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Cos d’Estournel Deuxième Cru Classé (1855) Saint-Estèphe Médoc

Château Cos d’Estournel Deuxième Cru Classé, en appellation Saint-Estèphe est le voisin immédiat de Lafite-Rothschild. A cet endroit, un simple ruisseau, la jalle du Breuil marque en effet la limite entre Pauillac et Saint-Estèphe. C’est donc là, au détour d’un virage et à un jet de pierre des Premiers Crus que Louis-Gaspard d’Estournel (1762-1853) ancra ses rêves d’orient. Il transforma la propriété dont il avait hérité en 1811 en un délire architectural digne de Louis II de Bavière.

Château Cos d’Estournel et Château Lafite-Rothschild sont quasi voisins. A cet endroit, un simple ruisseau, la Jalle du Breuil marque en effet la limite entre Pauillac et Saint-Estèphe. Photo © François Collombet

Un château de Maharadja

Il fit de Cos d’Estournel, un château de Maharadja. Un projet ahurissant dans ce Médoc si sage qui ne jurait que par le style classique ! La réputation de cet homme excentrique est née de ses vins retour d’Indes très prisés à l’époque. Il les faisait voyager en barriques jusqu’à Bombay ou Calcutta pour les rapatrier ensuite et les vendre à une Europe friande de ces vins voyageurs (la cour d’Angleterre, le Tsar de toutes les Russies, Napoléon III…). La vie de celui qu’on surnomma le Maharadja de Saint-Estèphe fut celle d’un prince menant grand train au point de se ruiner et de vendre château et vignoble en 1852. Il mourut à 91 ans deux ans avant de voir son vin propulser au sommet des Saint-Estèphe par le célèbre classement de 1855.

Cos d’Estournel derrière son imposante porte en bois sculpté est entièrement dédié au vin. Le bâtiment principal surmonté de monumentales pagodes abrite les chais. Cette disposition prise par le fondateur n’a jamais été remise en cause : ici, c’est le vin qui habite le château. Photo © François Collombet
L’entière rénovation du bâtiment emblématique date de 2008. Le but fut de sublimer l’héritage du fondateur tout en inscrivant le domaine dans la modernité. Le travail consista à utiliser les techniques les plus avant-gardistes, dans le respect de l’environnement. La sobriété de l’agencement et les matériaux contemporains comme le verre et l’acier y contrastent avec la finesse des tissus de soie et le bois précieux, mis en valeur par une lumière tamisée. Photo © François Collombet

Un vin à la suavité de l’orient

Pour qui pénètre à Saint-Estèphe, impossible d’échapper à la vue en rose de ces chais, mélange de chinoiseries et de pagodes avec une porte du XVIIe siècle que Louis-Gaspard avait fait venir d’un palais de Zanzibar. Ce rêve d’Orient est une tradition au château fortement liée aujourd’hui aux marchés asiatiques dont une partie significative des ventes se réalise au Japon mais aussi à Hong-Kong, Macao, Singapour, Taïwan et en Chine. D’ailleurs, incroyable coïncidence, ce vin, le plus Pauillac des Saint-Estèphe, puissant, virile, élégant, charmeur présente toute la suavité de l’orient avec des parfums d’épices, de poivre jusqu’à y déceler des notes de curry ! Et quelle image ! Peu de château ont ce statut envié d’être comme Cos d’Estournel, lieu de rencontre de l’Inde et l’Orient, mondialement reconnu et encensé à longueur de pages par la presse spécialisée anglo-saxonne.

Le chai a été creusé sous le cuvier pour minimiser l’impact environnemental et abriter les 1500 barriques en bois. C’est un site technique conçu pour apporter les meilleures conditions pour l’élevage des vins. Sa proximité immédiate avec le cuvier permet de bénéficier de la gravité et de ne pas déplacer les vins inutilement. Photo © François Collombet

La colline aux cailloux

Cos signifie en vieux gascon, colline de cailloux, une colline d’une vingtaine de mètres de haut au sommet de laquelle le château et son vignoble de 100 ha aujourd’hui dominent superbement la Gironde. C’est en réalité un impressionnant amoncellement de graves du Quaternaire arrachées aux Massif Central et aux Pyrénées, et déposées par le retrait du fleuve, sur le socle argilo-calcaire de Saint-Estèphe. Cet excédent de graves, spécifique à Cos, oblige la vigne à plonger plus profondément ses racines pour puiser ses besoins dans le sol.

Cos d’Estournel, 100 ha entre Pauillac et Saint-Estèphe, séparés de Château Lafitte par le ruisseau du Breuil. Cette colline de Cos domine la Gironde de près de 20 m. La partie centrale du vignoble est située sur un plateau de graves profondes, d’où déclinent deux coteaux. L’un est orienté à l’est et l’autre au sud, sur des terres de graves et argile. L’ensemble est par ailleurs traversé par une veine argileuse qui franchit le domaine dans une longue diagonale. Photo © François Collombet

Une trentaine de parcelles

La répartition de la trentaine de parcelles du château (en 2004, une étude pédologique du vignoble fut  réalisée par Pierre Becheler) respectent l’adéquation entre sol et cépage. On trouve ainsi, sur les graves maigres des sommets et sur les versants sud, le cabernet sauvignon à hauteur de 60 % et sur les pentes est ainsi que sur les côtes où le socle calcaire de Saint-Estèphe affleure, le merlots qui représente 40 % de l’encépagement. Ici la plantation est dense, de 8.000 à 10.000 pieds/ha selon les parcelles afin de limiter le rendement à 31 hl/ha et augmenter la qualité. L’âge moyen du vignoble est de 45 ans et seuls les vignes de plus de vingt ans peuvent servir à élaborer le grand vin.

Au Cos d’Estournel, on pratique la sélection massale. Elle consiste en fonction de l’aspect et du goût des grappes, à sélectionner des rameaux qui seront utilisés pour créer de jeunes vignes. Elles seront alors détentrices du patrimoine des plus anciennes. Cette méthode représente un engagement sur le long terme pour continuer à produire un grand vin. Photo © François Collombet

Les 6 vins de Cos d’Estournel, plus COS 100

Cos d’Estournel (le grand vin) : l’assemblage 2022 se fait autour de 61 % cabernet sauvignon, 37 % merlot, 1 % cabernet franc et 1 % petit verdot. Les fermentations sont réalisées en barrique d’un an et l’élevage de 18 mois en barriques neuves à 70 %. La production annuelle tourne entre 180 000 et 270 000 bouteilles.

Cos d’Estournel Blanc : assemblage 2022 entre sauvignon blanc (74 %) et sémillon (26 %). C’est un vin qui existe depuis le millésime 2005 et dont les vignes se situent en nord du Médoc, à Jau-Dignac et Loirac ; un vin d’appellation Bordeaux.

Pagodes de Cos : l’assemblage 2022 est presque à part égale entre cabernet sauvignon (50 %) et merlot (49 %) plus 1 % de cabernet franc. Pagodes de Cos est issu d’un terroir clairement identifié, avec des vignes de 40 ans d’âge moyen. C’est une belle introduction au style de Cos d’Estournel.

Pagode de Cos Blanc : l’assemblage 2022 est de 57 % sauvignon blanc et 43 % sémillon. Pagodes de Cos Blanc est le fruit de 18 ans d’expérience dans la gestion du vignoble et l’élaboration de vins blancs avec des vignes âgées de 37 ans pour les plus anciennes.

G d’Estournel : l’assemblage 2022 est dominé par le merlot (67 %), le cabernet sauvignon (29 %), le cabernet franc (3,6 %) et le petit verdot (0,4 %). G d’Estournel provient des vignes septentrionales du nord Médoc, proches de l’estuaire de la Gironde.

Goulée by Cos d’Estournel 2018 : l’assemblage est nettement merlot (73 %) avec 21 % de cabernet sauvignon et 6 % de cabernet franc. Le vignoble est situé en nord Médoc à Port de Goulée et Jau-Dignac et Loirac. Il s’étend sur une colline de graves, faisant face à l’estuaire de la Gironde. Goulée, qui fut autrefois une île cernée par les eaux de l’estuaire, bénéficie d’un terroir de graves profondes.

COS100 est un vin unique et rare, composé exclusivement de merlot vendangé en 2015 en infimes quantités sur la Parcelle des Femmes. Pour souligner son caractère exceptionnel, COS100 est exclusivement proposé en très grands formats numérotés, mis en bouteilles manuellement au Château. Des deux seules barriques récoltées, 10 Balthazars (12 litres) et 100 double magnums (3 litres) sont édités dans les chais de Cos d’Estournel.

Jean-Guillaume Prats, l’homme lige de Cos

Alors, manquerait-il à Cos d’Estournel le titre de premier cru, lui qu’on qualifie (avec envie) de super second ? Le prestige de celui qui est considéré comme le plus beau joyau de Saint-Estèphe est en grande partie dû aux quatorze années passées par Jean-Guillaume Prats à la direction du château. Faudrait-il préciser que Jean-Guillaume était un peu chez lui à Cos. N’est-il pas le fils de Bruno Prats, ancien copropriétaire du château revendu en 2000 à Michel Reybier. C’est en effet son arrière grand père, Fernand Ginestet, grande figure du négoce bordelais qui en 1917, l’avait acheté. Cos restera donc près d’un siècle au sein de la même famille.

Un travail 100 % en gravité

Jean-Guillaume Prats qui a quitté Cos début 2013* laisse derrière lui un énorme travail accompli avec le soutien inconditionnel de Michel Reybier. Le folklore des chinoiseries (d’ailleurs la restauration des bâtiments a permis aux pagodes de retrouver leur aspect initiale) cache un formidable outil au service du vin avec notamment ce chai gravitaire ultramoderne qui a vu le jour en 2008 ; un projet unique à Bordeaux et sans doute dans le monde du à l’architecte Jean-Michel Wilmotte. Avec l’équipe technique du château, il a conçu un cuvier enterré sur 3 niveaux (en 3 matières, inox, bois et verre) aux dimensions impressionnantes entièrement gravitaire faisant appel à 4 cuves-ascenseurs de 100 hl chacune en lieu et place des pompes. Dans le chai, une armée de 72 cuves inox tronconiques et isothermes contiennent de 19 à 115 hl adaptées à vinification parcellaire. L’utilisation de la gravité est en effet un formidable atout pour des cépages comme le merlot au potentiel tannique important. Autre avantage, une meilleure maîtrise de la matière grâce à des extractions plus douces sans pour autant obérer les qualités du millésime (le fruité, l’onctuosité des tannins, la fraîcheur du vin…).

Au départ de Jean-Guillaume Prats, le choix de Michel Reybier se porta sur Aymeric de Gironde pour diriger Cos d’Estournel. A son départ en 2017, c’est Michel Reybier lui même qui a repris la direction de Cos d’Estournel.

*Après avoir dirigé Cos d’Estournel puis la branche « Estates & Wines » du groupe LVMH, Jean-Guillaume Prats avait rejoint DBR (Domaines Barons de Rothschild Lafite) en 2017, alors que le baron Eric de Rothschild confiait à sa fille Saskia, la présidence du groupe. En 2021, il quittait le groupe pour s’occuper des affaires familiales : « Je ne quitte pas l’univers du vin puisque nous gérons des vignobles, à savoir dans le Douro, Chryseia, dans la vallée chilienne de Maipo, Aquitania, et enfin le Château d’Estoublon pour des grands vins de Provence ».

Chai de Cos d'Estournel
Cos d’Estournel est doté d’un chai gravitaire ultramoderne du à l’architecte Jean-Michel Wilmotte. Le chai, enterré et parfaitement isolé, a été pensé pour minimiser l’impact sur l’environnement et maximiser les économies d’énergie. DR

Michel Reybier propriétaire depuis 2000 de Cos d’Estournel 

Michel Reybier et Dominique Arangoïts à Cos d’Estournel. En arrivant à Cos d’Estournel en 2000, Michel Reybier a confié à Dominique Arangoïts la responsabilité d’apporter son expertise au vignoble de Cos d’Estournel, en le nommant Directeur Technique : « à Cos d’Estournel, c’est le sol qui fait le vin, plus que l’homme : ce sol, véritable mère nourricière, que nous devons choyer pour le préserver et le transmettre, c’est l’élément primordial pour la qualité du vin. » Photo © François Collombet

Michel Reybier devenu l’homme du vin 

Cos d’Estournel (Deuxième Cru classé 1855) appartient depuis 2000 à Michel Reybier. Pour rappel, Il a fait fortune (en 2023, il est classé 54e fortune française par le magazine Challenge) dans la charcuterie (Groupe Aoste dont les marques Justin Bridou, Cochonou, jambon d’Aoste…). Mais aujourd’hui, c’est un homme du vin.

L’acquisition du voisin le plus immédiat, Cos Labory

Michel Reybier qui réside en Suisse pèse aujourd’hui 2200 M€. Il s’est constitué un empire viticole. Outre Cos d’Estournel et Château Marbuzet (65 ha) en appellation Saint-Estèphe, l’homme d’affaire a acquis le vignoble de Goulée (Goulée by Cos) en appellation Médoc situé à Port de Goulée. Mais aujourd’hui, sa prise la plus spectaculaire est le voisin le plus immédiat (de l’autre côté de la rue) : Cos Labory et ses 18 ha (Cinquième Cru classé)*. Il a ainsi la satisfaction que cette vente de 2023 lui permet de reconstituer ce qu’était le grand vignoble historique de Cos d’Estournel au moment du classement de 1855.

*Au Château Cos Labory et ses 18 ha, s’ajoute également le domaine du château Andron Blaquet (16 ha) en appellation Saint-Estèphe, ces deux propriétés appartenant à Bernard Audoy et à ses frères.

Michel Reybier, l’homme qui s’associe à une légende du basket

Michel Reybier vient de s’associer à Tony Parker, l’ancien joueur des Spurs de San Antonio dans les champagnes Jeeper (Faverolles-et-Coëmy, Montagne de Reims), à l’instar de Leonardo DiCaprio, qui a rejoint le capital de la maison de Champagne Telmont. Autres propriétés viticoles qui appartient à la famille, en Provence en 2020 et 2021 en acquérant les domaines de La Mascaronne et de Lauzade. et, au-delà des frontières hexagonales, il a investi en Hongrie, dans la région de Tokay en acquérant le vignoble historique Hétszőlő (49 ha) et celui de Lencsés Dülö (6 ha) tous les deux sur le Mont Tokaj. L’ensemble de ces cinq propriétés constitue les Domaines Reybier, cinq domaines tous traités en bio. 

A la Réserve Paris qui appartient à Michel Reybier, Gaëtan Lacoste nouveau chef sommelier
A la Réserve Paris qui appartient à Michel Reybier, Gaëtan Lacoste nouveau chef sommelier a sélectionné ce Cos d’Estournel millésime 2008. DR

Arangoits.

François

  • 1990 – Les grands vins du monde, préfacé par Gérard Depardieu. 
  • 1992 – Grands et petits vins de France, préfacé par Jean Carmet.
  • 1996 – Le guide des grands et petits vins de France, préfacé par Alain Favereau.
  • 2000 – The Flammarion Guide to World Wines
  • 2013 – Les vignobles mythiques, aux éditions Belin préfacé par Pierre Lurton (Cheval Blanc et Yquem).
  • 2014 – Prix Amunategui-Curnonsky décerné par l’APCIG (association professionnelle des chroniqueurs de la gastronomie et du vin).
  • 2016 – Cépages & Vins aux éditions Dunod.
  • 2020 – Cépages & Vins, nouvelle édition, éditions Dunod.

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