Mouton-Rothschild (château Mouton-Rothschild) Premier Grand Cru Classé (1973) appellation Pauillac (Médoc, Bordeaux) vin rouge : lorsqu’en 1922, un tout jeune homme de 20 ans prend la tête de la propriété, il hérite d’un Mouton-Rothschild classé second grand cru (1855), rang qu’il juge inadmissible, une injustice monstrueuse dira-t-il ! Ainsi commence la véritable saga du baron Philippe de Rothschild couvrant un règne qui allait durer 65 ans et que perpétue depuis 1988, sa fille Philippine de Rothschild. Il fut marqué par l’audace et l’innovation mais aussi par cette grande bataille que le baron mena pour rendre à Mouton-Rothschild son rang totalement justifié de Premier Cru et rejoindre ainsi les 4 autres grands premiers crus déjà classés. Sa devise qui fut Premier ne puis, second ne daigne, Mouton suis devint en 1973 l’année où il fut reclassé (fait unique dans l’histoire de ce classement) : Premier je suis, second je fus, Mouton ne change.
Le style Mouton
Ce vin profond, flamboyant aux tannins puissants et au bouquet légendaire de cèdre, de violette, d’amande, de cassis et de fruits rouges est l’expression même de l’élégance et de l’aristocratie. Il est à l’image de son château*, aux lignes épurées dans son écrin de verdure, son jardin à l’anglaise, ses allées calmes et magnifiquement entretenues, ses arbres centenaires. Oui décidément il règne ici un coté presque zen. C’est peut être ça le style mouton, ce style irréprochable, impeccablement tenu ! D’ailleurs ne dit-on pas que Mouton-Rothschild non content de faire l’un des meilleurs vins du monde (et l’un des plus chers) est une œuvre d’art dont la beauté s’affiche partout jusqu’aux étiquettes de son vin qui millésime après millésimes sont dessinées par les plus grands peintres de leurs temps (Cocteau, Dali, Mathieu, César, Chagall, Picasso, Warhol, Miro, Bacon, Balthus, Tapies…). Et, n’est-ce pas ici qu’en 1962, André Malraux inaugurait le Musée du Vin dans l’Art réunissant trois millénaires d’objets précieux consacrés à la vigne et au vin. Un obélisque surmonté d’une étoile dorée à l’or fin marque l’entrée de la grande allée qui mène au musée.
* Le château actuel connu sous le nom de Petit Mouton date de 1870.
Sous l’égide du mouton
Qui entre à Mouton, se place sous l’égide du bélier. C’est le symbole de Mouton-Rothschild qui trouve sa source dans une pièce d’orfèvrerie (conservée dans ce même musée), le petit bélier d’Augsbourg, hanap en vermeil du XVIe siècle. Rien à voir avec Mouton, nom à l’origine du domaine puisque, ce Mouton là, vient de mothon, qui signifie petite motte désignant plus prosaïquement la situation du château.
Toutes les conditions d’un vignoble mythique
A vin exceptionnel, terroir exceptionnel ! Mouton-Rothschild au nord-ouest de Pauillac sur le village Le Pouyalet, ne pouvait occuper que le cœur de la plus prestigieuse des appellations du Médoc. Ses 84 ha mitoyens de Lafite-Rothschild, magnifiquement exposés, aux conditions climatiques optimales sont groupés autour du château. Ils rassemblent, entre l’estuaire de la Gironde et la forêt des Landes, toutes les conditions d’un vignoble mythique : une croupe de près de 8 m de graves garonnaises denses et pauvres reposant sur un socle marno-calcaire où se mêlent des traces d’oxyde de fer. Les vallonnements permettent un bon écoulement de l’eau vers la Gironde, et favorisent ainsi un drainage naturel idéal pour la vigne.
Des ceps de plus de cent ans
Un sol de galets apte à retenir la chaleur du soleil et une exposition idéale, voici deux qualités qui plaisent au cépage dominant, le cabernet sauvignon à hauteur de 83 % avec en complément, le merlot (14 %) et 3 % de cabernet franc. Les vignes ici en culture raisonnée privilégiant des produits moins toxiques (aucun désherbant n’est utilisé) dépassent allégrement les 45 ans ; certaines même, exhibent des ceps de plus de cent ans sur la parcelle notamment du plateau des Carruades. Les vendanges sont faites à la main. Le raisin est ensuite délicatement acheminé dans des cagettes jusqu’au légendaire cuvier en chêne du château.
Un nouveau cuvier
Cependant un tout nouveau cuvier comportant un ensemble ultramoderne de 65 cuves inox et bois adaptées à une vinification parcellaire vient d’être mis en service. L’assemblage selon les millésimes, privilégie entre 75 et 95 % le cabernet sauvignon, complété par le merlot et le cabernet franc. L’élevage de 19 à 22 mois est conduit en barriques de chêne du Cher et de l’Allier 100% neuves. Le château fait d’ailleurs appel jusqu’à 10 fournisseurs de barriques. La direction générale et technique du château est assurée depuis 2004 par Philippe Dhalluin directeur également du pôle d’activités Châteaux de la société Baron Philippe de Rothschild S.A. Il bénéficie des conseils des œnologues Jacques et Eric Boissenot.
- La production annuelle est estimée selon les millésimes à 300 000 bouteilles.
- Second vin : Le Petit Mouton de Mouton-Rothschild issu des vignes les plus jeunes du domaine. Son premier millésime date 1993. Il tire son nom de la résidence de la Baronne Philippine construite sur le domaine en 1870. Par le passé, les cuvées jugées inadaptées au grand vin avaient été utilisées notamment comme apport à Mouton-Cadet lors de sa création en 1930.
Autre vin :
- Aile d’Argent en appellation Bordeaux blanc. Renouant avec une ancienne tradition médocaine, Mouton-Rothschild a planté au début des années 1980, 4 ha de vignes en blancs (aujourd’hui, 6 ha) dont 43 % de sémillon, 56 % de sauvignon blanc et 1 % de muscadelle. Le nom de cette cuvée blanche provient d’un conte qu’inventa le Baron Philippe pour sa fille Philippine lorsqu’elle était petite, l’histoire d’une théière d’argent qui fut publié en 1947 chez Gallimard sous le titre Aile d’Argent la magique.
La saga des Rothschild
Mouton à l’origine n’était qu’une ferme insalubre sans château qui passa avec ses vignes au début du XVIIIe siècle dans le giron des marquis de Ségur surnommés à juste titre les seigneurs du Médoc car possédant déjà Lafite et Latour. Mais la véritable saga de Mouton prend date en 1853. Vendu aux enchères, il pèse alors l’équivalent de 4 millions d’euros. Son nouvel acquéreur, le Baron Nathaniel de Rothschild (de la branche anglaise) est un passionné de vin. En quelques années, il redresse le domaine, lui donne un nom légendaire, Mouton-Rothschild. Pour la petite histoire, aurait-t-il été déclassé en deuxième cru pour la simple (et mauvaise) raison que son propriétaire n’était alors pas encore français ?
Les vignes du baron Philippe
Dès son arrivée au château en 1922, Philippe de Rothschild va initier une véritable révolution : la mise en bouteille intégrale au Château, pratique inusitée jusque-là, qui responsabilise d’avantage le propriétaire et qui évite également tout risque de fraude venant de négociants peu scrupuleux. Pour cela, il fait construire le célèbre Grand Chai long de 100 m sans le moindre pilier, qui peut abriter jusqu’à 1 000 barriques. Il ira plus loin encore, jusqu’à mettre au point un accord de fixation des prix avec les autres producteurs de grands Bordeaux.
1945, millésime mythique
Est-il utile de rappeler les années noires quand Philippe de Rothschild doit fuir la France. Le château est alors transformé en quartier général pour les troupes allemandes. La production va continuer, sous la direction d’Hermann Goering. En 1945, le Baron de retour dans son château a une formidable idée pour célébrer la libération. Il couronne l’étiquette de ce millésime par un dessin approprié, le V de la victoire. C’était le début de la passionnante collection d’œuvres originales créées chaque année par des peintres célèbres. 1945 fut aussi un millésime grandiose, qualifié de monument historique. Il battit en 2006 lors d’une vente organisée par Christie’s à Beverly Hills, le record du vin le plus cher du monde (22 650 € la bouteille).
1 % des bouteilles
Aujourd’hui la Baronne Philippine de Rothschild après avoir donné naissance en 1993 au second vin du château, Le Petit Mouton de Mouton Rothschild, préside Baron Philippe de Rothschild S.A* dont le siège social est à Pauillac. Ses effectifs sont de 550 personnes. La société produit 30 millions de bouteilles dont 80 % sont exportées mais seul 1% des bouteilles portent le prestigieux titre de Château Mouton-Rothschild, la plus haute distinction qu’un vin puisse se prévaloir dans le monde.
Quelques uns des plus grands vignobles du monde
Baron Philippe de Rothschild S.A possède plusieurs domaines dont château d’Armailhac (70 ha) et château Clerc Milon (40 ha) s’étendant également sur la commune de Pauillac. Outre des vignobles en Languedoc-Roussillon (50 ha environ), la société a constitué au Chili en partenariat avec Concha y Toro, un Primer orden (un premier grand cru) Almaviva à base de 84 % de cabernet sauvignon complété de carmenère, de cabernet franc, de merlot et de petit verdot. Le domaine couvre 71 ha sur le terroir de Puente Alto. Le nom fait référence au comte Almaviva du Mariage de Figaro, célèbre opéra de Mozart sur le livret de Beaumarchais. En Californie, à Napa Valley, Baron Philippe de Rothschild S.A détient en association avec la Robert Mondavi Winery, Opus One, couvrant 69 ha dont 81 % de cabernet sauvignon (premiers millésimes : 1979 et 1980).
Etiquettes château Mouton-Rothschild : liste des artistes et des millésimes
D’abord, petit retour en arrière :
- 1924 Jean Carlu, affichiste de renom réalise à l’occasion de la première mise en bouteille au Château, une étiquette spécifique. C’est d’ailleurs une œuvre de l’artiste qui décore depuis 1994, l’étiquette du second vin : Le Petit Mouton de Mouton Rothschild.
Quels sont les thèmes imposés ?
L’artiste doit choisir l’un des quatre thèmes imposés : la vigne, le plaisir de boire, le bélier symbolique et la famille Rothschild. En échange de leur contribution, les artistes ne vont pas recevoir d’argent, mais un nombre de caisses de vin de deux millésimes, dont logiquement celui qu’ils ont illustré. Jusqu’en 1999, tous les peintres ou illustrateurs ont accepté les termes de cette collaboration.
- 1945 Philippe Jullian. Pour ce millésime, l’un des plus grands du siècle, le Baron s’adressa à ce jeune peintre, qui imagina une guirlande de feuilles de vigne autour du V de la Victoire.
- 1946 Jean Hugo
- 1947 Jean Cocteau
- 1948 Marie Laurencin
- 1949 Dignimont
- 1950 Arnulf
- 1951 Marcel Vertès
- 1952 Léonor Fini
- 1953 Année du Centenaire de l’acquisition du domaine.
- 1954 Jean Carzou
- 1955 Georges Braque
- 1956 Pavel Tchelitchew
- 1957 André Masson
- 1958 Salvador Dali
- 1959 Richard Lippold
- 1960 Jacques Villon
- 1961 Georges Mathieu
- 1962 Matta
- 1963 Bernard Dufour
- 1964 Henry Moore
- 1965 DorotheaTanning
- 1966 Pierre Alechinsky
- 1967 César
- 1968 Bona
- 1969 Juan Miró
- 1970 Marc Chagall
- 1971 Wassily Kandinsky
- 1972 Serge Poliakoff
- 1973 Pablo Picasso
- 1974 Robert Motherwell
- 1975 Andy Warhol
- 1976 Pierre Soulages
- 1977 : Hommage à la Reine Mère d’Angleterre
- 1978 Jean-Paul Riopelle
- 1979 Hisao Domoto
- 1980 Hans Hartung
- 1981 Arman
- 1982 John Huston
- 1983 Saul Steinberg
- 1984 Agam
- 1985 Paul Delvaux
- 1986 Bernard Séjourné
- 1987 Hans Erni
- 1988 Keith Haring
- 1989 Georg Baselitz
- 1990 Francis Bacon
- 1991 Setsuko
- 1992 Per Kirkeby
- 1993 Balthus. Une œuvre, un scandale ! Elle représente une adolescente nue. Une série limitée, sans le dessin, est éditée pour les États-Unis.
- 1994 Karel Apple
- 1995 Antoni Tàpies
- 1996 Gu Gan
- 1997 Niki de Saint Phalle
- 1998 Rufino Tamayo
- 1999 Raymond Savignac
- 2000 Pas d’étiquette pour la bouteille du millénaire, elle est sérigraphiée. Le motif représente le petit bélier d’Augsburg, emblème du château.
- 2001 Robert Wilson
- 2002 Ilya Kabakov
- 2003 : Hommage à un cent cinquantenaire. Le Baron Nathaniel est représenté sur l’étiquette par un cliché d’époque. Le fond reproduit en partie l’acte d’achat du domaine. Ce document, précieusement conservé dans les archives de Mouton, signe le début d’une longue histoire entre les Rothschild et les grands vins de Bordeaux.
- 2004 : 100e anniversaire de l’Entente Cordiale entre l’Angleterre et la France. La Baronne demande au Pince de Galles (Charles) d’illustrer ce millésime.
- 2005 Giuseppe Penone
- 2006 Lucian Freud
- 2007 Le sculpteur français Bernar Venet
- 2008 Le peintre chinois Xu Lei (directeur artistique du Today Art Museum le musée d’art contemporain de Pékin).
- 2009 Le peintre et plasticien anglais Anish Kapoor
- 2010 (?)