Le chasselas, cépage blanc inconnu ou trop connu ! Pourtant n’a-t-il pas tout pour surprendre. D’abord le chasselas est cultivé à la fois comme raisin de table (l’AOP Chasselas de Moissac par exemple) ou comme raisin de cuve. Et puis son origine ! Tant de controverses quant à sa provenance pour se voir finalement ancrer avec certitude aux abords du lac Léman*. Enfin sa superficie (en raisin de cuve) ! Elle ne dépasse guère dans le monde, les 6000 ha, et pourtant on lui organise chaque année, une grand-messe un Mondial du chasselas*. Ce concours international se déroule au pied des Alpes vaudoises dans le château d’Aigle lors de la Fête du Chasselas. En compétition, plus de 800 chasselas, fendants (son nom officiel dans le Valais) ou gutedel (en langue allemande), originaires des grands terroirs de Suisse, de France, d’Allemagne et du Nouveau-Monde.
* D’après les analyses ADN et les données historiques et linguistiques, pas de doute, le chasselas est originaire des rives du lac Léman et notamment de sa rive gauche qui correspond au Canton de Vaud en Suisse.
Mai 2019, Aigle (canton de Vaud), capitale mondiale du vin
Autre sujet de satisfaction pour le chasselas suisse avec le 25e Concours Mondial du vin de Bruxelles qui s’est déroulé en mai 2018 à Pékin. Il a attribué une grande médaille d’or au chasselas Petit Vignoble 2015 (Yvorne AOC Chablais), qualifié de révélation pour la Suisse. Enfin, en mai 2019, Aigle deviendra la capitale mondiale du vin. Après Valladolid en Espagne et Pékin en Chine, la commune d’Aigle a été choisie pour accueillir en 2019 le Concours mondial du vin de Bruxelles, qui se tiendra du 2 au 5 mai 2019.

Le chasselas, un trésor suisse
Dans la Suisse lémanique, principale région productrice, le chasselas ou fendant se garde comme un trésor. Jeune, son charme viendrait de son délicat caractère aromatique. Il est relativement clair avec des notes florales voire citronnée, une pointe de minéralité (pierre à fusil) et une étonnante attaque carbonique due au CO2 qu’on lui ajoute (souvent) au moment de la vinification*, pour activer sa vivacité. A associer avec un fromage chaud (fondue, raclette ou tartiflette), des poissons de lac ou de rivière ou même avec la gastronomie japonaise (poissons crus) !
*Cet ajout est nécessaire pour ce cépage doté d’une si faible acidité. En plus, la quasi-totalité des chasselas sont chaptalisés à l’exception des vins allemands qui titrent moins de 11,5°.
Un cépage qui vieillit particulièrement bien
Si le chasselas à l’instar du silvaner, possèdent une faible acidité, elle est contrebalancée par une grande capacité au vieillissement. Ainsi, avec le temps (de 3 à 5 ans), le chasselas a cette faculté de se faire oublier avant de retrouver un incroyable épanouissement au bout de 7 à 10 ans. C’est à ce moment qu’il acquiert cette belle teinte dorée et ces arômes de mirabelle, de prune, de cire d’abeille et même parfois d’épices comme le curry ou le curcuma. Ne pas oublier que dans la catégorie Vieux millésimes du Mondial du chasselas (les plus de 7 ans), la plupart des primés affichent souvent des âges respectables : 18 ans pour le Dézaley Chemin de Fer, un millésime 1983 pour la Cure d’Attalens ou encore le millésime 1990 pour la Réserve du Domaine du Château de Châtagnéraz, etc. Enfin, ne dit-on pas qu’il se révèle sublime (un Grand cru Dézaley par exemple) sur un Vacherin Mont d’Or !

Le chasselas suisse très peu exporté
Le chasselas suisse est un vin qu’on boit sur place, à l’intérieur de la confédération (1 % à peine est exporté) ; un vin qui est cher 12 francs suisse minimum (10€), prix amplement justifié par l’exploitation du vignoble souvent en pentes et en terrasses rendant la mécanisation impossible. Et pourtant, dans une grande partie de la Suisse, comme en Allemagne, le chasselas est considéré comme vin d’entrée de gamme. L’exception évidemment couvre les régions du canton de Vaud (Chalais et Lavaux) où la bouteille dépasse allègrement les 20 francs suisses (18 €). En Allemagne, son prix peut atteindre jusqu’au 130 €. Mais il s’agit là du nec plus ultra, du Gutedel Jaspis Alte Reben 10 Hoch 4 par exemple, un chasselas du Markgräflerland (Land de Bade-Würtemberg). Ce vin au rendement limité à 15-20 hl/ha, est élaboré par Hanspeter Ziereisen, certainement l’un des vignerons les plus inventifs d’Allemagne. Ainsi par exemple consacre-t-il chaque année un fût de chasselas dont la mise en bouteilles ne pourra s’effectuer qu’après 50 ans (au plus tôt).

Le chasselas : ses noms et ses origines
Le chasselas aux 213 synonymes
Comme tout cépage ancien, il détient un nombre impressionnant de synonymes dont les principales dénominations sont :
- Chasselas dans les cantons suisses francophones en France, en Europe de l’est et en Amérique du nord.
- Fendant, nom officiel du chasselas dans le Valais*
- Gutedel dans les régions de langue germanique (sud de l’Allemagne et les cantons suisses germanophones).
*Pourquoi fendant ? : le Fendant doit son nom à une particularité de la baie mûre dont la peau et la pulpe se fendent sous la pression du doigt, sans que le jus ne s’écoule.
Selon chaque pays et en fonction des mutations génétiques naturelles, le plant peut prendre des aspects très différents. Le Vitis International Variety Catalogue (www.vivc.de) recense 53 cultivars (y compris des raisins de table) ayant le nom de chasselas (chasselas violet, chasselas rose, chasselas musqué, chasselas semipersil, chasselas nermorin, etc …) et pas moins de 213 synonymes.

Chasser les légendes
Combien de légendes quant à son origine lui ont été attribuées. Une origine française ! Oui bien sûr, ce village de Chasselas en Bourgogne, à 14 km de Mâcon, en Saône-et-Loire : quelques vieux pieds de vignes appelées mormant utilisés comme raisin de table que des analyses génétiques, sous le nom de mormen noir ont classé comme issu d’un croisement naturel entre le chasselas et un cépage inconnu (d’où la confusion). Pour faire bonne figure, le village planta pour la première fois, du chasselas en 2016. Fallait-il aussi lui trouver une origine égyptienne, de l’oasis de Fayoum près d’Alexandrie. Là encore, des tests menés en 2008 démontrèrent qu’entre le fayoumi et le chasselas, pas de lien génétique. Une origine turque alors ! Elle aussi fantaisiste. Nul ambassadeur de François 1er qui aurait ramené en 1523 des plants de chasselas de la cour du sultan d’Istanbul jusqu’au château de Fontainebleau (la Treille du Roy) !
2009, une étude historico-génétique donne enfin l’origine du chasselas
Les premières mentions historiques du chasselas proviennent d’un botaniste allemand qui en 1539, dans son ouvrage Kreütter Buch, signale l’existence de l’edeldrauben qui deviendra gutedel, la traduction germanique du mot chasselas. En 1612, dans son Histoire universelle des végétaux, le Bâlois Jean Bauhin décrit 3 raisins de type fendant ou lausannois qui peuvent être assimilés au chasselas. Et que dire de cette mention dans l’ouvrage de Nicolas de Bonnefons (Les délices de la campagne) paru en 1654 où il est évoqué pour la première fois le mot chasselas : les francs muscats, muscadets, genetins, chasselas et autres qui le grain plus charnu sont bons à faire les vins doux et bourrus. En fait, le chasselas connaîtra son âge d’or à la fin du Moyen Âge et au début de la Renaissance se diffusant à partir de sa région d’origine, le pourtour du lac Léman. Au XXe siècle, il suivra la pérégrination des émigrants suisses et savoyards, s’implantant ainsi sur d’autres continents (Mexique, USA, Canada…).
Il fallut attendre 2009 pour que le docteur José Vouillamoz, de l’Université de Neuchâtel en collaboration avec Claire Arnold de l’Université de Lausanne révèlent sa véritable origine dans l’ouvrage : Etude historico-génétique de l’origine du « Chasselas » montrant que le chasselas est très éloigné des variétés orientales et se situe au cœur des cépages helvétiques, à l’intersection des cépages italiens et français.

Petit résumé de l’ouvrage
Le chasselas est un des cépages blancs les plus répandus dans le monde. De nombreuses légendes existent au sujet de son origine : il aurait été rapporté d’Egypte ou de Turquie, il serait né en France ou en Suisse, etc. Les premières mentions du chasselas apparaissent aux XVIe et XVIIe siècles, d’abord dans le Württemberg (D), puis en Bourgogne (F) et dans le canton de Vaud (CH). Une étude génétique fondée sur 511, 317 et 132 cépages d’Europe et du Proche-Orient analysés respectivement à 11, 20 et 54 marqueurs moléculaires (microsatellites) permet de rejeter catégoriquement une éventuelle origine orientale du chasselas, et de localiser son berceau au carrefour entre la Suisse, la France et l’Italie. Associée aux données historiques, l’analyse génétique désigne très vraisemblablement l’Arc lémanique comme centre d’origine du chasselas, plus probablement le canton de Vaud, où s’observait au XIXe siècle la plus grande diversité de formes
Le chasselas, mais quelle incroyable parenté !
Des résultats plus poussés, s’ils n’ont pas permis de trouver des parents connus au chasselas, montrent de fortes similitudes génétiques avec d’autres cépages de l’arc alpin comme le nebbiolo du Piémont, le lagrein du Haut-Adige, la negrera de la Valteline, l’altesse de Savoie, le viognier du Rhône, la dureza d’Ardèche, le completer des Grisons, la bondola du Tessin, ou encore, l’arvine du Valais.
Il est suisse, du canton de Vaud comme le pinot noir est de Bourgogne
Si aujourd’hui la génétique seule ne permet pas de localiser avec précision, le berceau du chasselas, il faut alors croiser les données des analyses ADN, historiques et linguistiques. On obtient ainsi la délimitation géographique du cépage pour en préciser l’origine. Le nom de lausannois ou luzannois, la plus ancienne mention du cépage révèle à coup sûr, l’origine du chasselas : le canton de Vaud qui recélaient autrefois la plus grande diversité de types de chasselas. Pour conclure, le chasselas est originaire de l’arc lémanique et très certainement de sa rive nord, c’est-à-dire le canton de Vaud.
Le chasselas dans le monde : en régression dans ses bastions traditionnels
On estime aujourd’hui à 38 000 ha la surface mondiale du chasselas cultivée comme raisin de table et de cuve dont 13 000 ha pour la Roumanie et 9000 ha pour la Hongrie. Vient ensuite la Suisse. Ses 3800 ha de chasselas sont essentiellement consacrés à la vinification ce qui en fait le principal producteur de vins de chasselas au monde. L’Allemagne totalise 1100 ha de chasselas principalement dans le Markgräflerland. Quant à la France, ses 2600 ha sont surtout consacrés au raisin de table, n’utilisant ce cépage pour le vin que dans trois régions : la Savoie, la Loire (Pouilly-sur-Loire) et l’Alsace. A cette tête de liste et par ordre d’importance se greffent Russie, Chili, Autriche, Slovaquie, Tchéquie, Ukraine, Albanie, Turquie, Portugal, Afrique du Nord, Etats-Unis, Mexique, Nouvelle-Zélande, Canada et Chine. Malgré les efforts de l’Association pour la Promotion du chasselas, il est partout en régression et notamment dans ses bastions traditionnels.

Les 6 plus grands vignobles producteurs de vins de chasselas dans le monde
Le chasselas (ou fendant,) dans les 17 cantons suisses où il est présent, est en régression par rapport notamment au pinot noir. Quel comble ! Sait-on que l’arrachage du chasselas fut subventionné ?
La Suisse, son berceau historique
En Suisse, on constate que 90 % du chasselas se trouve sur le 46e parallèle, les 2/3 donc concentré dans le canton de Vaud, le reste à Genève et en Valais. Au sud de ce fameux parallèle, ne donnerait-il que des vins de moindre qualité ? Mais, voyez les chiffres. Ils affichent partout un déclin des surfaces même dans le bastion historique de ce cépage. (différentiel entre 1996 et 2016) :
- Suisse : 3789 ha (-1700 ha)
- Vaud : 2278 ha (-423 ha)
- Valais : 914 ha (-826 ha)
- Genève : 300 ha (-195 ha)
- Neufchâtel : 168 ha (-146 ha)
(Pour la Suisse alémanique et le Tessin, le chasselas a toujours été une curiosité anecdotique).

1/Canton de Vaud, le chasselas en son royaume (2278 ha)
C’est le berceau historique du chasselas, un canton qui défend son cépage par tous les moyens. Ainsi, en 2007, l’Unesco inscrivait le Lavaux, Vignoble en terrasses face au lac et aux Alpes, au Patrimoine mondial, un vignoble, qui plonge à pic dans le lac Léman. Puis il y eut l’instauration des Premiers Grands crus vaudois dont 24 sur 27 sont des Chasselas ainsi que la requalification en AOC Grand cru des appellations Dézaley et Calamin et enfin, la création d’un Mondial du Chasselas. Résultat, en cinq ans la baisse des surfaces de chasselas n’est, dans ce canton, que de 4 % alors qu’elle avoisine ou dépasse les 10 % dans tous les autres.
Les 6 AOC du canton de Vaud + 2 Grands crus :
- Chablais,
- Lavaux,
- La Côte,
- Bonvillars,
- Vully,
- Les Côtes de l’Orbe
- Grand cru Dézaley
- Grand cru Calamin.
Attention ! Aucunement, le nom de l’AOC ne mentionne le cépage. Premiers grand cru vaudois est ici une dénomination qui impliquent un cahier des charges restrictif et le dépôt d’un dossier de candidature. Avant d’être acceptés, les postulants doivent justifier d’une tradition historique et prouver leur capacité de vieillissement par une dégustation portant sur dix millésimes. L’agrément est renouvelé chaque année.

2/Canton du Valais, quelques chasselas mondialement connus (914 ha)
C’est la région la plus ensoleillée de culture du chasselas. Le fendant (chasselas) malgré des surfaces en net recul demeure encore le cépage principal du canton (plus de 900 ha). Il représente en surface quatre fois plus que le silvaner (appelé johannisberg) ou la petite arvine. On peut citer quelques producteurs comme le Domaine des Muses, Simon Maye et Fils, Cave Jean-René Germanier, Provins qui figurent régulièrement parmi les chasselas les plus reconnus du pays.
Quatre communes dont le fendant est admis en Grand cru
Le fendant, chasselas du Valais est en appellation AOC du Valais avec la possibilité pour les communes du Valais de définir des Grand crus possédant leurs caractéristiques propres, tout en limitant à quatre le nombre de cépages autorisés. Ainsi, 4 communes ont intégré le fendant parmi les cépages admis en Grand cru :
- Sion,
- Saint-Léonard,
- Vétroz,
- Conthey
3/Canton de Genève, le très populaire perlan (300 ha)
La diversification de l’encépagement des trois dernières décennies a été très importante dans ce canton. Avec le gamay, le chasselas a été la principale victime de cette évolution. Rarement mis en avant, le chasselas genevois reste la plupart du temps un vin d’apéritif bu pendant sa jeunesse. A noter que dans l’AOC Genève, le chasselas peut arborer la dénomination Perlan (depuis 2016). Le canton a défini des zones AOC Premier cru, dénomination qui implique un cahier des charges plus strict. Néanmoins, cette appellation reste mal connue et très peu mise en avant.
4/Canton des Trois-Lacs*, un chasselas sur lies non filtré (168 ha)
Ici, comment faire la différence ? En élaborant un chasselas sur lies non filtré que les producteurs de Neuchâtel (AOC Neuchâtel), mettent en bouteille mi-janvier et commercialisent dès le troisième mercredi du mois. Une recette qui certes, a donné un coup de pouce au chasselas mais n’a pu freiner l’érosion des surfaces. Ce blanc inventé en 1975 qui représente aujourd’hui près de 10 % des volumes de chasselas du canton, est devenu tendance depuis une quinzaine d’années. Il connaît un succès croissant et commence à se faire connaître hors des frontières régionales.
*Dans les régions du Lac de Bienne et du Vully, le chasselas demeure un cépage important malgré une concurrence accrue des rouges et des autres variétés blanches.
4/Allemagne : le gutedel cépage emblématique du Markgräflerland (1050 ha)
Le gutedel (chasselas) se concentre dans le Markgräflerland (Land de Bade-Würtemberg) avec plus du tiers des 3000 ha de son vignoble. Ce cépage aurait été introduit dans ce land par le Margrave Charles-Frédéric de Bade en 1780 après sa visite dans la région de Vevey, sur les rives du lac Léman. En réalité, le gutedel serait arrivé dans le sud de l’Allemagne deux siècles auparavant. C’est aujourd’hui un cépage vinifié la plupart du temps sans chaptalisation qui présente donc un degré d’alcool assez bas. Qui peut ignorer dans le sud de l’Allemagne, le Müllheimer Weinmakt, célèbre marché au vin qui se déroule chaque année depuis 1872 dans la ville de Müllheim ? Et depuis en 1996, une première Gutedel Cup est organisée par les producteurs du Markgräflerland (en partenariat d’ailleurs avec le Mondial du chasselas).

5/France : raisin de table à Moissac, vin marginal à Pouilly-sur-Loire
En France quand on parle chasselas, on pense immédiatement à celui de Moissac, dans le Tarn-et-Garonne. Il s’est vu décerner le titre d’AOC/AOP depuis 1977, premier fruit frais à avoir obtenu cette reconnaissance. Moissac regroupe aujourd’hui 254 producteurs qui récoltent 2500 à 3000 tonnes par ans sur les 591 ha de I’ appellation Moissac.

Trois secteurs de production de vins de chasselas en France
1/Pouilly-sur-Loire : AOC depuis 1937, le chasselas a donc une longue tradition dans ce village viticole de Bourgogne, département de la Nièvre (région de la Loire). Autrefois largement répandu à Pouilly-sur-Loire, le chasselas a été dans sa quasi-totalité remplacé par le sauvignon blanc (Pouilly Fumé, à ne pas confondre avec le Pouilly Fuissé). Il n’occupe plus aujourd’hui, qu’une quarantaine d’hectares sur les 7 communes de l’appellation.

2/L’Alsace : là encore les surfaces de chasselas ont fortement régressé. Elle comptait un peu plus de 1000 ha en 1969 (10 % du vignoble d’alors) pour n’en occuper aujourd’hui qu’une soixantaine (moins de 1 % du vignoble actuel). Bien qu’il puisse être commercialisé en monocépage, la plupart des producteurs le mélangent dans l’Edelzwicker, un assemblage d’entrée de gamme de la région, ou dans le crémant. L’AOC chasselas d’Alsace qui concerne les chasselas B et chasselas rose Rs est vinifié en vins tranquilles. Ils peuvent être suivis d’un nom de lieu-dit mais pas autorisés à entrer dans les Grands crus.
3/ La Savoie : le chasselas représente environ 5 % du vignoble savoyard, un vignoble de 2200 ha. On le rencontre surtout en Haute-Savoie, sur la rive sud du Léman. Le chasselas est le cépage principal* de 4 appellation sans oublier qu’il peut entrer dans l’élaboration (en cépage secondaire) de crémants et de mousseux rosés de Haute-Savoie :
- AOC Vin de Savoie Crépy
- AOC Vin de Savoie Marin
- AOC Vin de SavoieMarignan
- AOC Vin de Savoie Ripaille
*Les cépages accessoires (-de 20 %) : aligoté, altesse, chardonnay, gringet, mondeuse, roussetted’Ayze et veltliner.

Le chasselas dans le reste du monde
Difficile à se faire une idée précise de sa présence dans bien des pays du monde (et notamment en Chine) ! Ce peu de fiabilité est dû aux nombreuses confusions autour de son nom, de statistiques incomplètes ou obsolètes et surtout par un manque criant d’intérêt pour cette variété.
Des chasselas hongrois, canadiens, mexicains, chiliens…
Le Mondial du chasselas a ainsi pu faire venir des déclinaisons de chasselas du monde entier. Le Chili par exemple où le chasselas s’étend sur 130 ha officiels (voire 400 ha). Il est connu sous le nom de corinto. Il aurait dominé la région de Bio-Bio avant d’être remplacé en blanc par le muscat d’Alexandrie, le chardonnay ou le sémillon. Aujourd’hui, seules demeurent des vieilles vignes plus ou moins bien entretenues qui commencent à intéresser des vignerons locaux. Le chasselas en monocépage n’est aujourd’hui commercialisé que par 2 entreprises : Vina de Martino et Via Wines.

Heurs et malheurs du chasselas
Pour commencer, c’est un cépage qui sert de référence puisque il débourre relativement tôt et qu’il parvient à maturité une centaine de jours après la fleur. Il sert donc pour les autres cépages, de référence de maturité en Suisse comme en France.
Grosses grappes et pourriture grise
Sa production est élevée, il présente des grappes assez imposantes dotées de gros grains ce qui est un handicap lors d’une année pluvieuse. Les grappes ont tendance alors à se toucher empêchant une bonne ventilation, les rendant particulièrement sensibles à la pourriture grise. Cette grosseur est un problème : un grain de chasselas pèse 2 gr comparé au 0,8 gr d’un grain de chardonnay (le rapport entre eau et matières sèches n’est pas le même). Ainsi, lors des années sèches, ses baies ont tendance à rapetisser rendant la récolte plus qualitatives.
Les chasselas alternatifs, une exception !
Le chasselas est un cépage délicat. Une vinification alternative comporte beaucoup de risques ce qui pousse la plupart des producteurs à élaborer leurs vins de manière traditionnelle. A l’exception du non-filtré neuchâtelois, élevé sous bois, la méthode alternative sans fermentation malolactique, en levures indigènes, avec macération pelliculaire, vinifiés sans soufre reste donc une exception.

Tout savoir sur le Mondial du chasselas
Créé en 2010 (première édition en 2012), le Mondial du chasselas est un concours international de dégustation réservé à toutes les expressions de ce cépage lémanique. Son but est de le promouvoir, le défendre et le valoriser en Suisse et dans le monde. Le concours est aujourd’hui placé sous les patronages de l’Union Suisse des Œnologues, de l’OIV (Organisation internationale de la vigne et du vin) et de l’Union Internationale des Œnologues. Il est composé d’un jury international qui se réunit au Château d’Aigle pour les dégustations (à l’aveugle), 3 semaines avant la proclamation des résultats.

Les 6 catégories qui peuvent se présenter au Mondial du chasselas
- Vins secs possédant jusqu’à 4 g/l de sucre résiduel lors des 2 derniers millésimes
- Vins contenant entre 4,1 et 45 g/l de sucre résiduel (vins moelleux)
- Vins contenant plus de 45 g/l de sucre résiduel (vins doux)
- Vins avec vinification spéciale (effervescent, vinification en barrique)
- Swing. Ce sont des vins contenant jusqu’à 4 g/l de sucre résiduel et qui affichent un taux d’alcool jusqu’à 11,5°
- Vieux millésimes (minimum 7 ans)
Des vins notés sur 100. Si la moyenne dépasse 85, le vin est éligible pour une médaille d’argent, si elle dépasse 89, pour une médaille d’or. Le titre de Champion du monde des chasselas est revenu en 2018 au Mont-sur-Rolle La Montoise Esprit Terroir 2017 de la Cave de la Côte. Cette coopérative de Tolochenaz (commune suisse du canton de Vaud, district de Morges) est ainsi devenue la première entreprise à remporter pour la deuxième fois ce prix prestigieux après son triomphe en 2016 avec le Morges Vieilles Vignes 2015.
Le prochain Mondial du Chasselas et la Fête du Chasselas se dérouleront à Aigle les 28 et 29 juin 2019.

Et pour aller plus loin dans les cépages
(Par l’auteur du site dico-du-vin.com)
