrets, un Clos selon le décret du 19 août 1921, est un endroit ceint de murs ou d’une haie qu’un cavalier ne peut franchir avec sa monture. Le vin qui y est produit porte le nom du clos. Il doit provenir exclusivement des raisins de ce clos sans pour autant que ceux-ci soient tous utilisés pour cette cuvée. Faut-il ajouter bien souvent l’exposition exceptionnelle de ces parcelles, leur nature géologique et l’extrême soin qu’apportent leurs propriétaires à leur entretien. La Champagne recense aujourd’hui 11 clos historiquement bien identifiés et une vingtaine d’autres en voie de s’imposer (voir la liste plus bas).
Leur rareté en fait la valeur. Si comme en Bourgogne, jusqu’au XVIIIe siècle, beaucoup de vignes, propriétés essentiellement des moines, étaient ceintes de murs, beaucoup furent abattus au moment de la Révolution française et des lois de succession (le code Napoléon) entrainant l’éclatement du foncier. Ajoutez-y quelques guerres, la crise du phylloxéra pour qu’il ne subsiste aujourd’hui que le souvenir de quelques clos perdus dans les 35 000 ha du vignoble champenois. Depuis une bonne vingtaine d’années, cette notion de clos a été redécouverte au point de hausser les crus qui y sont produits au rang de mythe ; leur rareté en faisant la valeur avec des prix souvent stratosphériques. Ainsi, pour le plus emblématique d’entre eux, le fameux Clos du Mesnil de Krug (1,85 ha), le prix moyen atteint par son dernier millésime Blanc de Blancs 2006 tourne autour de 1030 €
Les 11 clos historiques du Champagne
- Clos des Goisses : 5,5 ha (Philipponnat)
- Clos du Mesnil : 1,85 ha (Krug)
- Clos d’Ambonnay : 0,685 ha (Krug)
- Clos Cazals : 3,7 ha (Cazals)
- Clos des Bouveries : 3,53 ha (Duval Leroy)
- Clos du Moulin : 2,20 ha (Cattier) : réunion de deux anciens clos, le Clos Allart et le Clos du Moulin
- Clos des Faubourgs de Notre Dame : 25 ares (Veuve Fourny)
- Le petit clos : 8,48 ares (Jean Vesselle)
- Clos Saint-Hilaire : 94 ares (Billecart Salmon)
- Clos des Bergeronneau : 2,1 ha (Champagne Florent Bergeronneau-Marion)
- Clos Virgile : 20 ares (Champagne Portier)
Les autres clos du Champagne
- Les Vieilles Vignes Françaises : 0,45 ha (Bollinger)
- Clos d’Ambonnay : 0,68 ha (Krug)
- Clos Pompadour : sélection d’un même vignoble de 20 ha (Pommery)
- Clos du Château de Bligny
- Clos des Trois Clochers : 0,45 ha (Leclerc-Briant), premier millésime 2018
- Clos Rocher : 0,63 ha (Grémillet) planté en 2012
- Clos Lanson (vignoble intra muros à Reims)
- Clos Mandois : 1,5 ha (Mandois)
- Clos des Chaulins : 0,68 ha (Médot)
- Clos Jacquin (Champagne Pierre Callot et Fils)
- Clos Sainte-Sophie : 1,20 ha (Lassaigne)
- Clos des Monnaies : 1 ha (deux propriétaires : Goutorbe-Bouillot et Eric Lemaire).
- Clos des Belvals : 1,20 ha (Person)
- Clos de Cumières : 49 ares (Hervé Jestin), premier millésime 2012 sortie en 2017
Concurrence. La notoriété du champagne serait-elle vraiment menacée ?
Les bulles sont aujourd’hui devenues un phénomène mondial. Ecartons ce que les marketeurs appellent value-priced bubbles from around the world (bulles à prix abordables à travers le monde) fruits d’une production de masse selon la méthode Charmat ou plus économique encore, par injection d’anhydride carbonique (dioxyde de carbone ou CO2). Le champagne ne joue pas dans ces catégories-là.
Alors qui pour concurrencer le champagne ? Le champagne a en fait deux challengers. D’abord, ceux qui le suivent en appliquant la méthode champenoise (qu’on appelle hors champagne, méthode traditionnelle), c’est-à-dire en France, les crémants. La différence ? Le coût du raisin bien plus élevé en Champagne et surtout un temps d’élevage plus long. S’il est généralement compris entre 9 et 12 mois pour un Crémant, le cahier des charges de la Champagne nécessite un élevage minimum de 12 mois. Comme pour les autres pétillants, Vouvray, Montlouis, Limoux, etc. , les crémants ont le vent en poupe mais se sont des outsiders. La menace viendrait plutôt des copies conformes au champagne mais dépaysées dans de nombreuses régions du monde (Angleterre, Californie, Australie, Indes…). On pense à ces excellents sparkling wines produits dans des conditions géologiques et climatiques souvent proches. La plupart respecte à la lettre, les règles de base du champagne (mêmes cépages, mêmes assemblages, même méthode d‘élaboration, mêmes mentions sur les étiquettes… jusqu’aux prix souvent élevés). Sont-ils vraiment des concurrents sachant que la plupart émane des grandes maisons champenoises (voir plus bas). Alors, ne resterait-il que l’enfant chéri de la viticulture italienne, le prosecco ? Le prosecco, bien sûr qu’on savoure l’été en sirotant un Spritz*…
*Spritz et prosecco, le cocktail gagnant! C’est la nouvelle star de l’apéro qui a envahi les terrasses du monde entier. Ce célèbre cocktail d’origine autrichienne, le spritz est un mélange de prosecco d’Apérol (ou Campari) et d’eau gazeuse. Son origine remonte au XIXe siècle, lorsque les Autrichiens ont envahi Venise. Pour eux, le vin local était trop fort. Ils décidèrent de l’adoucir avec de l’eau gazeuse. C’est au XXe siècle que la recette a évolué avec l’apparition du prosecco et de l’Apérol. Le spritz est aujourd’hui très populaire à Venise et dans le monde apportant au prosecco une réputation mondiale.
Le prosecco serait-il le vrai rival ? Le Prosecco est devenu un sérieux concurrent du Champagne mais en entrée de gamme. Il se présente comme une alternative moins coûteuse que le Champagne. On aime à dire que pour boire du champagne, il faut être en smoking. Le prosecco est plus décontracté. Aux champenois de démontrer que le champagne se boit aussi en décontracté ! Chaque victoire, chaque succès, chaque grand événement de la vie se fêtent au champagne. Laissons au prosecco l’heure de l’apéritif ! Il est aujourd’hui le vin italien le plus exporté et ses ventes à l’étranger ont augmenté de 21 % en 2019. Sur les 464 millions de bouteilles de prosecco écoulées en 2019 (300 millions pour le champagne), les 2/3 ont été exportée dans le monde En général, le prix est inférieur à 10 €, un atout qui fait son succès. Premier marché à l’export, la Grande Bretagne, puis les Etats-Unis, l’Allemagne et la France. Mais il y a prosecco et prosecco. Si le prosecco DOC (Denominazione di Origine Controllata) est produits dans une vaste zone comprenant 9 provinces des régions de la Vénétie et du Frioul*, il existe un autre prosecco, le prosecco DOCG (dénomination d’origine contrôlée et garantie) dont les plus réputés se trouvent dans le district de Conegliano Valdobbiadene, province de Trévise, sur ces collines inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO (le 55ème site classé d’Italie). C’est un terroir prestigieux que se réservent les deux DOCG de l’appellation (souvent millésimés) : le Prosecco Conegliano Valdobbiadene Superiore DOCG et l’Asolo Prosecco Superiore DOCG et pour ce dernier une version extra-brute (au plus, 6 gr de sucre résiduel par litre) ; des crus souvent millésimés avec peut être un prochain Prosecco Rosato !
*Le Prosecco DOC couvre quatre provinces du Frioul-Vénétie Julienne (Gorizia, Pordenone, Udine et Trieste) et cinq de la Vénétie (Padoue, Venise, Trévise, Vicenza et Belluno).
Le prosecco en quelques mots. Le prosecco est composé d’au moins 85 % du cépage glera (appelé également prosecco) ; les 15 % restants provenant de la bianchetta trevigiana et perera, ainsi que des raisins plus internationaux tels que le chardonnay et le pinot grigio (pinot gris). Contrairement au champagne, et sa méthode champenoise*, il est élaboré selon la méthode Charmat ou fermentation en cuve close. Après la première fermentation alcoolique, le prosecco bénéficie d’une seconde fermentation qui permet la prise de mousse. Elle est faite en cuve clause. Comme pour la méthode traditionnelle c’est un apport de sucre et de levure qui provoquent le dégagement de CO2. Il est piégé dans la cuve. Une fois le vin filtré, une liqueur de dosage est ajoutée, après quoi le vin est mis en bouteille sous pression.
* En Italie, cette méthode champenoise (ou traditionnelle) est appelée metodo classico. On dit que certains producteurs de Prosecco l’expérimenteraient.
Quand le champagne se concurrence lui-même. Ah ces sparkling wines anglais, ces effervescents à la hauteur des champagnes ; tous ces Nyetimber, Ridgeview, Wiston Estate, Hattingley Valley, Gusbourne, Chapel Down, Furleigh Estate… Des noms récompensés dans les plus prestigieux concours internationaux ! Il y a 15 ans, ils méritaient ce petit sourire condescendant (affiché surtout par les français !). Aujourd’hui leurs réputations commencent à faire de l’ombre à nos champagnes. Alors au fil des bonnes années et grâce à une montée exponentielle de leur qualité, ces English sparkling wines se sont hissés à la hauteur des bulles champenoises au point qu’il est souvent bien difficile de faire la différence ! Ajoutons à ces nom, ces sparkling wines anglais made in Taitinger, made in Pommery… Après Pommery America (en partenariat avec Artesa) : Louis Pommery California Brut/Rosé, Louis Pommery Carneros Chardonnay 2019, voici le tout premier Louis Pommery England Brut (chardonnay, pinot noir, pinot meunier) en partenariat avec Hattingley Valley, dans le Hampshire sous la supervision du chef de cave de cave de la Maison Pommery, Thierry Gasco. Mais rendons à César ce qui est à César, le tout premier fut Taittinger qui en 2015, s’associait à Hatch Mansfield, société viticole britannique afin d’acquérir des terres près de Chilham, dans le Kent à Stone Stile Farm entre Canterbury et Ashford. Un achat de 69 ha (170 acres) plantés dès 2017 avec les 3 principaux cépages champenois (chardonnay, pinot noir et pinot meunier) sur les pentes orientées plein sud du domaine. Un nom symbolique, Evremond en mémoire de celui qui popularisa le Champagne à la cour du roi Charles II d’Angleterre à la fin du XVIIe siècle (il repose dans le coin des poètes à Westminster Abbey). Les premières bouteilles sont attendues pour 2024 pour une production annuelle qui devrait atteindre les 300 000 flacons.
Did the British invent Champagne ? Qui mettrait en doute ce que les anglais apportèrent au Champagne ? Beaucoup pensent en Angleterre que l’invention du Champagne n’est pas due au seul talent du moine bénédictin Dom Pierre Pérignon mais qu’il doit partager cette découverte avec un autre, un docteur de Gloucester, Christopher Merret. Vingt ans avant le célèbre moine de l’abbaye d’Hautvillers, en décembre 1662, le docteur Merret avait présenté à la Royal Society, son expérience résumée en 8 pages détaillant comment à l’instar du cidre, en ajoutant du sucre au vin, on créait des bulles qui apportaient une extraordinaire impression de fraicheur au vin. Il fut le premier à utiliser le terme sparkling wine alors qu’il fallut attendre 1718 pour qu’un premier document en France mentionne vin mousseux.
Les coopératives du champagne
Qu’est qui réunit des marques de champagnes comme Nicolas Feuillatte, Jacquart, Collet, Esterlin, Chassenay d’Arce… ? Ces marques sont toutes issues de coopératives. Elles regroupent en Champagne 45 % des surfaces (13 580 h). La coopération vinicole champenoise au sein de la Fédération des Coopératives Vinicoles de la Champagne (FCVC) rassemble 132 coopératives et unions répartis sur l’ensemble de la Champagne. Celles-ci regroupent 14 000 viticulteurs adhérents (70 % des déclarants de récolte de l’appellation). Elles fédèrent 125 centres de pressurage et possèdent une capacité de stockage de 300 millions de bouteilles. En termes de vente, à elles seules, 40 coopératives vendent 30 millions de bouteilles sachant que 25 millions de bouteilles sont vendues par 2700 coopérateurs sous leurs propres marques.
Ainsi, Nicolas Feuillatte, propriété de la coopérative de Chouilly, est devenue en 25 ans le troisième champagne le plus vendu dans le monde avec 11,2 millions de bouteilles en 2019. Il se place juste derrière Moët & Chandon et Veuve Clicquot. Cette coopérative fédère 5000 vignerons qui se sont réengagés sur cinq ans en 2019 (contre 4500 au cours de la période précédente) couvrant à eux tous, une surface de 2100 ha.
Comment reconnaître les champagnes issus des coopératives ? Il suffit de regarder l’étiquette. Si la mention CM pour Coopérative de manipulation apparaît, il s’agit d’une cave à laquelle les adhérents apportent leurs raisins. La coopérative se charge de les presser, de les vinifier puis d’élaborer les assemblages ; des bouteilles qui seront vendues ensuite pour la plupart sous le nom de la coopérative ou celui d’une marque qu’elle a créée. Si le coopérateur reprend ses vins* pour les commercialiser lui-même sous son nom ou sa marque, ses champagnes prendront les initiales RC pour Récoltant-coopérateur.
*Le coopérateur après avoir confié ses raisins à la coopérative, va récupérer son vin après la seconde fermentation en bouteille. A charge pour lui ensuite d’assurer la commercialisation.
Le mouvement coopératif né de la révolte champenoise de 1911.Le mouvement coopératif champenois est né au début du XXe siècle de la révolte de ses vignerons. Deux facteurs ont poussé à cette révolte. D’abord entre 1907 et 1911, la Champagne connaît une série de récoltes catastrophiques dues à des conditions climatiques très mauvaises. Ensuite, il faut se rappeler que la crise du phylloxera qui a ravagé le vignoble de la Marne est récente. Double peine donc pour les vignerons qui en conséquence aggrave l’approvisionnement des maisons champenoises. Celles-ci vont prendre alors une décision qui se révélera désastreuse : acheter le raisin hors zone d’appellation Champagne* et notamment dans les vignobles de l’Aube (depuis 1908, l’appellation Champagne se limitait aux vignobles marnais), moins touchés et surtout aux prix moins élevés. Pour les vignerons champenois regroupés en syndicat depuis 1904 (Fédération des syndicats viticoles de la Champagne), c’est une fraude, la révolte gronde, on fait la grève de l’impôt. Un grand meeting à Epernay rassemble en octobre 1910, une foule de 10 000 personnes.
* Mais aussi à partir de vins venus du Midi, de la Moselle, des Charentes, d’Algérie…
1911, la révolte éclate. 6 000 vignerons se révoltent pour demander la mise en application d’une loi adoptée à l’Assemblée nationale qui oblige les maisons de Champagne à ne se fournir qu’à partir de raisins originaires de la Champagne viticole (donc hors du secteur de l’Aube). Au coeur de ces manifestations punitives, des villes comme Epernay, Damery et Aÿ où de nombreux immeubles et caves de négociants dits fraudeurs sont pillées et incendiés comme la Maison Bissinger que l’on voit en flammes sur de nombreuses cartes postales et photographies d’époque. Pour les protéger, le gouvernement fait intervenir l’armée. Mais lorsque la loi est officiellement décrétée et appliquée, elle entraîne une riposte auboise violente. Pour éteindre l’incendie, une délimitation Champagne de deuxième zone est mise en place par une loi dès juin 1911 sans pour cela apaiser marnais et aubois. Il faut attendre 1927 pour que le vignoble aubois dont la Côte des Bar finisse par s’intégrer pleinement à l’appellation Champagne. Ces luttes feront naître les premières coopératives champenoises entre 1920 et 1929, puis entre 1936 et 1939. Ainsi, la Cogevi d’Aÿ (Coopérative Générale des Vignerons) fondée en 1921, sera la toute première à commercialiser un champagne sous la marque Collet.
Les coopératives et leurs marques de Champagne (Liste non exhaustive)
Champagne Jacquart, Champagne Montaudon… (Alliance Champagne) : Créé en 1998, le groupe Alliance Champagne fédère trois unions de vignerons (la Cogevi, la Covama, et l’Union Auboise) qui ont fait ensemble l’acquisition de la marque Jacquart. Alliance Champagne représente aujourd’hui l’une des plus vastes surfaces d’approvisionnement de la Champagne (plus de 7 % du vignoble de l’appellation) soit 1 800 vignerons sur 2600 h. Les ventes des marques commercialisées par la Covama et son Union de coopératives Alliance Champagne se sont montées en 2019 à : 365. 000 bouteilles pour Champagne Pannier (60% à l’Exportation), 1,9 millions de bouteilles pour Champagne Jacquart (55% à l’Exportation), 2,4 millions de bouteilles pour Champagne Montaudon et 1,5 millions de bouteilles en marques réservées.
* En 2010, Champagne Jacquart, filiale du groupe Alliance Champagne Jacquart Champagne, rachetait le Champagne Montaudon au groupe Moët Hennesy qui l’avait acquis en décembre 2008.
Champagne Nicolas Feuillatte (Centre Vinicole-Champagne (CVC). Le CVC Nicolas Feuillatte a été créé sous l’impulsion du Syndicat Général des Vignerons et de la Fédération des Coopératives sur la colline de Chouilly (Côte des Blancs) dominant Epernay. A lui seul aujourd’hui, il regroupe plus de la moitié des coopératives champenoises et fédère 5000 vignerons qui se sont réengagés sur cinq ans en 2019 (contre 4500 au cours de la période précédente). Ils couvrent une surface de 2100 ha dont 13 grands crus et 33 premiers crus, de la Vallée de la Marne à la Côte des Bar en passant par le Massif de Saint‑Thierry, la Montagne de Reims, la Côte de Sézanne et la Vallée de l’Ardre. Avec 11,2 millions de bouteilles en 2019, Nicolas Feuillatte se place en production, juste derrière Moët & Chandon et Veuve Clicquot. Enfin, faut-il noter l’acquisition par cette jeune maison de Champagne d’Henri Abelé, très ancienne maison rémoise, cédée par le groupe espagnol Freixenet.
Champagne Pannier (Coopérative Pannier-Covama à Château-Thierry). La Coopérative Vinicole de la Vallée de la Marne s’est forgé depuis près de 70 ans un outil de production, ancré dans la tradition champenoise. Propriétaire des marques de champagne Pannier, Jacquart et Montaudon, elle produit près de 4 millions de bouteilles par an, et diffuse ainsi le savoir-faire des 450 vignerons champenois qui la constituent. La Covama est l’opérateur leader de la vallée de la Marne ouest. Elle s’est taillé une place de choix parmi les coopératives champenoises. C’est en 1899, à Dizy, aux portes d’Épernay, que Louis- Eugène Pannier fonde le Champagne Pannier. La maison s’installe en 1937 à Château-Thierry (vallée de la Marne) pour ses caves médiévales. Aujourd’hui, ancrée au cœur des coteaux de la vallée de la Marne ouest à Château-Thierry, Champagne Pannier est la marque identitaire de la Covama. Elle a pour emblème un archer, suite à la découverte en 1999 d’une fresque médiévale représentant un archer avec sa devise : « Ad perfectionem intendere » (Tendre à la perfection). Implantée au cœur de la vallée de la Marne, Pannier bénéficie d’approvisionnements provenant des meilleurs vignobles champenois, de la Côte des blancs à la montagne de Reims en passant par la Vallée de la Marne, terroirs de Chardonnay, Pinot Noir et bien sûr Pinot Meunier, cépage dont Pannier a développé une excellente maîtrise.
Champagne de Saint Gall (Union Champagne à Avize). Avec ses 2330 adhérents implantés sur 1348 ha, Union Champagne est au premier rang des unions de coopératives champenoises pour le classement de ses crus et au troisième rang pour sa production. Aujourd’hui, ce sont 14 coopératives qui y adhèrent représentant un approvisionnement exceptionnel en vins clairs.13 sont implantées dans des communes classées en Premiers et Grands Crus. La 14e « Les Coteaux de Champagne » accueille uniquement les raisins non Premiers et Grands Crus des adhérents des 13 autres coopératives. Fait unique en Champagne, ces 14 coopératives fournissent à Union Champagne la totalité de leurs récoltes, ceci pour garantir un niveau constant de qualité d’approvisionnement.
Les 14 coopératives d’Union Champagne
En Côte des Blancs (Grand Cru et Premier Cru)
- Coopérative Vinicole de Cramant (Grand Cru) : 56 ha, 160 adhérents
- Coopérative « Les Grappes d’Or » (Grand Cru), Oger : 162 ha, 320 adhérents
- Coopérative « Union des Propriétaires Récoltants » (Grand Cru), Le Mesnil-sur-Oger : 303 ha, 604 adhérents
- Coopérative Vinicole de Vertus (Premier Cru), Vertus : 175 ha, 236 adhérents
- Coopérative « Henri Augustin » (Premier Cru), Vertus : 30 ha, 59 adhérents
- Coopérative Vinicole du Mont Aimé (Premier Cru) Bergères-les-Vertus : 83 ha, 111 adhérents
Montagne de Reims (Grand Cru et Premier Cru)
- Coopérative Vinicole d’Ambonnay (Grand Cru) : 150 ha, 219 adhérents
- Société Coopérative d’Intérêts Vinicoles (Grand Cru), Bouzy : 33 ha, 41 adhérents
- Coopérative « Au Bouquet » (Grand Cru), Bouzy : 33 ha, 42 adhérents
- Association Coopérative de Viticulteurs de Premiers Crus de la Marne (Grand Cru), Aÿ : 21,15 ha, 100 adhérents
- Coopérative Rurale Vinicole de Villers-Marmery (Premier Cru) : 17 ha, 28 adhérents
- Coopérative Le Val d’Or (Premier Cru) Avenay-Val-d’Or : 58 ha, 108 adhérents
Vallée de la Marne (Premier Cru)
- Coopérative « Louis Dupont » (Premier Cru), Cumières : 69 ha, 197 adhérents
La coopérative accueillant les raisins des autres crus
- Coopérative « Les Coteaux de Champagne », Oger : 121 ha, 230 adhérents
Champagne Beaumont-des-Crayères* (Coopérative Beaumont des Crayères à Mardeuil).
Cette coopérative a été créée en 1955 par un groupe de vignerons de la commune de Mardeuil aux portes d’Épernay (en haut des coteaux d’Épernay, au début de la vallée de la Marne). Aujourd’hui, Beaumont-des-Crayères regroupe 241 adhérents pour un vignoble de 86 ha travaillés en lutte raisonnées comprenant des parcelles de premiers et grands crus sur les communes de Cumières, Hautvillers, Dizy, Trépail, Avize, Mesnil-sur-Oger… Le terroir de Mardeuil est sans conteste l’un des crus les plus réputés de Champagne pour la qualité de son pinot meunier. Adapté au climat de la vallée de la Marne, il se révèle pleinement sur le sous-sol crayeux des coteaux d’Epernay. Surnommé « le plus champenois des cépages », le pinot meunier représente plus de 60 % des approvisionnements du Champagne Beaumont des Crayères. La production annuelle est de 550 000 bouteilles dont plus de 70 % destinées à l’exportation.
*Beaumont des Crayères est le nom de l’une des plus belles parcelles du vignoble de Mardeuil. Beaumont témoigne de la situation en coteaux. Crayères fait référence à ce sous-sol crayeux, caractéristique des meilleurs terroirs de la Champagne.
Champagne Veuve A. Devaux (Union Auboise à Bar-sur-Seine). Née en 1967, l’Union Auboise regroupait alors onze coopératives. Elle compte aujourd’hui 800 viticulteurs établis sur 1400 ha de la Côte des Bar. C’est en 1987 que l’Union Auboise acquiert la Maison Veuve A. Devaux, créée en 1846, à Epernay. Cette marque avait été fondée par les frères Devaux puis dirigée par Madame Devaux. Dernier du nom et sans héritier, Jean-Pol Auguste Devaux décidait alors de confier à Laurent Gillet, Président de l’Union Auboise, les destinées de cette marque. L’Union Auboise basé à Bar-sur-Seine, vend des vins de base à de grandes maisons de champagne de la Marne tout en sélectionnant 20 % de ses raisins pour sa marque de Champagne Veuve A. Devaux (700 000 bouteilles produites par an). Voir sa Collection D issue de sélections parcellaires et d’une vinification partielle en fûts. Autre originalité, l’apport d’un grand vigneron du Rhône, Michel Chapoutier, un inconditionnel de la Maison Devaux. Il possède d’ailleurs quelques vignes champenoises. Et c’est ainsi qu’avec Laurent et Marie Gillet, le trio épaulé par Michel Parisot, chef de caves de Veuve A. Devaux va élaborer la Cuvée Sténopé. La composition exacte est tenue secrète, les parcelles retenues variant pour chaque millésime. C’est une cuvée millésimée (composition de chardonnay et de pinot noir) vinifiée sous-bois, avec quelques fûts neufs (des merrains venant exclusivement des forêts de Champagne et d’Ardennes).
Champagne Collet (Cogevi à Aÿ). La Cogevi (Coopérative Générale des Vignerons), est la plus ancienne coopérative de Champagne (fondée en 1921). 2021 marque donc l’année de son centième anniversaire et de sa marque historique Champagne Collet. Son premier directeur, Raoul Collet propose de lancer une marque plutôt que de vinifier un vin vendu par d’autres. Son propre nom sera donné à ce Champagne (Champagne Collet) qui sera lancé en 1921. Dans les années 90, la Cogevi a rejoint le groupement de coopératives Alliance Champagne. Toutes les activités liées à la vinification sont alors rassemblées sur un même site, l’ex-Maison Bissinger à Aÿ doté du dernier cri de la technologie avec emménagement du sous-sol pour abriter plus de 27 millions de bouteilles. Le siège social de la Cogevi abrite aujourd’hui un musée retraçant l’histoire de la coopérative et de son Champagne. En face, la Villa Collet est une Folie Art Déco où sont exposées des collections liées aux années 20. Implantée à Aÿ, la Cogevi produit et commercialise ses marques de Champagne, Champagne Collet et Champagne Jacquart. Les adhérents, répartis sur 670 ha de l’aire d’appellation Champagne, apportent leur production à la coopérative, qui dispose d’une capacité de production de 10 millions de bouteilles par an.
*Dans la gamme des champagnes Collet, la Cuvée Esprit Couture Brut. C’est un assemblage de 6 crus sélectionnés, en Grands Crus et Premiers Crus : 50 % de pinot noir, issus des villages de Mailly-Champagne, Louvois, Tauxières-Mutry et Hautvillers ; 40 % de chardonnay, sélectionnés sur les parcelles du village Grand Cru de Louvois et 10 % de meunier du Cru de Ville-dommange. La cuvée Esprit Couture 2012 Premier Cru bénéficie d’un vieillissement de 7 ans minimum dans les caves centenaires de la Maison, sous le contrôle de Sébastien Walasiak, chef de caves Champagne Collet. (Elle est dosée à 8 gr/l).
Champagne de Castelnau (Cave Coopérative régionale des vins de Champagne (CRVC) à Reims). CRVC est connue pour sa marque phare, le Champagne de Castelnau*, une marque achetée en 2003. Si 3 millions de bouteilles étaient commercialisées par la CRVC, en 2019, 865 000 cols le sont sous la marque Castelnau (35 % en France, 65 % à l’export). La Coopérative Régionale des Vins de Champagne regroupe 785 adhérents sur 900 ha (dont 23 coopératives). Elle a acheté la villa Tassigny, rebaptisée Villa Castelnau, située dans le centre de Reims, en octobre 2018. Cette villa, qui sera ouverte au printemps 2021, sera le socle d’un développement oenotouristique.
* Le Champagne de Castelnau fut créé en 1916 en l’honneur du Général Edouard de Curières de Castelnau qui s’illustra durant la Première Guerre Mondiale.
Champagne Mailly Grand Cru (Coopérative Mailly à Mailly Champagne). Cette prestigieuse coopérative a été fondée en 1929 par 23 viticulteurs en n’acceptant que des raisins du grand cru Mailly, village classé Grand Cru, situé au cœur de la Montagne de Reims. C’est aujourd’hui un domaine de 70 ha qui produit une gamme de plus de dix champagnes exclusivement Grand Cru. La coopérative est réputée pour la qualité de ses approvisionnements, venant uniquement sur ce village de la Montagne de Reims, l’un des dix-sept grands crus de la Champagne, l’un des moins connus. Elle est engagée et certifiée, pour la moitié de ses adhérents*, dans la démarche Haute valeur environnementale (HVE), limitant désherbants, traitements et intrants. La coopérative dispose d’une cave impressionnante d’un kilomètre de longueur qui fut creusée par les coopérateurs en hiver, dès 1930, à vingt mètres sous terre dans la craie, à raison de 30 mètres par an jusqu’en 1965.
*Il revient en effet à chaque vigneron adhérent de s’engager dans la démarche de certification afin de valoriser les raisins du domaine cultivés en viticulture durable.
Champagne H.Blin (Coopérative Vinicole de Vincelles). En 1947 est fondé le Champagne H.Blin par Henri Blin et 28 autres vignerons. Ils créent la coopérative à Vincelles (le berceau du pinot meunier) située dans la Vallée de la Marne près de Dormans, au coeur d’un triangle Reims/Epernay/Château-Thierry. Aujourd’hui le Champagne H.Blin compte 120 vignerons adhérents et 118 ha ; des vignes plantés principalement en meunier (70 %) mais aussi en chardonnay (16 %) et en pinot noir (14 %). La marque commercialise près de 500 000 bouteilles dont 45 % à l’export.
*Simon Blin est depuis 2009, le président du Champagne H.Blin. Il est le petit-fils d’Henri Blin fondateur de la Coopérative en 1947. Il a cette volonté familiale (depuis au moins 12 générations) de promouvoir le pinot meunier sur le vignoble de la Coopérative Vinicole de Vincelles avec notamment ce cru emblématique, le Vincelles Rouge, un 100 % meunier pour rendre hommage à ce cépage.
Champagne Clérambault (Coopérative Vinicole de Neuville et Buxeuil). Cette coopérative a été créée en 1951 par Pierre Gillet en regroupant une cinquantaine de viticulteurs. Deux ans plus tard, l’activité de pressurage est complétée par l’élaboration de cuvées sous le nom de Clérambault. Les ventes annuelles se montent aujourd’hui à environ 500 000 bouteilles pour 165 ha et 112 vignerons qui apportent à la coopérative leur raisin ; des raisins issus de vignobles de la Côte des Bar sur les terroirs de Buxeuil, Celles-sur-Ource, Courteron, Polisy, Gyé-sur-Seine, les Riceys et Neuville-sur-Seine. La coopérative a une spécialité : la production de vin rouge AOC Champagne dont se fournit les grandes Maisons pour élaborer leur Champagne Rosé, rosé d’assemblage ou rosé de saignée. Ainsi le Champagne Clérambault Rosé est exclusivement composé de pinot noir, cuvée issue de saignées sur des cuves en macération destinées aux vins rouges AOC Champagne.
Champagne Palmer & Co (Société des grands crus de la Champagne à Reims). Au départ, à Avize (Côte des Blancs), sept propriétaires (aujourd’hui, plus de 300) de vignobles dans les Grands Crus de la Côte des Blancs et de la Montagne de Reims décident de s’unir pour créer la Société de Producteurs des Grands Terroirs de la Champagne qui donnera naissance à la marque Palmer. En 1959, la Maison Palmer s’installe sur la butte de la rue Jacquart, à Reims, dans le périmètre sacré du champagne, avec caves et galeries creusées dans la craie. Aujourd’hui, le Champagne Palmer & Co grâce à ce groupement coopératif de propriétaires est implanté sur 415 ha de vignes, répartis sur une quarantaine de crus dont plus de 200 ha classés en Grands et Premiers Crus dans la Montagne de Reims ; plus un approvisionnement venu de la Côte de Sézanne, la Côte des Bar et de la Vallée de la Marne. Les cépages se répartissent en 50 % de chardonnay, 40 % de pinot noir, 10 % de pinot meunier. Les ventes annuelles se montent à plus de 500 000 bouteilles.
Champagne Esterlin (Coopérative de Mancy). D’abord une distinction : le Champagne Esterlin a été élu en 2020, meilleure Coopérative de l’année au titre de la refonte de sa gamme ! C’est en 1948 qu’Ange-Cléophas Fransoret crée, avec quelques vignerons, la Coopérative vinicole de Mancy. Le Champagne Esterlin né de ce regroupement a depuis 1994 son siège social avenue de Champagne, à Epernay (un bâtiment inspiré des Villas de Palladio). C’est la seule coopérative à se trouver avenue de Champagne à Epernay. Avec 200 adhérents et 110 ha d’apport (dont plus de 40 % en chardonnay), Esterlin se fournit à partir de trois régions : Mancy et les coteaux sud d’Epernay (à la limite de la Côte des Blancs), le Sézannais et Chapelle-Monthodon (vallée de la Marne). La coopérative détient trois sites de pressurage : la Chapelle-Monthodon, Mancy et Sézanne, ainsi qu’un site de vinification et stockage et détient également 11 ha de vignes en propre ; un vignoble certifié HVE 3 et VDC depuis 2017. La production annuelle est d’environ 1,2 million de bouteilles.
Champagne Le Brun de Neuville (Cave coopérative des Champagne Le Brun de Neuville). Cette coopérative au sud d’Epernay regroupe aujourd’hui 145 ha et 150 vignerons. Elle est née en 1963 lors de l’association d’une vingtaine de coopérateurs (coopérative baptisée alors Les Crayères). Elle prit le nom de l’un de ses fondateurs les Le Brun de Neuville, châtelains résidant sur les hauts de Bethon, viticulteurs depuis cinq générations. Le Brun de Neuville vinifie 88 % de son vignoble en chardonnay issus des coteaux dans le Sézannais, avec des crus comme Villenauxe-la Grande, Fontaine-Denis, Barbonne-Fayel, Chantemerle et La-Celle-sous-Chantemerle. Le pinot noir totalise quant à lui 11%, et le meunier à peine 1%. Le négoce achète à Le Brun de Neuville 65 % de sa production. Les 35 % restants sont consacrés aux 9 cuvées du Champagne Le Brun de Neuville. La marque expédie en moyenne chaque année environ 400 000 cols.
Champagne Argentaine (Cave coopérative viticole L’Union de Vandières*). Cette coopérative est située sur les coteaux sud de la Vallée de la Marne. Elle est née en 1956 de la réflexion de vignerons pour développer en commun des outils de pressurage et de vinification et maîtriser la vente de leur production, assurée jusqu’alors par des prestataires et des courtiers. En 1972, l’Union se rapprochait de la marque Champagne de l’Argentaine, dont la devise est « Une maîtrise, un style, du caractère ». La coopérative regroupe aujourd’hui 180 adhérents sur une surface de production de 154 ha. Sa capacité de stockage est de 3 millions de bouteilles.
* Nom qui viendrait de Vendemiare (Vendanger).
Champagne Chassenay d’Arce (Cave coopérative à Ville-sur-Arce). Cette coopérative située Côte des Bar au sud de la Champagne a été fondée en 1956. Elle a pris pour emblème le château de Chacenay qui domine la vallée de l’Arce. Cette coopérative a été sous la présidence de Sandrine Girardot, petite fille du président-fondateur de 2007 à 2015 (décédée à 48 ans). Elle fut l’une des rares femmes à la tête d’une coopératives vinicoles. Aujourd’hui, elle réunit 140 adhérents. Le vignoble au coeur de la Côte des Bar couvre 315 ha (actuellement en conversion pour obtenir le label Vignerons Engagés) sur les communes d’Argançon, Bar-sur- Seine, Bertignolles, Buxières-sur-Arce, Chacenay, Chervey, Eguilly-sous-Bois, Loches-sur-Ource, Ville-sur-Arce et Vitry-le-Croisé. Le pinot noir représente ici 90 % de l’encépagement (pour 10 % de chardonnay) avec quelques parcelles d’un cépage longtemps oublié, le pinot blanc sur 2 ha. On en tire la Cuvée Pinot Blanc Extra Brut 2012 à peine dosé (3 g/l). Elle est élaborée par Brice Bécard, chef de caves de la Maison uniquement lors des années exceptionnelles. Un tiers de la production de la coopérative est vendu sous la marque Chassenay d’Arce (1,5 million de bouteilles par an dont 50 % part à l’exportation), un autre tiers sous une marque de distributeur et le dernier tiers est vendu à Alliance Champagne. Enfin, belle reconnaissance, la Cuvée Vintage 2008 obtient 3 étoiles au Guide Hachette des Vins 2021 (58,2 % pinot noir, 34,2 % chardonnay, 4,8 % meunier et 2,8 % pinot blanc).
Champagne Charles Heston (Cave Les Six Coteaux à Villers-Franqueux). Cette cave produit le Champagne Charles Heston. Elle est située sur la commune de Pouillon à 6 km au nord de Reims en direction de Laon sur la Route Touristique du Champagne. Elle a été fondée en 1951 et rassemble quelques 100 vignerons travaillant une surface d’environ 110 ha sur le Massif de Saint-Thierry (50 % pinot meunier, 30 % chardonnay et 20 % pinot noir). Elle regroupe les terroirs de Pouillon, Thil, Merfy, Saint-Thierry, Villers-Franqueux, Brimont (les 6 coteaux), ainsi que Courcy, Hermonville et Chenay.
Champagne Paul Goerg (Maison Paul Goerg à Vertus). Ce champagne est né dans les années 1950 lorsqu’un groupe de vignerons crée une gamme très sélective de champagnes Premier Cru issus des terroirs de Vertus, au sud de la Côte des Blancs. En 1984, la marque Paul Goerg est adoptée en hommage au maire de Vertus (1875) qui sut défendre avec force son vignoble et ses vignerons. Aujourd’hui, Le vignoble de 120 ha, situé exclusivement sur les terroirs de Vertus classés Premier Cru, assure un approvisionnement constant en raisins d’excellente qualité donnant des champagnes contemporains dont la signature est le chardonnay ; des champagnes avec des vieillissements sur lies très supérieurs aux exigences de l’appellation et marqués par des dosages faibles. A noter que Paul Goerg a inauguré une cuverie de haute technologie (48 cuves inox thermo-régulées de 25 à 65 hl) et une salle de dégustation panoramique. A noter que depuis quelques années a été mis en place une sélection parcellaire sur le vignoble principalement planté en chardonnay. Plus de 15 ha comme La Croix Saint-Ladre, les Faucherets ou le Pas de Cheval sont concernés par cette vinification spécifique et seules les vignes de plus de 35 ans entrent dans ce programme.
Champagne Vincent d’Astrée (Les Celliers de Pierry à Pierry). Le Champagne Vincent d’Astrée fut créé en 1956 à Pierry, au cœur du vignoble, au pied de la Côte des Blancs et à l’entrée d’Epernay. Un nom tout en symboles (Vincent pour le saint patron des vignerons et Astrée déesse placée par Zeus sous la forme de la constellation de la Vierge) d’où cette gamme de champagnes empruntée au ciel : Céleste, Constellation… La coopérative regroupe aujourd’hui plus de 220 viticulteurs pour une superficie exploitée de 85 ha (meunier 55 %, pinot noir 20 % et chardonnay 25 %), un vignoble classé Premier Cru et une production de 500 000 bouteilles. Le nom de Pierry vient de pierre en se fiant à un dicton local : Pierry, pierreux ; Vinay, vineux et Moussy, mousseux ! En effet, de petites pierres sont mêlées aux terres à vignes des coteaux de Pierry, produisant un vin nature qui a incontestablement un goût de pierre à fusil, de silex, qui donne en vieillissant des arômes miellés qu’on retrouve fréquemment dans les millésimes de ce Champagne. Sur un terroir classé Premier Cru, le meunier représente la majorité des surfaces Ainsi, avec six cuvées sur neuf assemblées avec ce cépage, le Champagne Vincent d’Astrée peut être considéré comme l’ambassadeur du meunier. La Maison est aujourd’hui présidé par Patrick Boivin.
Champagne Le Royal Coteaux (Cave coopérative du Royal Coteaux à Grauves). Fondé en 1948, le Champagne Le Royal Coteau est représenté par environ 200 viticulteurs qui possèdent près de 60 ha de vignes situées essentiellement sur la commune de Grauves et sur quelques communes voisines situées Côte des Blancs. La commune de Grauves tire son nom du latin « grava » signifiant pierre. Ses vignes sont entourées de forêt, formant un fer un cheval, qui donne le surnom de Royal Coteau à la commune, se trouvant comme couronnées de bois.
Champagne Marquis de Pomereuil (Cave coopérative des Riceys). C’est sans doute l’une des plus anciennes coopératives créées en Champagne : la réunion de 14 vignerons des Riceys dans la Côte des Bar qui devant la difficulté à vendre leurs vins (à l’époque des vins blancs, destinés au négoce de Champagne, des vins rouges et le fameux Rosé des Riceys), décident en 1922 de se fédérer. Cinq ans plus tard, la Cave coopérative des Riceys sort son premier Champagne. En 1980, avec le développement du vignoble, la marque de Champagne Marquis de Pomereuil est créée, sous le vocable d’un seigneur des Riceys du XVIIIe siècle, le marquis de Pomereu. A noter que le château des Riceys qui date du XVIe siècle fut la demeure du chancelier Rolin, seigneur des Riceys, fondateur des Hospices de Beaune. La cave emploie aujourd’hui 4 salariés, regroupe 55 adhérents qui travaillent 95 ha de vignes sous trois appellations : Champagne, Coteau champenois et Rosé des Riceys dont 97 % en pinot noir et 3 % en chardonnay. La production annuelle de Champagne Marquis de Pomereuil est en moyenne de 80 000 bouteilles dans une gamme de 7 champagnes.
Champagne Dom Caudron (Cave coopérative de Dom Caudron à Passy-Grigny). Ce petit village de la Haute Vallée de la Marne est connu pour sa coopérative (ouverte depuis 2010 très largement aux visites*) qui commercialise le Champagne Dom Caudron. Un nom qui fut donné en l’honneur de l’abbé Aimé Caudron curé du village qui en 1929, fit don aux 23 viticulteurs de Passy-Grigny de 1000 francs (à l’époque, un ouvrier gagnait environ 4 francs par jour). Cette somme leur permit de fonder leur propre coopérative en achetant un local et un pressoir. Aujourd’hui, elle fédère plus de 60 adhérents pour 130 ha de vignes sur les coteaux de la vallée de la Marne avec un raisin de prédilection, le meunier à 80 %, issus du village de Passy-Grigny, ainsi que des villages voisins.
Délimitation de l’aire d’appellation Champagne : révision de la délimitation
1/Une obligation : maintenir le système de régulation des plantations de vignes au-delà de 2030
Aujourd’hui, chacun est conscient de la très forte mobilisation des vignerons européens, des élus (Parlement européen, Assemblée nationale, Sénat…) et du gouvernement français. Les décideurs européens étaient revenus sur une décision majeure prise en 2009, à savoir libéraliser totalement les plantations sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne. Ils avaient cependant réintroduit lors de la dernière réforme de la Politique Agricole Commune (PAC) en 2013 un dispositif de régulation des plantations.
L’extrême danger de la suppression des autorisations de plantation. Existant depuis plus de 50 ans en Europe, ce dispositif appelé autorisations de plantation devrait prendre fin en 2030. Autrement dit, si l’Union Européenne ne décide pas maintenant de prolonger la régulation des plantations au-delà de 2030, c’est la libéralisation totale des plantations qui deviendra la règle. La perspective de cette libéralisation aurait de lourdes conséquences pour la filière viticole. Des surfaces supplémentaires pourraient être brutalement plantées à partir de 2030 notamment en Champagne avec la révision de l’aire (procédure de révision en cours) faisant peser le risque d’un déséquilibre des marchés (surproduction, chutes des revenus, perte de qualité…).
L’appel des représentants des AOC viticoles françaises. Les représentants des AOC viticoles françaises appellent solennellement le gouvernement français à la création d’une plateforme au niveau européen pour obtenir la prolongation du système de régulation des plantations après 2030. Le Ministre de l’Agriculture doit convaincre ses homologues européens dans le cadre des discussions autour de la Politique Agricole Commune (PAC). Les débats devant se terminer avant la fin de l’année 2020, il est urgent d’agir !
Les conséquences de cette suppression. Les conséquences d’une libéralisation totale des plantations se font d’ores et déjà ressentir dans de nombreux vignobles. Le chantier de délimitation de l’aire de l’AOC Champagne ouvert en 2003 devrait être finalisé en 2024. Plusieurs milliers d’hectares supplémentaires pourraient être classés dans l’aire.
L’appel des représentants des AOC viticoles françaises. Les représentants des AOC viticoles françaises appellent solennellement le gouvernement français à la création d’une plateforme au niveau européen pour obtenir la prolongation du système de régulation des plantations après 2030. Le Ministre de l’Agriculture doit convaincre ses homologues européens dans le cadre des discussions autour de la Politique Agricole Commune (PAC). Les débats devant se terminer avant la fin de l’année 2020, il est urgent d’agir !
Dernière nouvelle : maintien des droits de plantation jusqu’en 2045
Droits de plantation maintenus jusqu’en 2045. Le 8 février 2021, un accord est intervenu au Conseil de l’Union européenne pour étendre jusqu’en 2045 les autorisations de plantation des vignes. En acceptant de prolonger de 2030 à 2045 le mécanisme des droits de plantation, les États membres de l’Union européenne viennent d’ouvrir la voie à un compromis avec les négociateurs du Parlement européen, qui s’était prononcé pour sa part en faveur de l’horizon 2050.
2/Le chantier de délimitation de l’aire de l’AOC Champagne ouvert en 2003
Depuis 1936, la surface a crû de 1 % par an en moyenne en grignotant mètre par mètre sur cet immense jeu de marqueterie formé de 281 801 parcelles que représente le vignoble champenois (34 298 ha). Mais il n’y a plus aujourd’hui de place pour planter de nouvelles vignes. Pour s’agrandir, il faut prendre sur le voisin (ou la concurrence) sachant que cette terre champenoise vaut de l’or (en moyenne, il faut compter 1 million d’€ par ha). Voilà une quinzaine d’année qu’une procédure visant à la révision de la délimitation de l’appellation a été lancée en étroite relation avec l’ensemble de l’interprofession. Dans un premier temps, la procédure a pour objectif d’intégrer dans l’aire de production du vin de Champagne une quarantaine de nouvelles communes, sélectionnées selon de stricts critères géologiques, techniques et historiques. Elles sont situées actuellement sur des terres agricoles de l’Aube, l’Aisne, la Haute-Marne et la Marne.
Un travail de longue haleine. L’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO), en étroite collaboration avec le Syndicat Général des Vignerons de Champagne (SGV), ont dressé en 2008 une première liste de communes concernées par cette révision. Ainsi, une quarantaine de communes pourraient s’ajouter aux 319 communes de l’appellation ; le but étant d’agrandir de quelques ares à quelques hectares l’emprise des vignes sur ces différentes communes. Le choix s’est évidemment porté sur celles détenant déjà une histoire viticole. C’est un travail de longue haleine. Il faut connaître la composition exacte des sols, d’avoir une idée précise de l’ensoleillement mais aussi d’être capable de savoir si la vigne sera pleinement opérationnelle sur telle ou telle parcelle. Un fois ce travail achevé, commencera l’étape de la délimitation parcellaire dans les communes de la zone de production. Un travail qui devrait aboutir lorsque les premiers droits de plantation seront accordés par l’INAO. Ce chantier de délimitation de l’aire de l’AOC Champagne ouvert en 2003 devrait ainsi être finalisé en 2024. Plusieurs milliers d’hectares supplémentaires seraient alors classés dans l’aire*. Conséquences : des parcelles, qui valent aujourd’hui quelques milliers d’euros, vont se négocier à plus d’un million d’euros.
*Mais il est peu probable d’arriver aux 75 000 ha qui existaient avant la crise du phylloxera au XIXe siècle compte tenu des exigences des critères techniques.
A titre indicatif, voici la liste des nouvelles communes qui pourraient rentrer dans l’appellation :
- Dans la Marne : Baslieux-lès-Fismes, Blacy, Boissy-le-Repos, Bouvancourt, Breuil-sur-Vesle, Bussy-le-Repos, Champfleury, Courlandon, Courcy, Courdemanges, Fismes, Huiron, La Ville-sous-Orbais, Le Thoult-Trosnay, Loivre, Montmirail, Mont-sur-Courville, Péas, Romain, Saint-Loup, Soulanges, Ventelay.
- Dans l’Aisne : Marchais-en-Brie.
- Dans l’Aube : Arrelles, Balnot-la-Grange, Bossancourt, Bouilly, Etourvy, Fontvannes, Javernant, Laine-aux-Bois, Macey, Messon, Prugny, Saint-Germain-Lépine, Souligny, Torvilliers, Villery.
- Dans la Haute-Marne : Champcourt et Harricourt.
Dosage et les 8 spécificités de goût du champagne
Pour qualifier un champagne, s’ajoutent 8 spécificités de goût selon le dosage en sucre, une quantité de sucre ajoutée qui permet d’élaborer les différents niveaux de goût, plus ou moins dosés, c’est-à-dire plus ou moins sucrés, définis dans l’Union européenne.
- Extra-Brut (entre 0 et 6 g/l de sucre)
- Brut nature (moins de 3 g/l)
- Brut (moins de 15 g/l)
- Extra-dry (de 12 à 20 g/l)
- Sec (dry) (de 17 à 35 g/l)
- Demi-sec (de 33 à 50 g/l)
- Doux (plus de 50 g/l)
*Voir visuel : Champagne Gratiot-Pillière Extra-Brut Tradition (Charly, Vallée de la Marne) : 80 % meunier, 16 % chardonnay, 4 % pinot noir ; champagne constitué à 52 % de vins issus de l’année 2014 et 48 % de vins de réserve. Mise en bouteille en printemps 2015. Prise de mousse en cave, puis vieillissement sur lies pendant 66 mois. Dégorgement : 3 à 6 mois avant sa commercialisation. Dosage : 5 gr/l de sucre.
Pour une teneur de moins de 3 g/l, on peut également utiliser les mentions :
- Brut nature,
- Pas dosé,
- Dosage zéro
Le Champagne Brut Nature selon Louis Roederer et Philippe Starck
Champagne Louis Roederer et Philippe Starck Brut Nature Blanc 2012 (Zéro dosage) : pinot noir : 55 %, meunier : 25 %, chardonnay : 20 % (dont 15 % de vins vinifiés sous-bois). Des raisins qui proviennent exclusivement des Coteaux de Cumières.
Champagne Louis Roederer et Philippe Starck Brut Nature Rosé 2012 (Zéro dosage) : mêmes proportions de cépages ; des raisins qui proviennent exclusivement des Coteaux de Cumières. Une petite proportion des Pinots noirs du domaine est vendangée à part et “infusée” pendant quelques jours à froid et sans fermentation alcoolique, avant d’être coulée dans les jus du Brut Nature Blanc.
Les autres appellations champenoises. Enfin, à cette longue liste de vins effervescents, il convient d’ajouter les deux vins tranquilles de Champagne (non effervescents) :
- Les Coteaux champenois (vins rouges, rosés, blancs)
- Le Rosé des Riceys (vin rosé)
Une échelle de prix propre au champagne. A combien le kg de raisin ?
Une échelle qualitative exprimée en pourcentage. La qualité du raisin en Champagne est appréciée par rapport à une cote sur une échelle qualitative exprimée par un pourcentage. Les négociants achètent le raisin en fonction d’un prix de référence fixé par le CIVC (Comité Interprofessionnel des Vins de Champagne, voir plus bas). Dès 1920, chaque commune de Champagne a été répertoriée en fonction de la qualité des vins qu’elle produisait. Aujourd’hui, 320 communes sont consacrées en AOC Champagne dont 17 en AOC Champagne Grand Cru, et 44 en AOC Champagne Premier Cru. Les meilleures communes se voient attribuer le coefficient 100 %. Ce sont les communes des Grands Crus, et elles sont toutes situées sur le département de la Marne. On passe de 90 % à 99 % pour les Premiers Crus et de 80 % à 89 % pour les Champagne sans cru soit 255 communes. Inutile de dire que la cueillette est toujours manuelle.
Le rendement à l’hectare et prix du raisin en Champagne en 2021
Un rendement qui s’exprime en kilo. Le rendement s’exprime ici en kilo de raisin et non en hectolitre*. Chaque année le rendement maximum à l’hectare, « tirable », est fixé avant la vendange, en prenant en compte la quantité ainsi que la qualité des raisins et également le contexte économique. La décision est un compromis entre optimisme et prudence. Vignerons et maisons de Champagne s’accordent sur un rendement « tirable-commercialisable ». Ainsi, en 2021, les coprésidents du Comité Champagne Maxime Toubart (Syndicat Général des Vignerons de Champagne) et Jean-Marie Barillère (Union des Maisons de Champagne) présentaient en août les chiffres du rendement commercialisable pour la vendange 2021. A noter que le rendement à la vendange se complète d’une limitation du rendement au pressurage : 102 litres de jus au maximum pour 160 kg de raisins. Ce qui amène le rendement final à 66 hl à l’hectare.
* C’est ce qui différencie la Champagne des autres régions viticoles. Les négociants participent à la fixation annuelle du rendement. Pourquoi cette particularité ? Parce qu’ils achètent près de 80 % des raisins des vignerons.
En 2021, 10 000 kg par hectare. les Champenois ayant une récolte inférieure aux 10 000 kg/ha peuvent bénéficier d’une sortie de réserve correspondante aux quantités manquantes. Si la qualité prometteuse de la récolte 2021 est comparable à des millésimes comme 1997, 2008 ou encore 2013, les volumes sont faibles. Le Comité Champagne a établi une première estimation autour de 6 500 kg/ha (le rendement étant fixé à 10 000 kg/ha). Certains l’ont atteint quand d’autres n’ont même pas sorti deux tonnes… Des premiers résultats qui contrastent fortement avec trois années fastes (2018-2019-2020) tant en qualité qu’en quantité. De fait, les vignerons champenois touchés cette année devront piocher dans leur réserve interprofessionnelle, ce système qui autorise à mettre de côté des vins qui pourront servir en cas d’anicroche, dans la limite d’un plafond fixé à 8 000 kg/ha.
Petit rappel. Pour avoir droit à l’appellation Champagne, le rendement maximum du raisin à l’hectare est fixé chaque année, sans pouvoir dépasser un plafond de 15 500 kg par hectare. Au-delà, l’excédent peut être utilisé pour constituer une réserve qualitative qui est stockée sous forme de vins clairs et qui sera ensuite débloquée pour compenser par exemple une insuffisance de rendement futur. Si surplus de production, il est automatiquement envoyé en distillerie.
Le prix du kilo de raisin en Champagne en 2021.
Le prix moyen 2019 était de 6,50 € le kilo*. 2020, marque une certaine baisse mais ce qui en fait encore le kilo de raisin le plus cher du monde. Les prix ont chuté de 4 % à 6 % selon les groupes et les maisons. Il faut savoir que le prix de base peut être différent selon les crus ou les secteurs. Les prix d’achat du raisin (surtout dans les Grands et Premiers crus) n’ont cessé d’augmenter depuis 2017 (12 % en trois ans) alors que le prix des bouteilles n’ont pris que 2 % par an.
*Dans une fourchette allant de 6.20 à 7.20 € /kg. A comparer au 0,80 € à 1 € pour le kilo du Prosecco (cépage appelé aujourd’hui glera) issu de Vénétie, Frioul-Vénétie-Julienne et qui donne le plus réputé des effervescents italiens
Des primes pour la certification. Au prix du kg, s’ajoute des primes concernant des aides apportés aux viticulteurs pour le développement de la VDC (Viticulture Durable en Champagne) et de la norme HVE (Haute Valeur Environnementale) niveau 3.Ainsi, c’était en 2020, 40 c/kg pour MHCS (Champagne Moët & Chandon) et Pernod-Ricard (Perrier-Jouët et Mumm) et 25 c/kg pour Nicolas Feuillatte. La certification sera probablement un pré-requis pour la signature des prochains contrats en 2024, estime Franck Hagard qui avec Philippe Launois et Franck Hagard, est le nouveau coprésident du Syndicat des courtiers en vins de Champagne. Le négoce aura probablement l’opportunité d’imposer ces certifications avant 2030, date qui est actuellement actée au sein de l’interprofession.
Tableau du rendement maximum à l’hectare en Champagne depuis 2004
- 2004 : 12 000 kg/ha
- 2005 : 11 500 kg/ha
- 2006 : 13 000 kg/ha
- 2007 : 12 400 kg/ha
- 2008 : 13 600 kg/ha
- 2009 : 9 700 kg/ha
- 2010 : 10 500 kg/ha
- 2011 : 12 500 kg/ha
- 2012 : 11 000 kg/ha
- 2013 : 10 500 kg/ha
- 2014 : 10 500 kg/ha
- 2015 : 10 500 kg/ha
- 2016 : 11 000 kg/ha
- 2017 : 10 300 kg/ha
- 2018 : 10800 kg/ha
- 2019 : 10200 kg/ha
- 2020 : 8000 kg/ha
- 2021 : 10 000 kg/ha
Une bouteille de champagne = 1,2 kg de raisin
Question triviale ! Comment peut-on voir des champagnes bradés à 10 € voire plus bas dans la grande distribution lorsque que le kg de raisin est déjà au-delà de 6 € et qu’il faut au minimum 1,2 kg de raisin pour élaborer une bouteille de Champagne (0,75 cl) ? A titre d’indication, le prix moyen d’une bouteille de Champagne était de 18 € en 2019. Et que dire de ces offres de champagnes autour de 10 € que propose à l’occasion des fêtes de fin d’année certains supermarchés (un catalogue de noël va jusqu’à proposer, une bouteille à 8,75€). Pour obtenir de tels prix, seuls les producteurs utilisant des vins de tailles moins qualitatifs donc bien moins chers peuvent proposer de tels champagnes. Explication : le pressoir champenois traditionnel reçoit 4000 kg de raisins. La première presse, appelée cuvée*, permet d’obtenir 2050 litres de moût ; les deux serrages suivants, 450 l (c’est ce qu’on appelle « taille »). Un dernier serrage donne la « rebèche », exclue de la vinification champenoise et destinée à la distillation. La taille, aussi riche en sucre avec moins d’acides, mais plus de sels minéraux (potassium notamment) et de matières colorantes, produit des vins aux caractères aromatiques intenses, plus fruités dans leur jeunesse, mais d’une moins grande longévité.
*La cuvée, c’est le jus le plus pur de la pulpe riche en sucre et en acides (tartrique et malique). Il donne des vins d’une grande finesse, avec une bonne fraîcheur en bouche et une meilleure aptitude au vieillissement.
Elaboration du Champagne en dix étapes, des vendanges à l’habillage des bouteilles
Le Champagne, un vin et une méthode. D’abord une question, le Champagne est-il un vin ou une méthode, la fameuse méthode champenoise ? Les deux, en fait. Seule la conjonction d’un vin de très grande qualité et son traitement selon la méthode champenoise permettent d’obtenir un véritable champagne. Dom Pérignon, cellérier de l’abbaye d’Hautvillers n’a pas inventé la mousse au XVIIe siècle comme on le croit ; il a su par ailleurs en excellent technicien et grâce à une sévère sélection de cépages améliorer la qualité. Le champagne lui doit l’une de ses règles d’or, les assemblages de raisins. Il pratiqua avec talent les soutirages et les collages, réussissant à stabiliser les vins et à garder leur mousse. Aujourd’hui, sous une appellation unique, il existe une multitude de champagne, vin civilisateur selon le mot de Talleyrand qui, par le monde, fut souvent imité mais jamais surpassé. Doit-on rappeler que Champagne est le deuxième mot français le plus connu dans le monde (après bonjour) !
Comment s’élabore le Champagne, la fameuse méthode champenoise ?Il s’agit ici de détailler ce qui est appelé la méthode champenoise, une méthode complexe qui nécessite un savoir-faire, des outils précis et un investissement considérable en hommes, en talents et en argent.
Procédons donc par étapes chronologiques :
1 – Les vendanges : elles sont exclusivement manuelles pour recueillir des grappes intactes. Elles durent entre 2 et 3 semaines, entre août et octobre*. Les maisons réputées pratiquent toutes l’épluchage, c’est-à-dire qu’elles sélectionnent les raisins verts et écarte systématiquement les raisins pourris. Vient ensuite le débourbage qui a pour but de laisser décanter les bourbes constituées de terre, de débris de feuilles et d’impuretés pour ne laisser qu’un moût le plus limpide possible.
Date des vendanges 2020. 15 jours d’avance sur 2019 et premier coup de sécateur pour la maison de champagne Noël Leblond-Lenoir à Buxeuil, dès le 13 août. Du jamais vu ! Elles ont débuté dès le lundi 17 août, dans l’Aube, notamment à Bar-sur-Aube pour les trois cépages et dans la Marne, dès mardi 18 août à Montgenost et Bethon à côté de Sézanne pour les 3 cépages de l’appellation. Dans des communes comme Aÿ, Epernay ou encore Rilly-la-Montagne l’ouverture des vendanges s’est faite le 20 août.
Le salaire des vendanges 2020. En 2020, entre 100 000 et 120 000 hordons (vendangeurs en Champagne), ont été recrutés et comme tous les ans sur une période très courte. Un vendangeur sur deux vient de l’étranger (essentiellement des gens venus de Pologne, d’Italie et de l’est de l’Europe), une statistique qui explique le casse-tête des vignerons pour trouver de la main d’oeuvre, notamment à l’heure du coronavirus. Employés avec des contrats de saisonnier de 35 heures, les vendangeurs travaillent souvent entre 40 et 45 heures par semaine, dont une partie est rémunérée en heures supplémentaires. Le montant des charges sociales est passée de 58,92 € à 85,65 €, toujours sur une base de 35 heures à un taux horaire brut de 10,57 euros (le Smic avec les indemnités dues aux contrats à durée déterminée).
Combien gagne un vendangeur ? Le SMIC horaire brut mais sans cotisations d’assurances sociales. Généralement, un coupeur gagne le SMIC. Ceux qui peuvent gagner plus, ce sont 1/ les porteurs (petits paniers à bras) avec distribution des caisses, vidage des paniers dans les caisses et 2/ les vendangeurs qui assurent le « débardage » des caisses de raisins (transport des caisses pleines en bout de vigne avec aide au chargement. Parfois, la rémunération se fait au kilo récolté : autour de 20 centimes d’€. Le vendangeur est logé et nourri (sinon, c’est un peu plus que 15 € par jour qui lui sera versé à titre d’indemnité). Avec le bonus de rémunération des heures supplémentaires, il peut gagner plus (12,90 € bruts par heure supplémentaire entre 36 et 43 heures hebdomadaires) et jusqu’à 15 € bruts par heure supplémentaire à partir la 44e heure hebdomadaire. A cela s’ajoute l’indemnité de congés payés en plus soit environ 10 % du salaire brut.
2- Le pressurage. Le pressurage est strictement réglementé par l’appellation. La particularité du Champagne est de produire un vin blanc, mais les deux tiers des raisins disponibles sont à peaux noires. 5 grandes règles sont à respecter :
- 1/Pressurage aussitôt après la cueillette,
- 2/Pressurage de grappes entières,
- 3/Conduite douce et progressive du pressurage,
- 4/Faible rendement d’extraction,
- 5/Fractionnement des jus à la sortie du pressoir.
Quels types de pressoir ? La capacité des pressoirs varie de 2 000 à 12 000 kilos de raisins entiers. Jusqu’à la fin des années 80, la Champagne n’utilisait que des pressoirs traditionnels verticaux pilotés manuellement. Ils représentent encore 28 % du parc champenois mais la mécanisation des opérations de « retrousse » (remaniement entre chaque pressée) a contribué à l’essor des pressoirs horizontaux (pressoirs à membrane latérale, à plateaux inclinés, à maie tournante) manœuvrés par des consoles automatiques qui permettent de mémoriser plusieurs programmes.
Extraction du jus de raisin : différence entre la cuvée et la taille. Ainsi, le pressurage est effectué très rapidement après la cueillette des raisins, afin qu’ils ne s’altèrent pas et pour éviter que la peau du raisin ne teinte le jus. Cette opération s’effectue généralement à l’aide de pressoirs verticaux, mais aussi de plus en plus avec des pressoirs horizontaux à cages ou à membranes. Le pressurage assure donc une extraction lente du jus de la pulpe afin de préserver la finesse des arômes. Les maisons pressent les raisins séparément, cru par cru. Chaque cru est identifié selon la date et l’heure de la cueillette. Il est pressuré de façon distincte afin de pouvoir préserver au maximum la traçabilité de son origine. Pour cela on constitue des marcs homogènes (même cépage, même parcelle ou regroupement de parcelles comparables). Le rendement en Champagne est limité à 25,5 hl de moût pour 4 000 kg de raisin, dont 20,5 hl de cuvée*, le meilleur jus, seul utilisé dans les cuvées de qualité puis est tiré 2 fois 5 hl qualifiés de tailles.
*Le jus de la cuvée est le plus pur de la pulpe riche en sucre et en acides (tartrique et malique). Il va donner des vins d’une grande finesse, avec une bonne fraîcheur en bouche et une meilleure aptitude au vieillissement.
Pour le Champagne rosé. La vinification d’un Champagne rosé se fait par le procédé de macération. Avant le pressurage, on laisse ainsi macérer des raisins à peaux noires, préalablement égrappés, pendant quelques heures en cuve (24 à 72 heures selon l’année) afin de donner au jus la couleur désirée.
3 – La vinification. Tout d’abord la première fermentation alcoolique se fait à basse température en octobre dans des cuves inox thermo-régulées (plus rarement en fûts comme par exemple chez Krug et Bollinger), par cépages, crus et cuvées. Cette fermentation va transformer le moût en vin, un vin tranquille, fruité et sec, doté d’une légère acidité qui retiendra la mousse. Certains producteurs font alors faire à leurs vins une fermentation malolactique qui est la dégradation d’acides maliques en acide lactique. Cette opération donne au vin sa souplesse et sa rondeur. Quelques maisons y renoncent pourtant pour conserver à leurs vins plus de tonicité et de fraîcheur.
4 – L’assemblage. C’est l’étape fondatrice de chaque cuvée. L’assemblage est l’oeuvre du chef de caves. Une opération très délicate qui consiste à marier les vins tranquilles de différents crus et années pour perpétuer le style et la qualité constante de la Maison. On peut ainsi à partir de 150 crus déguster et analyser jusqu’à 500 cuves pour réussir un assemblage et recréer ce fameux goût maison propre à chaque Champagne. Ainsi, plusieurs types d’assemblages sont possibles, l’assemblage horizontal qui utilise des vins du même millésime, mais de crus ou de cépages différents ; l’assemblage vertical qui s’élabore à partir de vins de l’année, associés à des vins de réserve et enfin, un mix de ces deux assemblages.
L’art de l’assemblage. En mariant des « vins clairs » issus de crus, de cépages et d’années aux qualités aromatiques et organoleptiques différentes, l’art de l’assemblage est de créer un vin supérieur à la somme des vins de base. Le vigneron ou le chef de cave qui réalise l’assemblage a pour objectif de réaliser un Champagne qui reflète sa vision, son style propre, dont il cherche d’année en année à perpétuer les caractéristiques. On peut assembler plusieurs dizaines de crus. Les combinaisons avec les années et les cépages sont multiples. Elles nécessitent une longue expérience des terroirs, et la faculté à anticiper. La prise de mousse et la maturation sur lies qui suivront l’assemblage vont en effet profondément modifier les caractéristiques du vin au cours du temps.
5 – Le tirage ou mise en bouteilles. Sucre et levures sont ensuite ajoutés à l’assemblage préparé selon les proportions choisies. En règle générale, pour la liqueur de fermentation, c’est un kg de sucre de canne ou de betterave par litre de vin vieux. Il suffit de 4 grammes de sucre par litre pour obtenir une pression de 1 kg par cm2, soit une atmosphère dans la bouteille. La réglementation champenoise exige au minimum 5 bars à la commercialisation. Les bouteilles sont ensuite stockées dans des caves fraîches, à température et hygrométrie contrôlées.
Après le tirage, les bouteilles sont bouchées habituellement avec une capsule de type bouteilles de bière ou lorsqu’il s’agit d’une cuvée haut de gamme à l’aide d’un bouchon en liège. Elles seront ensuite élevées “sur lattes”, 15 mois pour un non millésimé et 36 mois pour un millésimé et souvent plus.
Une double fermentation des moûts. Ce mode d’élaboration consiste à rendre effervescent un vin tranquille, à provoquer une double fermentation du moût : 1/la première en cuves ou en fûts de chêne (plus rare) ; 2/la seconde dans les bouteilles, en cave. A la mise en bouteille, il est ajouté la liqueur de tirage, mélange de levure et de sucre qui provoque la prise de mousse, faisant naître les fameuses bulles. Les bouteilles doivent séjourner un minimum légal de quinze mois pour un champagne brut (non millésimé), durée au-delà de laquelle intervient le remuage quotidien pendant deux à trois mois. Les bouteilles sont stockées goulot vers le bas. Les lies vont alors s’accumuler dans le col, contre la capsule. Pour extirper ce dépôt, on ôte la capsule. Le dépôt est expulsé par le gaz sous pression. C’est le dégorgement. Le volume perdu est remplacé par un mélange de vin et de sucre appelé liqueur d’expédition dont le dosage déterminera le Champagne (brut, sec, extra-brut, etc.). La bouteille est ensuite rebouchée avec son célèbre bouchon de liège et entame un dernier vieillissement en cave. C’est la maturation.
6 – La prise de mousse. En 4 à 6 semaines, sous l’action des levures et à basse température dans les caves (9 à 11°), la deuxième fermentation en bouteille rend le vin effervescent.
7 – La maturation sur lies. Le vieillissement permet aux cuvées de développer leurs arômes spécifiques. Il est obligatoirement de 15 mois minimum après tirage et 3 ans pour les Champagne millésimés. Ce sont évidemment des minima. Ces durées sont largement dépassées pour les cuvées de qualité. On dit alors des bouteilles qu’elles sont élevées sur lattes.
8 – Le remuage et le dégorgement. Un geste ancestral qui permet de faire descendre progressivement le dépôt de levures dans le col pour pouvoir l’expulser, après congélation du col, lors du dégorgement. Longtemps exclusivement manuel, il est aujourd’hui principalement assuré par des automates (Gyropalette ®).
9 – Le dosage. Il permet, par l’adjonction au vin d’une petite quantité de liqueur de dosage, de restituer à la cuvée un niveau de sucre habituel dans les vins. C’est par le niveau de dosage que se différencient Brut, Extra Brut, Sec, Demi-Sec (voir plus haut). La bouteille sera ensuite fermée hermétiquement par un bouchon de liège, coiffée d’une plaque de muselet (aux couleurs de la maison) et l’ensemble retenu par un muselet en fer.
10 – L’habillage. Il se fait par la pose d’une étiquette et d’un col porteurs d’image. L’habillage doit se conformer aux nombreuses règles de l’AOC et souvent aussi aux obligations propres des pays importateurs. Ainsi, l’étiquette comporte un certain nombre d’informations qui donnent au consommateur des éléments sur le type de Champagne et la façon dont il a été fabriqué.
Environnement, les ambitions de l’AOC Champagne
Les ambitions environnementales de l’AOC Champagne. La filière champenoise est engagée depuis de nombreuses années dans une démarche progrès environnemental. Ainsi,
- 50 % des surfaces sont sous certification environnementale et l’objectif est de 100 % en 2030
- Objectif 0 herbicide en 2025
- 50 % des surfaces sont couvertes par la technique de confusion sexuelle (quasi-suppression des insecticides)
- 100 % des effluents vinicoles et sous-produits sont valorisés, 90 % des déchets industriels sont traités et valorisés.
Cette démarche de progrès environnemental a été renforcée par la demande récente d’intégration de mesures agro-environnementales au sein du cahier des charges de l’AOC Champagne, votée en 2021 par le Conseil d’Administration du SGV Champagne. Ainsi, quatre mesures sont sur la table :
1/Introduction d’une variété résistante aux maladies de la vigne et adaptée à l’évolution du climat. Il s’agit du voltis, dont les qualités organoleptiques semblent assez compatibles avec l’identité des vins de Champagne. L’objectif de l’introduction de ce nouveau cépage à titre expérimental est de permettre aux vignes de résister au mildiou et à l’oïdium, tout en s’adaptant au réchauffement climatique grâce à des débourrements plus tardifs
2/Obligation du traitement des plants à l’eau chaude
3/Maintien du couvert végétal hivernal
4/Evolution de la densité de plantation tout en préservant la qualité et la typicité des vins de Champagne pour accompagner la transition écologique dans un contexte de changement climatique.
Foncier et fiscalité, la valeur d’un hectare en Champagne
Au prix à l’hectare, le vignoble champenois est l’un des plus chers au monde. Selon la Safer, un seul hectare en Côte des Blancs peut se négocier entre 680 000 € à plus de 1,9 million d’€. Que sera 2021 alors le prix des vignes en Champagne 2020 était en baisse de près de 2 % ?
*Safer : Société d’aménagement foncier et d’établissement rural.
Prix de l’hectare de vigne en Champagne.
(évolution sur 9 ans : 2011-2012-2013-214-2015-2016-2017-2018-2019)
(En milliers d’euros)
AISNE – Moyenne départementale AOP : 735,9 €/793,2€ / 798,1€ / 815,5€/ 866,0€ / 855,9 €/ 872,3€ / 852,1€/ 869,6€ (+2 % entre 2018 et 2019)
Champagne : 735,9€/ 793,2€ /798,1€ /815,5€ / 866,0 €/855,9€/ 872,3 €/852,1€/869,6€ (+2 % entre 2018 et 2019). En moyenne de 356€ à 1110€
AUBE – Moyenne départementale AOP : 773,7€ / 920,4€ / 930 € /980,9€ / 1 000€ / 971,7€ / 1 004,1€ / 1 001,1€ / 957,9 € (-4% entre 2018 et 2019)
Champagne : 773,7 920€/4 9309€/80,9 €/1 000€/971,7€/ 1 004,1€/ 1 001,1€ / 957,9€ (-4% entre 2018 et 2019). En moyenne de 482,8€ à 1233,6€ €)
MARNE – Moyenne départementale AOP : 961,6€/ 1 191,5€/ 1 170,5€/ 1 218,5€/ 1 235,3€/ 1 201,4€/ 1 201€/ 1 215,7€/1196€ (+ 2 % entre 2018 et 2019)
- Champagne – Côte des Blancs : 1 191,1€/ 1 564,1€/ 1 565,1 €/1 570,7 €/1 552€/1 532,9€/ 1 472,2€/ 1 582,6 €/1617,1€ (+2 % entre 2018 et 2019). En moyenne de 680,3 € à 1949,5€
- Champagne – Côte d’Epernay, Grande Montagne : 935€/1 152,6€/ 1 132,1€/ 1 191,9€/ 1 214,1€/ 1 181,8€/ 1 188,9€/ 1 187,3€/1154,8€ (-3 % entre 2018 et 2019). En moyenne de 378,5€ à 1 632,1€)
Champagne – Autres régions : 878,2€/ 1 042,8 €/1 004,0€/ 1 044,8€/ 1 070,3€/ 1 019,9€/ 1 040€/ 1 037,1€/1019,1€ (-2% entre 2018 et 2019). En moyenne de 220€ à 1 377,2€
Le foncier et la fiscalité sur les transmissions
Comment résoudre le problème de la fiscalité sur les transmissions ? Le SGV (Syndicat Général des Vignerons de Champagne) demande au gouvernement et au parlement de faciliter les transmissions des exploitations dans un cadre familial au travers d’une exonération de 100 % des droits de donation et de succession pour les biens loués pendant une longue durée (au moins 18 ans) comme le pratiquent l’Allemagne, l’Italie et la Suisse.
Quelques chiffres pour mieux saisir les problèmes de la transmission :
- 250 % est l’augmentation du prix moyen des vignes (entre 1991 et 2020).
- 44 % des vignerons sont âgés de 50 ans et plus.
- 25 années sont nécessaires pour couvrir le montant des droits de succession.
Un foncier rare et cher. Le prix moyen des vignes a augmenté de plus de 250 % entre 1991 et 2020 pour un prix moyen en Champagne de 1,1 million d’€/ha et un prix minimum de 1,8 million d’€/ha dans certains grands crus. Aujourd’hui, les repreneurs sont encore nombreux mais le coût des transmissions reste un énorme problème. Conséquence, un fort morcellement du vignoble qui s’accentue d’ailleurs (281 000 parcelles) d’année en année. Le prix du foncier est un frein lorsqu’il faut racheter les parts familiales ou s’agrandir. La fiscalité frappe durement les transmissions familiales. En conséquence, les héritiers auraient tendance à les céder plutôt qu’à les louer à des membres de la famille. Ainsi, en 14 ans, les exploitations de taille moyenne (entre 1 et 5 ha) ont baissé de 5,4 %. Le recul en nombre et en superficie des exploitations de taille intermédiaire témoigne de cette difficulté à transmettre une unité d’exploitation viable.
Déjà le gouvernement a fait voter un allégement de la fiscalité sur les successions en 2019 au travers d’un triplement du plafond d’abattement de 75 %. Est-ce suffisant sachant qu’en Champagne, la rentabilité reste faible ? 25 années sont nécessaires pour couvrir le montant des droits de succession (rendement net d’impôts de 0,35 % par rapport à la valeur en capital).
Les 4 mesures que préconise le SGV
- 1/Exonération de 100 % des droits de donation et de succession pour les biens loués pendant une longue durée (au moins 18 ans) comme le pratiquent l’Allemagne, l’Italie et la Suisse.
- 2/Raccourcissement du délai de rappel fiscal
- 3/Rétablissement de la réduction de droits pour les donations consenties avant un certain âge
- 4/Rehaussement des exonérations partielles notamment.
Géologie et nature du sol
La craie, un atout majeur pour le Champagne. La réussite de la vigne en Champagne tient surtout à la nature du sol en majorité calcaire. Les sédiments affleurants sont également calcaires à 75 % (craies, marnes et calcaires proprement dits). Cette énorme masse de craie* qui atteint jusqu’à 100 m d’épaisseur joue un triple rôle :
- Elle favorise la maturation du raisin : 1/par sa capacité à retenir l’humidité. Ainsi, sa forte porosité en fait un véritable réservoir d’eau (300 à 400 l au m3) ce qui assure à la plante une alimentation en eau suffisante même lors des étés les plus secs. 2/à renvoyer le rayonnement solaire vers les grains et à emmagasiner la chaleur le jour pour la restituer la nuit.
- Les racines y pénètrent profondément, jusqu’à 10, voire 20 m, y puisant les éléments minéraux qui concourent à la finesse du vin.
- Enfin, on a pu y creuser facilement les immenses caves fraîches, sèches et propres, où le champagne vieillit idéalement à la température constante de 10° C. Ces caves, généralement ouvertes à la visite, représentent un réseau de galeries long de plus de 250 km, essentiellement sous les villes de Reims et d’Épernay.
* Cette fameuse craie champenoise se compose de granules de calcite issus de squelettes de micro-organismes marins (coccolites). Elle est caractérisée par la présence de fossiles de bélemnites (mollusques de l’ère secondaire).
Quels sols trouvent-on en Champagne ?
- La Côte des Blancs, la Côte de Sézanne et le vignoble de Vitry-le-François et de Montgueux reposent sur la craie affleurante.
- La Montagne de Reims sur craie recouverte en profondeur.
- La Vallée de la Marne (à l’ouest de Châtillon-sur-Marne) et les petits massifs autour de Reims (Saint-Thierry, Vallée de l’Ardre et Montagne ouest) sont à tendance marneuse, argileuse ou sableuse.
- La Côte des Bar (Bar-sur-Aube et Bar-sur-Seine) est essentiellement constituée de marnes.
Grandes marques et grandes maisons de Champagne
Les quatorze premières marques internationales trustent le négoce. Elles vendent à un prix moyen au-dessus de 20 € et représentent des volumes significatifs (114 millions de bouteilles et la moitié du chiffre d’affaires global du champagne). La Champagne recense 16 500 exploitants cultivant près de 90 % de la surface plantée alors que les quelques 360 maisons de Champagne ne possèdent que 10 % du vignoble mais réalisent presque 70 % des ventes de champagne. Est-il utile de rappeler qu’il faut environ 1,2 kg de raisin pour produire les 75 cl d’une bouteille de champagne (le prix du raisin représentant environ 75 % du coût total de cette bouteille).
L’importance des contrats d’approvisionnements. Il est donc impératif que ces maisons entretiennent avec les vignerons des relations permanentes et équilibrées pour s’assurer d’un approvisionnement suffisant en raisin grâce notamment à de solides contrats d’approvisionnement*. Le but est de faire face à la demande des marchés et en particulier celui de l’export qui peut se monter jusqu’à 88 %. Alors, des contrats d’approvisionnement se négocient périodiquement entre le Syndicat Général des Vignerons et l’Union des Maisons de Champagne. A partir d’une sélection de cépages et de crus, une Maison achète des raisins et des moûts auprès de vignerons dans le cadre de partenariats durables. Ces approvisionnements sont le plus souvent complétés par la récolte du domaine viticole de la Maison.
Une centaine de Grandes Maisons. Il faut savoir que ces maisons de champagne, même celles qui possèdent et exploitent des vignes, sont des entreprises dont l’activité principale est d’élaborer et de commercialiser du champagne. Elles choisissent leurs raisins parmi les divers crus de l’appellation pour ensuite les vinifier séparément puis les assembler selon des règles et des traditions propres à chaque maison. La Champagne compte une centaine de grandes maisons. Certaines ont plusieurs siècles d’existence, comme la maison Louis Roederer qui remonte au XVIIIe siècle. Elle est d’ailleurs encore dirigée par un descendant de la famille. Certaines sont propriétaires de vignobles ; d’autres s’approvisionnent chez les viticulteurs. Certaines ne commercialisent que les champagnes de leur marque ; d’autres élaborent des cuvées pour le compte de clients extérieurs à la Champagne, etc.
Top 5 des grands groupes en 2021 (cotés en bourse)
Les deux tiers du chiffre d’affaires 2019 ont été réalisés par de grandes Maisons (5 Groupes) dont le chiffre d’affaires « Champagne » a dépassé 150 millions d’€.
Moët & Chandon, Dom Pérignon, Mercier, Ruinart, Veuve Clicquot, Krug (Vintage Brut). Cet ensemble qui appartient à LVMH* est regroupé sous l’entité MHCS (Moët Hennessy Champagne Services) dont le siège social est Avenue de Champagne à Epernay. Berta de Pablos-Barbier a succédé fin janvier 2021 à Stéphane Baschiera. Elle a été nommée à la tête Moët & Chandon, Dom Pérignon et Mercier par Philippe Schaus, PDG de Moët Hennessy. Berta de Pablos-Barbier, 52 ans, a notamment travaillé en France et aux États-Unis pour le groupe américain d’agro-alimentaire Mars.
*LVMH, numéro un mondial du champagne, ne communique pas sur les volumes vendus par ses maisons (Dom Pérignon, Moët & Chandon, Mercier, Krug, Ruinart, Veuve Clicquot), mais sa division englobant les vins, spiritueux et champagnes a totalisé 5,5 milliards d’€ de chiffre d’affaires en 2019 pour production 2019 estimée à près de 65 millions de bouteilles.
Vranken-Pommery Monopole : Vranken-Pommery Monopole est le deuxième groupe de vins de Champagne avec les marques de champagne Vranken et ses cuvées Diamant et Demoiselle, Pommery et ses cuvées Louise et POP, Charles Lafitte, Heidsieck & Cⁱᵉ Monopole ; Bissinger & C° (sans compter les Sparkling Wines : Louis Pommery California, Louis Pommery England). Le chiffre d’affaires consolidé de Vranken-Pommery Monopole s’établit à 244 millions d’€ sur l’exercice 2020, en retrait de 11,1%. Le président du conseil d’administration de la société Vranken-Pommery Monopole est Paul-Francois Vranken.
Lanson-BCC regroupe Champagne Lanson, fondé en 1760, Reims, titulaire du Royal Warrant depuis la Reine Victoria. Champagne vendu à 80% à l’international ; Champagne Chanoine Frères, fondé en 1730, Reims. Champagne vendu principalement à la grande distribution européenne. La Maison est surtout connue pour sa Cuvée Tsarine ; Champagne Boizel, fondé en 1834, Epernay. Champagne diffusé via la vente à distance en France et dans les secteurs traditionnels à l’international ; Champagne De Venoge, fondé en 1837, Epernay. Champagne vendu en distribution sélective, en particulier ses gammes, Cordon bleu, Princes et sa grande Cuvée Louis XV ; Champagne Besserat de Bellefon, Maison fondée en 1843, Epernay. Champagne distribué en réseaux traditionnels (restauration, cavistes), producteur de la Cuvée des Moines ; Champagne Philipponnat, fondé en 1910, Mareuil sur Aÿ, propriétaire du Clos des Goisses. Champagne vendu en distribution sélective et à l’international ; Maison Burtin, Epernay, fournisseur de la grande distribution européenne en marques de distributeurs et également producteur du Champagne Alfred Rothschild ; Champagne Alexandre Bonnet, Les Riceys, propriétaire d’un vaste vignoble et dont les vins sont commercialisés en secteurs traditionnels, également producteur de Rosé des Riceys. Le chiffre d’affaires 2019 s’élevait à 250 millions d’€ contre 277 millions d’€ en 2018 (-9,8 %). Bruno Paillard est le Président Directeur Général et Administrateur de Lanson-BCC.
Groupe Laurent-Perrier. Laurent-Perrier est l’un des rares groupes familiaux de maisons de champagne cotés en Bourse, qui soit dédié exclusivement au champagne et focalisé sur le haut de gamme. Il dispose d’un large portefeuille de produits renommés pour leur qualité, autour des marques Laurent-Perrier, Salon (Le Mesnil)*, Delamotte et Champagne de Castellane. Chiffre d’affaire Champagne du groupe : 234,1 millions d’€ (2018-2019) et 231,3 millions d’€ (2019-2020) soit -1,2%. Stéphane Dalyac est le président du Directoire.
*Salon Champagne Brut Blanc de Blancs Le Mesnil. Champagne atypique, Champagne exceptionnel ! Un seul terroir, la Côte des Blancs, un seul cru, le Mesnil-sur-Oger, un seul cépage, le chardonnay, une seule année (toutes les grandes années millésimées) et pas d’assemblage. Cette règle perdure depuis plus d’un siècle.
Martell Mumm Perrier-Jouët (groupe Pernod Ricard). Fondée en 2005, Martell Mumm Perrier-Jouët est la filiale Cognac et Champagne de prestige de Pernod Ricard, numéro 2 mondial sur le marché des vins et spiritueux.Le champagne Perrier-Jouët (Belle Epoque) est la 3e cuvée de prestige dans le monde. Mumm est la première Maison de Champagne internationale en France et la 3e dans le monde. La cuvée Mumm Cordon Rouge est reconnaissable à son ruban rouge. Mumm et Perrier-Jouët ont vendu près de 15 millions de bouteilles en 2019. César Giron est le PDG de Martell Mumm Perrier‐Jouët (MMPJ), la division cognac et champagne du groupe Pernod-Ricard. Il est le petit-fils de Paul Ricard.
Les dix plus grandes marques de Champagne (production estimée)
- Moët & Chandon (LVMH) : 35 millions de bouteilles
- Veuve Clicquot (LVMH) : 17 millions de bouteilles
- Nicolas Feuillatte : 10 millions de bouteilles ( Coopérative : Centre Vinicole de Champagne, première union de producteurs de Champagne).
- Mumm (Pernod-Ricard) : 8 millions de bouteilles
- Laurent Perrier : 7,5 millions de bouteilles
- Taittinger* : 7 millions de bouteilles.
- Piper-Heidsieck (EPI) : 5 millions de bouteilles. EPI (Entreprise Patrimoniale d’Investissements) groupe de luxe français contrôlé par la famille Descours
- Pommery (Vranken-Pommery Monopole) : 5 millions de bouteilles
- Lanson (Lanson-BCC) : 4,5 millions de bouteilles
- Mercier (LVMH) : 4,5 millions de bouteilles
* Pierre-Emmanuel Taittinger qui avait repris en 2007 la maison familiale avec la caisse régionale nord-est du Crédit agricole a délégué à ses 65 ans, la présidence du Champagne Taittinger à sa fille, Vitalie Taittinger.
Les autres grandes maisons (ou groupes) de Champagne
Plus du tiers du chiffre d’affaires est réalisé par une vingtaine de groupes (ou maisons) dont le chiffre d’affaires se situe entre 10 et 150 millions d’€. Ces maisons (ou groupe) de Champagne, de structure souvent familiale, ont prestige et très grande notoriété. Ce sont en général des PME ou ETI (Entreprise de Taille Intermédiaire).
- Louis Roederer + Champagne Deutz,
- Champagne Taittinger + Champagne Irroy,
- Champagne Bollinger + Champagne Ayala,
- Champagne Piper Heidsieck + Champagne Charles Heidsieck ,
- Champagne Thienot + Champagne Canard-Duchêne + Champagne Joseph Perrier + Champagne Marie Stuart,
- Champagne N. Gueusquin,
- Champagne Martel + Champagne Charles de Cazanove
- Champagne Billecart-Salmon,
- Champagne Pol Roger,
- Champagne Malard,
- Champagne Gosset,
- Champagne Henriot,
- Champagne Mansard Baillet,
- Champagne Duval Leroy,
- Champagne Barons de Rothschild,
- Champagne Lallier
- Champagne Charles Mignon.
- Champagne Gardet
Les plus petites Maisons de Champagne (Classement ci-dessous alphabétique)
Environ 5 % du chiffre d’affaires est réalisé par une trentaine de plus petites Maisons. Elles bénéficient le plus souvent d’un approvisionnement provenant principalement de leurs vignobles ou de leur famille. La grande majorité sont des maisons familiales.
- Champagne Alfred Gratien (Epernay)
- Champagne AR Lenoble (Damery)
- Champagne Brice Bruno (Bouzy)
- Champagne Paillard (Reims)
- Champagne Cattier (Chigny-les-Roses)
- Champagne Chaudron (Verzenay)
- Champagne Comtes de Dampierre (Bouzy)
- Champagne Cristian Senez (Fontette, Aube)
- Champagne Cuperly (Verzy)
- Champagne Edouard Brun & C (Aÿ)
- Champagne Eugène Ralle (Verzenay)
- Champagne Gremillet (Balnot sur Laignes)
- Champagne Henri Abelé (Reims)
- Champagne Henri Giraud (Aÿ)
- Champagne J. de Telmont (Damery)
- Champagne Jacquesson (Dizy)
- Champagne Jacquinot & Fils (Colombé-le-Sec, Côte des Bar)
- Champagne Janisson & Fils (Verzenay)
- Leclerc Briant (Cumières)
- Champagne Lombard (Epernay)
- Champagne Massing (Avize)
- Champagne Louis de Sacy (Verzy)
- Champagne Moutard Diligent (Buxeuil)
- Champagne Pierre Mignon (Breuil)
- Champagne Soutiran Veuve (Ambonnay)
- Champagne Cheurlin (Celles-sur-Ource)
Histoire du Champagne, l’apport de Dom Pérignon et protection de l’appellation Champagne dans le monde
La culture de la vigne remonte en Champagne à l’époque gallo-romaine. Jusqu’au XVIIe siècle, on appréciait ces vins gris faiblement colorés mais qui vieillissaient mal en fûts. Pour en conserver les arômes, ils étaient mis en bouteilles très tôt. Il en résulta que ces vins ayant peu d’alcool et dont le tirage était fait à l’équinoxe de printemps devinrent naturellement pétillants. Les vignerons les appelaient Vin du diable ou saute-bouchon à cause des bouteilles qui explosaient ou des bouchons qui sautaient.
L’apport de Dom Pérignon. Dom Pierre Pérignon a le titre flatteur d’inventeur du Champagne… Une légende ! Son véritable titre fut d’être procureur cellérier à l’abbaye bénédictine de Hautvillers à quelques kilomètres d’Epernay. Ses dates de naissance et de mort (hasard incroyable !) coïncident avec celles de Louis XIV (1638-1715). Mais ce monarque absolu, ironie de l’histoire se voit priver de Champagne (tranquille alors) par prescription médicale. Pour le Roi Soleil, un seul vin, le Bourgogne rouge (pour lutter contre les flatulences de la trippe royale) !
Un grand œnologue avant l’heure. Lorsque Dom Pérignon arrive à Hautvillers, il trouve dans ses attributions de cellérier, la gestion en raisins d’une dizaine d’hectares de vigne, fruit de la dîme des seigneuries d’Aÿ et d’Avenay. Grand œnologue avant l’heure, il n’invente ni le dégorgeage, ni le sucrage, ni la prise de mousse, ni même le bouchon de liège, ce que lui prête allègrement (terme qui convient parfaitement au Champagne) la légende. Mais c’est un goûteur hors pair. Il sait presque par instinct sélectionner les vendanges. Ecoutons d’ailleurs ce qu’en dit un certain Bouillon, bénédictin lui aussi qui écrit en 1778 à son sujet : une délicatesse de goût si singulière qu’il discernait, sans s’y méprendre, en goûtant un raisin, le canton qui l’avait produit.
Le legs de Dom Pérignon. Lors de sa brillante carrière de vinificateur, il va sélectionner les bons cépages en éliminant notamment le pinot beurot (le fromenteau) qui a pour inconvénient de donner au vin cette couleur jaune jusqu’à l’orangée, une teinte pas du tout appréciée à l’époque. Pour Dom Pérignon, il faut un vin clair comme larme d’œil que seul apporte le jus de pinot noir aussitôt débarrassé de sa peau après pressurage. Il édictera ainsi quelques règles qui deviendront de grands classiques en Champagne :
- Vendanger tôt le matin des raisins froids et tout humides de rosée
- Conserver les grains intacts pour préserver intégralement les arômes
- Séparer les jus de chaque presse en écartant les plus acides. Le pressurage rapide et fractionné des raisins noirs majoritaires en Champagne pour en extraire un jus blanc.
- Assembler le jus de différentes parcelles. L’assemblage de raisins provenant de terroirs différents pour marier leurs qualités
- Opérer une fermentation très lente pour que subsistent un maximum de sucres résiduels
- Recommander la Fermentation en tonneaux qui sont stockés dans des caves dont il commande le creusement dans la craie dès 1673 afin d’obtenir une température constante
- Utiliser du verre anglais pour la mise en bouteille après 1680. Il est plus solide et plus résistant. Il va modifier la forme de la bouteille pour augmenter la surface (fond creusé) et l’épaisseur, afin de limiter la casse
- Boucher les bouteilles au clavelot* de cuir vers 1700, puis au bouchon de liège ligaturé au fil de chanvre puis d’étain afin de contenir la mousse.
* Bouchon de bois entouré d’étoupe suiffée. Il servait à boucher les bouteilles de verre (ou de grès). Ce mode de bouchage n’était pas étanche, aussi les bouteilles étaient stockées verticalement pour une garde de courte durée.
- S’assurer une mise en bouteille en mars, moment idéal lors d’une légère reprise de fermentation du sucre résiduel.
Sur sa pierre tombale à l’entrée du chœur de l’église abbatiale d’Hautvillers, il est gravé ces mots : Ci-gît Dom Pérignon, pendant quarante-sept ans cellérier dans ce monastère, son administration des affaires familières lui mérita les plus grands éloges, recommandable par ses vertus et plein d’amour paternel pour les pauvres. Il s’en fut dans sa soixante-dix septième année, l’année 1715. Qu’il repose en paix, Amen.
Post-scriptum : alors que la naissance du Champagne coïncide avec l’émergence des grands crus bordelais entre le XVIIe et XVIIIe siècle, il faudra attendre la Régence et la mode des petits soupers fins et… galants pour jouer au saute-bouchon et arroser de mousse les épaules dénudées des dames. Un détournement en vin qui a dû se faire retourner notre moine cellérier dans sa tombe !
Après Dom Pérignon, tout s’accélère. Le champagne lui doit ainsi l’une de ses règles d’or : les assemblages de raisins. Il pratiqua avec talent les soutirages et les collages, réussissant à stabiliser les vins et à garder leur mousse. Ensuite, tout s’accélère avec la fondation des grandes maisons :
1729 : Ruinart / 1743 : Moët /1772 : Clicquot / 1776 : Roederer / 1785 : Heidsieck. Puis au XIXe siècle : Henriot / Perrier-Jouët / Laurent-Perrier / Bollinger / Deutz / Pommery /Krug, etc.
Les grandes étapes vers le Champagne « moderne » ou l’apport de Madame Clicquot. Madame Clicquot marqua au XIXe siècle l’histoire du Champagne. Madame Clicquot (veuve Clicquot) est née en 1777 Nicole Ponsardin. Elle deviendra l’une des plus grandes figures du champagne, est. Elle épouse François Clicquot banquier et négociant en vins à Reims. Lors du décès de son époux en 1805, cette jeune veuve de 27 ans, décide de poursuivre l’œuvre de son mari. Femme de vision, elle est à l’origine du prestige et du succès de la Maison qui prendra en 1810 le nom de Veuve Clicquot Ponsardin. Infatigable, elle prospecte les marchés étrangers, bravant le blocus maritime anglais. Après le traité de Tilsitt en 1807, elle fournit en champagne la riche clientèle russe. Elle en deviendra leur fournisseur principal. En quête permanente d’excellence et d’innovation, Madame Clicquot invente en 1816 la table de remuage afin d’obtenir des vins plus limpides et d’une qualité jusqu’alors inégalée. Ses contemporains la surnomment bientôt la Grande Dame de la Champagne, un hommage à son audace et de sa détermination.
Une Cuvée : La Grande Dame. Parcelle après parcelle, elle a su constituer un patrimoine viticole exceptionnel : 515 ha au cœur des plus grands crus de la Champagne. À sa mort en 1866, la Maison commercialise 750 000 bouteilles. Pour lui rendre hommage, une cuvée d’exception, présentée en 1972, année du bicentenaire de la maison, La Grande Dame perpétue sa mémoire.
L’assemblage de La Grande Dame 2012 sous la férule de Didier Mariotti*, Chef de caves de Veuve Clicquot se compose principalement de raisins issus des vignobles Grands Crus historiques, comptant parmi les plus prestigieux de Champagne. Le Pinot noir prédomine à 90% dans l’assemblage magnifié par 10% de Chardonnay, avec des raisins provenant d’Aÿ, Verzenay, Verzy, Ambonnay, Bouzy. Les 10% de Chardonnay proviennent des vignobles Grands Crus d’Avize et Mesnil-sur-Oger.
* Didier Mariotti est le 11ème Chef de Caves de Veuve Clicquot Ponsardin.
Ces dates qui marquèrent l’histoire du Champagne
- 1804 : premier Champagne Rosé lancé par Mme Clicquot
- 1844 : le premier jugement pour la protection de l’appellation Champagne (contre le Vouvray) : en livrant au commerce une certaine quantité de vins de Touraine sous le nom usurpé de vin de Champagne, en les faisant notamment passer pour du vin d’Ay et de Verzy, ont occasionné … un grave préjudice.
- 1860 : premières étiquettes collées sur les bouteilles
- 1860 : premier Brut promu par Mme Pommery. Mais il faut attendre…
- 1870 : année de défaite, pour voir apparaître les premiers Champagne Millésimés.
- .1889 : création d’un Laurent-Perrier’s sans sucre, un champagne lancé à Londres en 1889 par Mathilde-Emilie, veuve Perrier. Viendront ensuite ces champagnes non Dosés : extra brut, ultra Brut, brut nature, brut zéro.
- 1898 : première association du vignoble (producteur du raisin) et du négoce (acheteur de raisin, élaborateur et commercialisateur) pour lutter contre le phylloxera.
- 1927 : la délimitation de la Champagne viticole est fixée par la loi. Le critère retenu pour le droit à l’appellation fut l’antériorité viticole des terrains.
- 1936 : reconnaissance de l’Appellation d’Origine Contrôlée (AOC) Champagne
- 1941 : Création du Comité interprofessionnel du vin de Champagne (Comité Champagne) avec un nombre égal de représentants des vignerons et des maisons.
- 2010 : cahier des charges de l’appellation Champagne
- 2009/2013/2014/ 2013 : Aujourd’hui, l’ensemble des pays de l’Union européenne et de nombreux autres pays (Corée du sud, Colombie, etc.) accordent à l’appellation Champagne une protection qui s’étend à tous types de produits et de services : la Chine (2009), le Brésil (2013), le Canada (2014).
- 2019 : Singapour, le Cambodge, le Laos, la Turquie, le Canada, l’Equateur, le Vietnam et Haïti figurent parmi les 121 pays où l’appellation est protégée.
- 2020 : le Paraguay. Dans une décision du 29 octobre 2020, la Direction Nationale de la Propriété Intellectuelle du Paraguay a officiellement enregistré l’appellation Champagne.
Il reste encore quelques récalcitrants comme les Etats-Unis d’Amérique et la Russie.
Les Mentions sur une étiquette de Champagne. Que signifient RC, RM, SR, ND, MA, CM ?
Comment bien décrypter les mentions qui apparaissent sur l’étiquette d’une bouteille de Champagne ?
- L’appellation Champagne en gros caractères,
- La teneur en sucre ou dosage (teneur en sucre résiduel qui détermine le type de vin) : Extra-Brut, Brut, Extra-Dry, Sec, Demi-Sec et Doux. Mais aussi : Brut Nature, Ultra Brut, Dosage Zéro, Non Dosé. Ce sont des champagnes dont la teneur en sucre est inférieure à 0,2 g/l. Cette catégorie comprend les champagnes les plus secs, certains sans sucre, caractérisés par une acidité très prononcée.
- La marque
- Le millésime (si la récolte est suffisamment homogène et de qualité)ou particularité de la cuvée (Blanc de Blancs, Rosé, Blanc de Noirs, etc.),
- La mention Grand Cru ou Premier Cru
- Le titre alcoométrique volumique (% vol.) et le volume nominal (en l, cl ou ml),
- Le nom ou la raison sociale de l’élaborateur, le nom de la commune de son siège social (+ le nom de la commune où le vin est élaboré si différent du siège social),
- Le numéro d’immatriculation professionnelle délivré par le Comité Champagne précédé des initiales qui renseignent sur la catégorie professionnelle de l’élaborateur : NM : c’est une bouteille mise sur le marché par un Négociant Manipulant. Cette mention est réservée à une trentaine de grandes marques et aux négociants. RC et RM : Récoltant Coopérateur manipulant ou, plus nombreux encore, Récoltant Manipulant. Il s’agit de vignerons qui vinifient et commercialisent leurs vins avec ou sans l’aide d’une coopérative. CM : Coopérative de Manipulation. Elle vinifie les raisins de ses adhérents et élève leurs vins. MA : Marque d’Acheteur. Il s’agit ici d’une marque secondaire qui permet à un négociant de commercialiser des cuvées plus ordinaires à la demande souvent de la grande distribution. ND : Négociant-Distributeur. Il achète des vins en cours d’élevage (dits « sur lattes ») et les revend sous diverses étiquettes. SR : Société de Récoltants. Association de vignerons.
- L’identification du lot : cette mention peut être portée directement sur la bouteille)
- La mention des allergènes : anhydride sulfureux, sulfites ou dioxyde de soufre…
- La mention « grossesse » : la consommation de boissons alcoolisées pendant la grossesse, même en faible quantité, peut avoir des conséquences graves sur la santé de l’enfant ou le logo (cette mention n’est obligatoire que sur certains marchés),
- Le logo « point vert » pour l’élaborateur qui a souscrit un contrat pour la récupération des emballages avec une société agréée,
- Des informations sur les cépages, la date de dégorgement, les caractéristiques sensorielles, des associations mets et vins, etc.
La Champagne au patrimoine mondial de l’Unesco
La Champagne au patrimoine mondial de l’Unesco. Le 4 juillet 2015 étaient inscrits officiellement sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Unesco dans la catégorie Paysage culturel, trois sites de la Champagne :
1/L’Avenue de Champagne à Epernay ;
2/La colline Saint-Nicaise à Reims dont le sous-sol recèle d’immenses crayères (extraction de la craie) utilisées de l’époque gallo-romaine à l’époque médiévale utilisées comme espace de vinification et de stockage ;
3/Les coteaux historiques autour d’Epernay de Cumières à Mareuil-sur-Aÿ dont le village d’Hautvillers.
Trois ensembles qui reflètent d’après l’Unesco la totalité du processus de production de champagne. Cette reconnaissance universelle sous le label Unesco couvre les bâtiments à la fois démonstratifs et fonctionnels élevés par les Maisons de Champagne sur la colline Saint-Nicaise à Reims et le long de l’avenue de Champagne à Epernay ainsi que les très spectaculaires réseaux de caves et crayères de ces trois sites. La plupart des grandes maisons sont concernées (Ruinart, Pommery, Veuve-Clicquot, Charles Heidsieck, Taittinger…).
Déjà 9 sites viticoles inscrits au patrimoine mondial. Il existe dans le monde 1121 sites répertoriés au patrimoine mondial par l’Unesco. La France en compte 76. Elle se situe derrière l’Espagne (79), la Chine (53) et surtout l’Italie (128), record mondial absolu. Mais seuls, 9 sites viticoles sont aujourd’hui inscrits au patrimoine mondial :
En Italie
- Les collines accidentées du Prosecco de Conegliano et Valdobbiadene dans la région de Venise
- Langhe-Roero et Monferrato célèbres collines au sud de Turin, dans le Piémont (le tout premier paysage viticole transalpin qui a été reconnu par l’Unesco) avec des vins mondialement connus comme le Barolo, le Barbaresco, l’Asti spumante ou encore le Barbera d’Asti.
En France. Avec trois sites inscrits dont la Champagne, la France est aujourd’hui le pays bénéficiant du plus grand nombre de paysages au patrimoine mondial.
- Les villages de la Juridiction de Saint-Émilion. Célèbre vignoble bordelais, le tout premier paysage viticole à obtenir une protection de la part de l’Unesco dès 1999
- Les Climats du vignoble de Bourgogne. La même année que la Champagne, les climats en Bourgogne sont également reconnus. Pour la première fois, le caractère insolite et spécifique de ses parcelles qui se différencient de leurs voisines par leur terre, leur histoire, leur sol et leur microclimat est reconnu : les Climats expriment le fait culturel unique par lequel une communauté humaine a choisi la référence au lieu (un Climat) et au temps (le millésime) comme marqueur de la qualité et de la diversité d’un produit hautement reconnu« .
Au Portugal
- L’île du Pico (Açores). C’est sans doute le paysage viticole le plus insolite de la planète. Sur l’une des neuf îles volcaniques de l’archipel des Açores, perdu en plein milieu de l’Océan Atlantique-Nord, les hommes ont organisé la conduite de la vigne en construisant de longs murs qui remontent vers l’intérieur des terres. Les parcelles sont collées les unes à côté des autres, à l’abri du vent. Un panorama stupéfiant inscrit à l’Unesco dès 2014
- Le Haut-Douro. La vallée du Douro, berceau de la production du Porto depuis le XVIIIe siècle, la région est façonnée par les flots de ce fleuve et de ses affluents : Varosa, Corgo, Távora, Torto et Pinhão. Ici, on découvre des vignes plantées en terrasses, étalées sur une superficie de 24.600 ha.
En Suisse
- Lavaux : un paysage à couper le souffle ! Des vignes cultivées en terrasses abruptes donnant sur le lac Léman. 30 km de vignobles protégés par l’Unesco et un vin qui y est produit depuis le XIe siècle. Deux appellations prestigieuses : Calamin et Dézaley à partir du chasselas, un cépage originaire d’ici.
En Hongrie
- La région viticole de Tokaj. La région de Tokaj en Hongrie est l’une des premières à avoir reçu la distinction de l’Unesco (après Saint-Emilion). Ses vins moelleux et liquoreux sont considérés parmi les plus exceptionnels du monde.
Millésimes en Champagne. Qu’est-ce qu’une année à millésime ? Tableau des grands millésimes
Maxime Toubart, actuel président du SGV (Syndicat général des vignerons de Champagne) en a dressé le cadre : un vigneron dit-il crée un millésimé pour le conserver. Ce n’est pas simple, il faut mesurer la capacité du vin à prendre de l’âge sans perdre son goût. Il doit avoir les épaules nécessaires à une longue vie. Ces 3 dernières années, après un 2017 très moyen*, 2018, 2019, 2020 (malgré la crise), explosent. La chance enfin était au rendez-vous. Ce fut un défilé de trois années exceptionnelles et en conséquence, un potentiel de 3 très grands millésimes. Mais patience ! Il faut compter de 2 à 3 ans pour les cuvées non millésimées, entre 4 et 10 ans pour la plupart des millésimes. Donc, attendre à l’aube des années 2030 pour pouvoir les déboucher.
* Mais pas partout en Champagne, 2017 fut une année exceptionnelle dans la Côte des Bar.
Naissance d’un millésime. Fait rare dans le paysage viticole français, plus de 85 % des champagnes sont sans année ! Le secret du champagne repose sur l’assemblage : un assemblage de terroirs, de cépages et d’années. Ainsi, la vendange qui sert de base peut être compléter par des vins de réserve conservés d’une année sur l’autre. L’idée est la prééminence et quelle que soit l’année, d’un goût constant, la véritable signature d’un champagne sans année d’une Maison. Et si l’année est exceptionnelle en termes de climat et de maturité, alors inutile d’aller piocher dans les vins de réserve. On va élaborer un champagne qui sera l’exact reflet du millésime de sa récolte. La décision de mettre à part un millésime spécifique appartient à chaque domaine précise Vincent Perrin, directeur général du Comité Champagne depuis 2015 (il vient de passer le relais à son adjoint, Charles Goemaere).
Changement climatique et inflation des millésimes. Y-aurait-il une corrélation entre le changement climatique et millésimes ? Une suite d’années exceptionnelles qui finissent la plupart en cuvées exceptionnelles ! Aujourd’hui, la Champagne a atteint le niveau de température qu’avait Bordeaux, il y a soixante ans. Donc, des raisins plus mûrs ce qui induit en toute logique de futurs grands millésimes. Mais rien n’est simple en Champagne. Le millésime doit surtout posséder une identité, une personnalité qui lui est propre. Chaque millésime va donc raconter son histoire, une histoire de météo évidemment qui joue souvent les imprévisibles. Un florilège de millésimes que se remémorent les chefs de caves : 1996, 2004, 2015 où contre toute attente… Et puis, il y a des années comme 2002 qui sans surprise, sont des années destinées à être de très grands millésimes.
1811, passage de la comète et premier millésime du Champagne. Il se dit que la toute première mention du millésime en Champagne remonterait à 1802. Mais c’est sans aucun doute, 1811 qui acte la naissance des champagnes millésimés avec les toutes premières bouteilles identifiées par une vignette. Elle porte la mention Vin 1811 de la comète (étiquettes réalisées à la main) et premières étiquettes de la Champagne. Cet usage ne se généralisera que quarante ans plus tard.
La comète et la Veuve. Après trois années épouvantables (1805, 1808 et 1809), la vendange 1811, commencée en septembre (un gage de réussite), est une bénédiction « tombée » du ciel. La production est exceptionnelle. C’est l’année de la comète. Elle sera visible pendant 17 mois. On est à l’apothéose de l’Empire et au début de son déclin à l’image de ce corps céleste qui va disparaitre de la vue des hommes. Un an plus tard, Napoléon pénètre en Russie. Mais pour cette jeune veuve qui a pris la direction de l’affaire familiale en 1805, l’année de la comète sera sa chance. Madame Clicquot va inventer le vin de la Comète. Pour son champagne, c’est le début de la gloire. Ce passage d’une comète qui marqua tant les esprits, sera afficher jusque sur les bouchons des bouteilles produites cette année-là. Dès 1814, Madame Clicquot réussit à expédier ses vins vers la Russie. Elle offrit du Champagne aux gardes Prussiens qui assuraient le blocus. Ce sont eux qui, en ouvrant les bouteilles avec leurs épées, lancèrent la technique du sabrage. En Russie, ses expéditions ne cessèrent de progresser pour atteindre 280 000 bouteilles en 1821. Depuis, le Champagne Veuve Clicquot au firmament de la réussite, rend hommage à la comète.
Millésime 2006 : la Cuvée Hemera de la Maison Henriot
Le tableau des millésimes. Ce tableau des millésimes de 1926 à 2020 reflète la moyenne des millésimes des vins de l’appellation Champagne (une moyenne effectuée sur l’ensemble des vins de l’appellation).
Millésimes médiocres : 1927/1930/1931/1932/1936/1939/1940/1944/1951/1956/1957/1963/1965/1967/1968/1972/1974/1977/1980/1984
Millésimes moyens : 1935/1938/1941/1946/1948/1958/1981/1991/2001/2010
Bons millésimes : 1993
Très bons millésimes :1960/1978/1987/1992/1994/2007/2013
Excellents millésimes : 1943/1952/1953/1961/1962/1966/1970/1973/1979/1982/1985/1989/2005/2008
Grands millésimes :1926/1954/1976/1986/1997/1998/2006/2009/2012
Très grands millésimes : 1933/1942/1950/1969/1971/1983/1988/1995/1999/2000/2003/2011
Millésimes exceptionnels : 1928/1929/1934/1937/1945/1947/1949/1955/1964/1996/2004/2018
Millésimes les plus exceptionnels : 1945/1959/1975/1978/1982/1988/1989/1990/2002/2008/2009/2012/1015/2019/2020
Règlementation, les 6 règles de base et taille de la vigne en Champagne
Mais d’abord, le Champagne a établi 6 règles principales :
- Emploi des cépages suivants : chardonnay, pinot noir, pinot meunier (voir plus haut les cépages secondaires autorisés) ;
- Taille vigoureuse ;
- Rendement maximum en raisins à l’hectare (en kg/ha) décidé chaque année par l’Interprofession (voir plus haut) ;
- Rendement maximum au pressurage de 102 litres pour 160 kilos de raisins ;
- Degré minimum fixé chaque année ;
- Conservation en bouteille pendant 15 mois minimum avant expédition, 36 mois pour les millésimes.
Les 4 types de taille sont autorisés en Champagne
- La taille Chablis : taille courte sur charpente longue ;
- La taille Cordon de Royat : taille courte sur charpente longue unique ;
- La taille Guyot : taille longue sur charpente courte, qui peut être simple, double ou asymétrique ;
- La taille Vallée de la Marne (seulement pour le meunier) : taille longue sur charpente courte (un courson à 3 yeux francs maximum par pied ; une baguette lancée sur le courson de l’année précédente et portant 9 yeux francs maximum ; un prolongement (à fruits) établi à l’extrémité de la baguette de l’année précédente et portant 6 yeux francs maximum).
Taille tôt, Taille tard, rien ne vaut la taille de mars. Les coupes effectuées pendant les pleurs retarderont la végétation de 8 ou 15 jours, ce qui pourra préserver les bourgeons des premières gelées souvent fatales (les pleurs car au printemps, lorsque la température du sol augmente, la vigne reprend son activité : elle se manifeste par la remontée de la sève et par les pleurs de la vigne. Il apparaît des gouttes de sève au niveau des plaies de tailles.
Top 30 des marques de champagne les plus admirées au monde en 2020
(The World’s Most Admired Champagne Brands 2020)
Louis Roederer est en 2020 : The World’s Most Admired Champagne Brands 2020. En haut des 3 premières marches du podium : Roederer, Charles-Heidsieck et Pol Roger*. Ils sont en 2020, les 3 marques The World’s Most Admired Champagne Brands qui caracolent en tête de ce 7e classement. Le magazine Drinks International fondée en 1972, (le seul magazine consacré exclusivement au marché mondial des spiritueux, des vins et des bière) a donc désigné Louis Roederer comme la marque de champagne la plus admirée au monde en 2020. Ce classement annuel des 30 premières marques de Champagne s’est fait en fonction des votes des meilleurs experts mondiaux du vin. A noter la collaboration de l’un des plus grands experts en vin, Giles Fallowfield. Il est journaliste et grand spécialiste du champagne. Il écrit dans Decanter, Harpers, The Times, The Financial Times et The Drinks Business.
* Pol Roger est en troisième position cette année. Il était n°1 en 2019. Rien de très nouveau puisque depuis la naissance de ce classement, ces trois marques ont toujours caracolé en tête.
L’Académie internationale des experts en vins de Drinks International compte désormais plus de 300 membres* associés au vote pour désigner les marques de champagne les plus admirées. Ce choix se fait en fonction de la cohérence et/ou de l’amélioration de la qualité de la marque mais également du marketing et de l’emballage, de la communication.
*Ils sont tous issus soit du commerce du vin, y compris des acheteurs et des importateurs mais aussi des professionnels du vin, ses sommeliers, des Master of Wine, des journalistes et des professeurs d’oenologie.
Classement 2020 des 30 marques de Champagne les plus admirées au monde
- Louis Roederer*
- Charles Heidsieck
- Pol Roger
- Bollinger
- Krug
- Ruinart
- Billecart-Salmon
- Dom Pérignon
- Taittinger
- Henriot
- Jacquesson
- Laurent-Perrier–
- Deutz
- Salon
- Veuve Clicquot Ponsardin
- Henri Giraud (Aÿ)
- Gosset
- Castelnau
- Alfred Gratien
- Bruno Paillard
- Veuve-Fourny
- Perrier-Jouët
- Le Mesnil
- Palmer & Co
- Piper Heidsieck
- Alain Thienot
- G.H. Mumm
- Moët & Chandon
- Lanson
- Pommery
*Le plus célèbre des vins de la Maison de Champagne Louis Roederer naît en 1876 pour satisfaire le goût exigeant du Tsar Alexandre II. L’empereur demande à Louis Roederer que lui soit réservée chaque année la meilleure cuvée de la Maison. Pour accentuer sa singularité, ce champagne sera conditionné en bouteille de cristal à fond plat. Il portera dès lors le nom de ce précieux matériau.
Top 15 des grandes fortunes du Champagne
2020, année noire pour le Champagne ! Maxime Toubart, président du SGV Champagne relevait en septembre dernier l’inquiétude des champenois. Confinement, fermeture des bars et des restaurants, fermeture des frontières ont lourdement pesé sur les ventes. Dès mars, les expéditions ont plongé de 21,9 % ; en avril – 68% et en mai, – 56%. En juillet, le recul des expéditions enregistraient encore – 24,9 %. Et même en France, la crise a entrainé la baisse des ventes à l’instar de l’international.
- Bernard Arnault PDG de LVMH (les champagnes Moët & Chandon, Krug, Veuve Clicquot, Ruinart, Mercier, Dom Pérignon)
- Alexandre Ricard & famille (les champagnes Mumm, Perrier-Jouët)
- Gilles Hennessy et familles Hennessy (Champagne Moët & Chandon), maison cédée à LVMH. Gilles est plus important actionnaire individuel de LVMH.
- Christopher Descours et sa famille (les champagnes Charles Heidsieck et Piper-Heidsieck),
- Frédéric Rouzaud et sa famille (les champagnes Roederer, Deutz)
- Jean-Jacques Frey et sa famille (Champagne Billecart-Salmon)
- Carol Duval-Leroy et sa famille (champagne Duval-Leroy)
- Alexandra et Stéphanie de Nonancourt et leurs familles (Champagne Laurent-Perrier)
- Famille Bollinger (les champagnes Bollinger et Ayala)
- Jean-Pierre Cointreau (champagne Gosset)
- Thomas Henriot et sa famille (champagne Henriot)
- Alain Thiénot (les champagnes Canard-Duchêne, Joseph Perrier)
- Paul-François Vranken et sa famille (les champagnes Vranken, Pommery et Heidsieck)
- Familles Pol-Roger et de Billy (champagne Pol-Roger)
- Bruno Paillard (champagne Lanson)
Verre de Champagne : flûte, coupe ou… Tout est une question de bulles
Le coeur du champagne, c’est la bulle. Ah, ces bulles ! Elles sont faites de 99 % de CO2 dissous et d’arômes sachant qu’une bouteille de 75 cl contient 5 litres de CO2. Elles naissent d’un vin parfait, le Champagne, alors que sa source de bullage est l’imperfection. Celle-ci est faite de ces microscopiques impuretés collées à la paroi du verre, souvent déposées par le torchon qui les essuie. Ce sont elles qui permettent à des molécules de dioxyde de carbone de fusionner et de former des bulles. Donc, sans ces impuretés, pas de bulles et elles sont 80 millions dans une bouteille et environ 2 millions dans une flûte. Le choix entre coupe et flûte a une influence primordiale sur la grosseur de ces bulles. On le sait, les bulles grossissent lorsqu’elles remontent dans le verre. Plus leur parcourt est long plus elles finissent grosses. Elles seront donc plus grosses dans une flûte que dans une coupe. Pour être précis, une flûte de 10 cm de haut engendrera des bulles d’un millimètre de diamètre (et une flûte de 20 à 30 cm, des bulles de 2 ou 3 mm). Pour la coupe, le dégazage est accéléré, et les bulles restent plus petites.
La coupe érotique. Mais pour les professionnels, ni la coupe ni la flûte ne leur conviennent. D’abord pour eux, exit la coupe reconnue comme trop large pour conserver les arômes du champagne. Lui resterait-il son seul côté érotique qui veut qu’elle ait été inventée en prenant pour copie, le moulage du sein gauche de la marquise de Pompadour ! Une chromatographie en phase gazeuse a pu montrer qu’une coupe perd son CO2 au moins un tiers de fois plus vite que la flûte mais pour sa défense, la coupe ne génère-t-elle pas plus de fines bulles ?
Les fines bulles. On l’a constaté, moins il y a de gaz (la concentration de CO2 est déterminée par rapport au sucre), plus les bulles sont petites et celles-ci sont plus convoitées que les grosses, question d’esthétique et d’arôme. C’est le cas d’ailleurs pour les grands Champagne millésimés. En plus, elles ont tendance à monter plus lentement. Elles n’ont heureusement pas d’incidence sur le goût mais seulement sur la texture, la sensation en bouche par la projection de leurs gouttelettes à plus grande vitesse au moment où la coupe est portée aux lèvres.
Champagne, de la flûte… au verre à vin ! Quant à la flûte, les uns disent
que par son style élancé, elle sait le mieux exhiber le champagne, que le volume de ses bulles est proportionnel à sa taille et que la hauteur de sa jambe (entre 100 et 125 mm) est la garantie de conserver une bonne température (la flûte contient entre 7 et 26,5 cl). Mais d’autres suggèrent que son étroitesse (un diamètre qui dépasse rarement les 60 mm) est un handicap car les bulles en chatouillant le nez, vont masquer les arômes. Qu’en dit alors Riedel, le premier fabricant au monde de verres à vin : pour des Champagne aériens et vifs, la flûte reste le bon outil… pour les Blancs de blancs, celle-ci doit être de grand contenant afin que le breuvage puisse s’épanouir et que pour les Champagne Blancs de noirs ou rosés, et en règle générale, d’ailleurs, pour tous les champagnes plus vineux, il est toutefois préférable si l’on veut capter au maximum les arômes d’utiliser des verres à vin.
Le verre ballon de rugby selon Andreas Larsson. Dans cette guerre à bulle, écoutons ce qu’en dit le Suédois Andreas Larsson, meilleur sommelier de Suède en 2001, meilleur sommelier d’Europe en 2004 et meilleur sommelier du monde en 2007 : le verre optimal selon lui serait une sorte de flûte au corps légèrement plus large et une ouverture étroite pour mettre en valeur le goût et les arômes. Si on le comprend bien, il faudrait un verre qui ressemble à un ballon de rugby (ouf ! La plupart des verriers ont déjà cette forme de verre à leur catalogue). Mais pas étonnant qu’un gaillard comme Andreas Larsson, taillé comme un trois-quart de rugby ait eu cette idée !
Entretien en verre et contre-tout. Le verre a un fort potentiel à accaparer les odeurs. Si on ne prend pas suffisamment garde à son entretien, elles peuvent altérer le goût du vin. Par bonheur aujourd’hui, la plupart des verres à vin peuvent passer au lave-vaisselle mais rien ne vaut de les nettoyer sous l’eau chaude du robinet sans utiliser de détergent (celui-ci peut laisser des odeurs rebelles dans le verre). Pour les sécher, il suffit de les essuyer rapidement avec un chiffon doux et non pelucheux ou tout simplement de les déposer à l’envers sur un tissu en lin.
Le vignoble Champenois et ses quatre grands secteurs de production
L’AOC Champagne c’est d’abord un vignoble composé de 4 secteurs qui regroupent 34 272 ha (4,5 % du vignoble national) et 34 500 ha en tenant compte du potentiel pouvant être planté. Ainsi, en partant des départements :
- Aisne et Seine-et-Marne : 3417 ha (10 %)
- Aube et Haute-Marne : 8106 ha (24 %)
- Marne : 22 749 ha (66 %)
Les quatre grands secteurs du vignoble champenois
1/La Montagne de Reims
La région de la Montagne de Reims s’étend de part et d’autre de la rivière Vesle et de la ville de Reims, sur trois zones de terroirs.
- Au nord-ouest de Reims, le Massif de Saint-Thierry se présente sous la forme de petits coteaux. Vers l’est, des petits cirques sablonneux produisent des champagnes légers aux arômes d’agrume. A l’ouest des vallons argilo-calcaires confèrent aux vins à base de meunier une structure plus enrobée riche d’arômes de fruits charnus.
- Au sud-ouest de Reims, la Petite Montagne de Reims et la Vallée de l’Ardre se distinguent par des coteaux découpés en cirques aux sols sablo-argileux, où dominent le meunier et le pinot noir, donnant des vins équilibrés, fruités avec une bonne tension.
- Au sud-est de Reims, la Grande Montagne de Reims se caractérise par un paysage de côte continue avec des expositions variées vers le nord, nord-ouest, nord-est, est et sud. Les sols de craie, très caillouteux, permettent un drainage naturel efficace. Le pinot noir occupe les sols argilo-crayeux bien exposés, le meunier les sols argileux ou argilo-limoneux plus frais et le chardonnay les sols très crayeux et favorablement exposés vers l’est.
2/La Vallée de la Marne
C’est la plus vaste région viticole de la Champagne. Elle s’étend sur près de 100 km sur les deux rives asymétriques de la Marne, en passant par les départements de la Marne, de l’Aisne et de la Seine-et-Marne. Les sédiments sablonneux, argileux et marneux, déposés depuis 65 millions d’années, surmontent la craie qui disparaît peu à peu en se dirigeant vers l’ouest depuis Epernay. La rivière a creusé son lit dans le vaste plateau de Brie, rejointe par des cours d’eau affluents qui ont développé des vallées secondaires. Les sols présentent une dominante argileuse dont la fraîcheur et l’humidité, associées aux zones d’accumulation d’air froid, prédisposent le cépage meunier dans le secteur. Les sols plus marneux et calcaires reviennent au pinot noir tandis que le chardonnay occupe les sols calcaires aux expositions favorables.
3/La Côte des Bar
La Côte des Bar est une ligne de relief creusée par la Seine, l’Aube et l’ensemble de leurs affluents, dans les formations sédimentaires déposées il y a 160 à 145 millions d’années.
- La Vallée de la Seine dans le département de l’Aube forme le secteur du Barséquanais, qui se distingue par une influence climatique continentale et des sols marno-calcaires caillouteux et riches en fossiles d’huîtres. Le pinot noir y est majoritaire. Les champagnes qui en sont issus présentent des arômes iodés, de calcaire fumé, mêlés aux parfums des fruits rouges et noirs. Le palais charpenté peut présenter une puissance étonnante.
- La Vallée de l’Aube, située plus au nord, regroupe également les vignobles du département de la Haute-Marne. Elle forme le secteur du Barsuraubois aux sols calcaires plus argileux. Les champagnes issus du pinot noir et du chardonnay se montrent amples dans le palais mais plus gras, avec des notes de fruits confits, fumés et miellés.
- Le vignoble de Montgueux est lui aussi situé dans le département de l’Aube, à l’ouest de Troyes, sur des coteaux bien exposés vers l’est et le sud-est. II se distingue des deux précédents par des sols plus récents composés de craie à silex déposée il y a 90 millions d’années. Les vins, à dominante de chardonnay, offrent une grande élégance florale et une minéralité de calcaire fumé caractéristique. Quelques pinots noirs sont vinifiés en rouge pour servir de base pour les champagnes rosés d’assemblage.
4/La Côte des Blancs
La Côte des Blancs débute au sud d’Epernay et s’étend aux vignobles du Vitryat et du Sézannais. Elle présente une longue ligne de côte irrégulière dont les versants viticoles descendent vers la plaine par ondulations et croupes successives. Son nom est incarné par le cépage dominant, le chardonnay (raisins blancs à jus blanc donnant un vin blanc de blancs), qui apprécie ici les expositions favorables vers l’est, le sud et le sud-est, ainsi que les sols drainants de craie devenant plus sablonneux vers le sud. Cette roche calcaire est composée de carapaces d’algues microscopiques appelées coccolithes, déposées il y a quelque 70 millions d’années. Elle est sensible, friable et confère aux vins une structure en dentelle avec un profil olfactif très élégant. Un champagne Blanc de Blancs se distingue par une couleur jaune pâle, jaune vert, or vert.
Focus sur les Coteaux du Sézannais. Dans le Secraie des 12 vignerons du Sézannais, focus sur le dernier né des groupements de producteurs, celui des douze vignerons créant en 2015 l’association Secraie*. Leur objectif : faire connaître l’un des secteurs les plus secrets du Champagne (au sud de la Côte des Blancs), les Coteaux du Sézannais. Ils s’étendent sur une vaste bande de 30 km de long d’Allemant au nord-est à Villenauxe-la-Grande au sud-ouest, englobant les communes de Broyes, Sézanne, Vindey, Saudoy, Barbonne-Fayel, Fontaine Denis, La Celle-sous-Chantemerle, Chantemerle, Bethon et Montgnost. Ce terroir de vignes champenoises les plus proches de Paris couvre des sols argileux et sableux de 1477 ha entrecoupés de châteaux, d’églises, de dolmens et de souvenirs des combats de la première Guerre Mondiale. Ici, deux cépages dominent, le chardonnay et le pinot noir. Chaque récoltant-manipulant de l’association issu d’une ou deux générations de viticulteurs sont signataires de la charte Secraie qui impose quatre conditions :
- Être situé dans l’un des 12 villages qui constituent les Coteaux Sézannais
- Produire au moins 4 cuvées différentes avec des raisins des Coteaux Sézannais
- S’engager dans une démarche de respect de la nature et de l’environnement
- Vinifier soi-même les cuvées vendues au domaine.
* Secraie : SE comme Sézanne et CRAIE comme la roche constituant le sous-sol du Sézannais
Vins sur lattes, côté sombre du champagne !
Les vins sur lattes ! Ce sont ces millions de bouteilles qui reposent en cave en position horizontale afin de favoriser la prise de mousse. Le champagne se bonifie en vieillissant. Cette longue attente en position horizontale dite “sur lattes“ favorise les échanges entre les levures et le vin. La durée du vieillissement est règlementée. Une durée minimum de vieillissement sur lattes est obligatoire pour chaque type de champagne : douze mois minimum pour tous les champagnes, quinze mois pour les champagnes non millésimés et trois ans pour les champagnes millésimés. Mais certaines grandes maisons peuvent conserver leurs plus grandes cuvées sur lattes dix ans, voire quinze ans.
Ces vins sur lattes qui peuvent servir de facteur d’ajustement. Ces vins sur lattes sont donc des bouteilles en cours d’élaboration, vinifiées par un opérateur et rachetées avant dégorgement par un autre, qui se chargera du dégorgement et de la commercialisation sous sa marque propre. Pour une partie des opérateurs champenois, ces vins sur lattes sont un bon moyen de gérer les stocks, soit qu’ils en aient trop, soit qu’un surcroît d’activité les trouve démunis. Pour d’autres, c’est l’occasion de gérer les trous de trésorerie. Le risque est que ces bouteilles se retrouve à moins de 10 € dans les rayons des grandes surfaces. D’où la suspension du marché des bouteilles sur lattes décidée par la filière Champagne en 2020, de mai jusqu’au 8 juin. Une décision inédite qu’explique Jean-Marie Barillère : nous avons fermé le marché des bouteilles sur lattes pour nous permettre de monter un dossier et de saisir la commission européenne pour mettre en œuvre des mesures d’exception afin de protéger et mener un contrôle strict des promotions. Autrement dit, la filière champagne voulait se protéger d’un retour de prix cassés à la fois en suspendant le marché d’achat de vins sur lattes et à préparer un dossier juridique pour la commission européenne.
Vignerons Indépendants de Champagne : les raisins de la colère
Au moment où Yves Couvreur président de la fédération des Vignerons Indépendants de Champagne accueille (le 15 février 2021) son nouveau directeur, Benoît Lemaire (une première depuis sa création en 1992), rien ne va plus avec le SGV (Syndicat Général des Vignerons). Le clash ! Les quelque 400 adhérents de la fédération furent en Juin 2020 tout simplement exclus du Syndicat Général des Vignerons. Un différent de taille ! Yves Couvreur qui, notons-le, vient d’être réélu à la tête de la fédération, les appelait à geler le paiement de leurs cotisations. Raison de ce casus belli : la revendication pour un rendement différencié. D’après la fédération, elle serait d’autant plus justifiée à l’aune des vendanges 2020 que les rendements furent drastiquement réduits pour éviter une surproduction. Le Comité Champagne évaluait alors la baisse des ventes à 100 millions de bouteilles, soit un tiers des expéditions. On alla même jusqu’à envisager un rendement à 5000 kg/ha. Sans la mobilisation des indépendants, rappelle Yves Couvreur, les vignerons n’auraient sans doute jamais décroché ces 8000 kg/ha finalement accordés.
Un rendement différencié. Yves Couvreur ne manque pas d’arguments. Ainsi, les charges d’exploitation n’ont rien de comparables avec ceux qui vendent leurs raisins aux grandes marques. Mais pour les vignerons indépendants qui produisent leur propre champagne, elles sont parfois deux fois plus élevées. Et d’asséner : Tant que les rendements tournaient autour de 10 000 kg/ha, on arrivait à s’organiser parce qu’on était au-dessus des charges de structures, mais là, on perd entre 25 et 30 % de raisin et on nous propose soit de travailler à perte, soit de perdre notre clientèle en augmentant le prix de la bouteille de 5 €. D’où, en toute logique cette revendication d’un rendement différencié. Il s’adapterait aux besoins des vignerons indépendants d’une part, et à ceux qui vendent leurs raisins au négoce d’autre part (un rendement à deux vitesses en cas de crise !). La réponse de Maxime Toubart Maxime (Président du Syndicat Général des Vignerons) n’appelle pas au compromis : la Champagne ne s’est pas faite autour de deux niveaux d’appellation. Et pourquoi pas plus à ceux qui vendent plus, ou aux terroirs qui vendent plus ? La réalité c’est qu’on vend moins de Champagne depuis 10 ans. 330 millions de bouteilles en 2008, 297 millions en 2009. A-t-on bien conscience des conséquences d’une surproduction ?
Qui sont en Champagne les Vignerons Indépendant ? Ils sont en Champagne plus de 400 à adhérer à cette fédération. Ils se distingue en élaborant leurs champagnes de A à Z avec leurs propres raisins. Ils exploitent 7,5 % du vignoble champenois pour une production de 15 millions de bouteilles dont près d‘un quart est exporté. Nous sommes des piliers aime à dire Yves Couvreur. La Haute Valeur Environnementale (HVE) a été portée par les indépendants du Bordelais et de la Champagne. Quant à la réserve individuelle, cette possibilité de stocker des vins clairs d’une année sur l’autre pour permettre aux vignerons de réguler volume et qualité de production, il faut savoir que l’INAO était réticent. Combien de régions aujourd’hui nous envient cette possibilité précise Yves Couvreur. Enfin, question rendements, sujet oh combien sensible ! : on veut dialoguer au niveau champenois. On va y aller progressivement. Le but ce sera de travailler notamment sur cette possibilité de rendements à deux vitesses en cas de crise. La messe n’est donc pas tout à fait dite !