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Beaujolais nouveau 2014

affiche du Beaujolais nouveau 2014
Affiche du Beaujolais nouveau 2014 qu’on doit à l’artiste français Skwak
L'artiste Skwak
L’illustration de la campagne Beaujolais nouveau 2014 a été confiée à l’imagination de Skwak, un artiste qui vit et travaille à Lille

Le Beaujolais nouveau arrive aussi surement que l’automne avant l’hiver, le troisième jeudi du mois, déblocage à zéro heure comme d’hab. Rendez-vous donc jeudi 20 novembre sous le signe de l’artiste français Skwak qui illustre la nouvelle campagne de promotion des Beaujolais Nouveaux*. Oublié donc la fashion week de la précédente édition. Welcome to the Maniac world conçu par ce brillant artiste né en 1977 vivant et travaillant à Lille. Il est l’inventeur d’un monde à lui qu’il a su faire plier aux exigences du Beaujolais nouveau. Avouons-le, l’affiche est superbe ! A elle de séduire les quelques 30 millions de contacts pour faire de ce Beaujolais nouveau 2014 une réussite tout autant commerciale que gustative.

*Une promotion relayée essentiellement par internet et les réseaux sociaux.

 2014, la qualité est au rendez-vous

Vendanges en Beaujolais
Vendanges en Beaujolais chez Emmanuel Fellot (Côtes de Brouilly et Beaujolais Villages)

L’année 2014 a bénéficié de conditions météorologiques très favorables. Elle  s’acheva par une très belle arrière-saison marquée par le soleil suivi de nuits fraîches et protectrices. La maturation s’est donc déroulée dans de parfaites conditions offrant une récolte d’une qualité exceptionnelle : des raisins bien mûrs, frais, sucrés, une pellicule épaisse et colorée et des degrés alcooliques naturels de 12 à 13 % (idéal !).

Les premières dégustations sont très encourageantes : des vins souples, ronds, avec une jolie longueur en bouche et parfaitement équilibrés. Une pointe de fraîcheur relève une belle complexité aromatique.  Bertrand Chatelet, directeur de la Sicarex Beaujolais (Institut de recherche implanté à Villefranche-sur-Saône et dédié à l’étude des vignes du Beaujolais) constate que les tannins sont soyeux, d’une grande finesse et parfaitement intégrés ce qui apporte de la structure et de la longueur en bouche et surtout beaucoup d’élégance.

A noter également la très belle qualité des chardonnays. Les Beaujolais et Beaujolais Villages blancs 2014 s’annoncent donc eux aussi de grande qualité avec des vins voluptueux offrant un très beau volume en bouche.

 Pour les goûter en avant-première : le trophée Lyon-Beaujolais nouveau

Trophée Lyon-Beaujolai nouveau
Trophée Lyon-Beaujolais nouveau dont les membres goûtent avant tout le monde le Beaujolais nouveau 2014

Les Œnologues de France de la région Bourgogne Centre-Est organisent, en partenariat avec Inter Beaujolais, la 14e édition du Trophée Lyon-Beaujolais Nouveau, dimanche 16 novembre à Lyon. Quatre jours avant l’arrivée du Beaujolais nouveau, en France et à l’étranger, une centaine d’experts du monde entier, se réunissent pour goûter, analyser et noter plusieurs centaines d’échantillons de Beaujolais et Beaujolais Villages Nouveaux rouges et rosés. Chacun attend leurs verdicts !

 Des chiffres qui donnent le tournis

En volume, la récolte devrait se situer entre 750 000 hl et 800 000 hl. Pour rappel, ceux mis sur le marché en 2013, s’élevaient à 231 000 hl, soit 31 millions de bouteilles. Cela représente le tiers de la production totale du Beaujolais ; les deux tiers restants étant constitués par les Beaujolais et Beaujolais villages de garde ainsi que les 10 crus du Beaujolais (Brouilly, Chiroubles, Chénas, Côte de Brouilly, Fleurie, Juliénas, Morgon, Moulin-à-vent, Régnié et Saint-Amour). La France à elle seule absorbe plus de 130 000 hl de Beaujolais nouveau dont 53 000 hl (7 millions de bouteilles) vont à la grande distribution et 77 000 hl dans les circuits traditionnels, restauration et cavistes.

Embouteillage du Beaujolais nouveau
Chaîne d’embouteillage du Beaujolais nouveau

 Le Beaujolais nouveau, un poids lourd à l’export

En 2013, avec plus de 100 000 hl, le  Beaujolais nouveau était exportés dans 110 pays  ce qui représente plus de 40 % des volumes mis en marché. Ces 13 millions de bouteilles placent donc le Beaujolais parmi les leaders des vignobles français à l’export.

Voici pour 2013, les 10 premiers marchés importateurs de Beaujolais nouveau dans le monde :

  • Japon : 52 183 hl (7 millions de bouteilles)
  • Etats-Unis : 13 311 hl (1,8 millions de bouteilles)
  • Allemagne : 5 500 hl (730 000 de bouteilles)
  • Belgique : 2 483 hl (331 000 bouteilles)
  • Pays-Bas : 2 313 hl (308 000 bouteilles)
  • Royaume-Uni : 2 270 hl (303 000 bouteilles)
  • Chine : 2 154 hl (287 000 bouteilles)
  • Italie : 1 191 hl (175 000 bouteilles)
  • Canada : 1 469 hl (159 000 bouteilles)
  • Suisse : 981 hl (131 000 bouteilles)

(Total Union Européenne : 19 867 hl soit 2,6 millions de bouteilles)

 Que recouvre la mention Beaujolais nouveau 

 (Voir article : Beaujolais comment c’est fait ?)

Le vignoble beaujolais regroupe près de 3 000 exploitations (9,8 ha en surface moyenne), 12 coopératives, 169 négociants (Beaujolais, Mâconnais, Bourgogne).  La superficie totale du vignoble est de 16 572 ha. Le rendement autorisé est de 52 hl/ha et 99 % de la production provient du seul cépage gamay noir à jus blanc.

Deux AOC sont productrices de Beaujolais nouveau en vins rouges et vins rosés couvrant plus de 10 000 ha de vignes :

  • Beaujolais : cette appellation comprend 72 villages de la partie sud et est du vignoble. Implantée sur des sols argilo-calcaires et granitiques, elle est commercialisée à près de 60 % en Beaujolais nouveau
  • Beaujolais Villages : les Beaujolais Villages sont situés sur 38 communes, aux sols granitiques, avec des coteaux escarpés. Ils représentent plus du tiers des vins vendus en « nouveau »

Le 20 novembre, un rendez-vous planétaire

New York, le Beaujolais nouveau
Partout dans le monde on fête le Beaujolais nouveau

Le prix du Beaujolais nouveau devrait se situer entre 4 et 6 € la bouteille et  au comptoir, c’est au bon cœur du bistrotier. Ils étaient en 2013 plus de 200 bistrots en France et dans le monde, Paris, Lyon, Villefranche, Munich, Londres, Chicago, Brooklyn… à fêter le Beaujolais Nouveau, l’unique grande fête populaire internationale dédiée au vin. Auparavant, elle sera ouverte par la fête des Sarmentelles à Beaujeu dans le Rhône, capitale du Beaujolais et sa traditionnelle mise en perce du tonneau, le coup d’envoi de l’ouverture des bouteilles en France et dans le monde. En 2013, le Beaujolais nouveau s’était massivement exporté à 13 millions de bouteilles (presque une bouteille sur deux) le consacrant  comme l’un des leaders du vignoble français à l’export.

Georges Duboeuf
Le Beaujolais nouveau doit sa popularité internationale en grande partie au négociant Georges Duboeuf

Il doit sa popularité internationale au négociant Georges Duboeuf. 110 pays dans le monde le réclament chaque année dont le Japon qui a lui seul en avale près de 7 millions de bouteilles grâce à un énorme battage médiatique* (le chic français à 20 € la bouteille !). Il est vrai que les Japonais apprécient fort ce coté rituel (chaque année à la même date) et qu’ils sont, par le décalage horaire (avec une dérogation de 8 h), les premiers au monde à le déguster. Ils sont suivis de loin par les Etats-Unis (1,8 millions de bouteilles) et l’Allemagne (730 000), ces trois pays représentant les principaux clients du Beaujolais nouveau. En ligne de mire, l’Asie et principalement la Chine, la Corée et le Vietnam.

*L’image chaque année fait le tour du monde. Aux sources d’eau chaude d’Hakone, proche du Mont Fuji, à l’ouest de Tokyo, pour célébrer l’arrivée du Beaujolais nouveau, les visiteurs peuvent se baigner dans une piscine où a été versé ce vin (c’est bon pour la peau !).

Le Beaujolais nouveau au Japon
Les japonais dans le bain du Beaujolais nouveau à Hakone à l’ouest de Tokyo, un rituel !

La reconquête après les remords

La tendance depuis quelques années est à la baisse malgré le lancement d’un Beaujolais nouveau rosé en 2006. Il faut se rappeler que dans les années 1990, on écoulait en France et dans le monde 60 millions de bouteilles, une époque où sans vergogne, on faisait pisser la vigne. Pour atteindre de telles ventes, le Beaujolais nouveau fut porté à ses sommets par un négociant éleveur de génie, Georges Duboeuf, surnommé à juste titre le roi du Beaujolais (derrière lui 400 vignerons et une vingtaine de coopératives). Il reçut le soutien de nombreux producteurs, journalistes, hommes de lettres, gens du spectacle, publicitaires et politiques. Mais pour quel résultat ! Un vin qui très vite n’eut plus rien à voir avec son cépage (et si peu avec son terroir et son millésime !). Pire, il brouillait l’image des autres Beaujolais et surtout de ses 10 crus prestigieux. Dans bien des cas il fut chaptalisé, maquillé aux levures, dopé aux enzymes pour le formater et accélérer son processus de vinification. Résultat un naufrage dans une mer de Beaujolais. Il eut l’image d’un vin industriel ponctué de scandales à répétition et de tromperie sur la marchandise (avec de retentissants procés).

Le fameux goût de banane

Pire, ces fameux arômes fermentaires de banane, de griotte, de cassis, de cerise écrasée… étaient attendus par tous mais que chacun s’empressait à la première gorgée de brocarder. Et pourtant le gamay est un cépage exceptionnel apte à donner à ses vins tout juste faits, fruits et fraîcheur. Ce fameux goût de banane (à peine détectable par une personne sur dix) est du à une levure baptisée 71 B. C’est elle qui favorise l’expression des arômes, tout particulièrement des esters, comme l’acétate d’isoamyle  (ce goût de banane) conséquence de la macération carbonique utilisée dans l’élaboration de ce vin primeur. Ainsi peut-on trouver lors une année, un goût de banane, et la vendange suivante, un goût de bonbon anglais. Dans le Beaujolais, les vignerons utilisent désormais d’autres souches de levures, sélectionnées dans leur terroir, offrant des arômes de fruits rouges, qu’elles soient des levures indigènes ou des levures importées.

Plus un événement qu’une boisson (!)

Du Beaujolais nouveau, Hugh Johnson écrivain britannique et expert en vins en a dit que c’était plus un événement qu’une boisson. Le mot est un peu dur mais il y a du vrai. Heureusement, il a toute chance d’être bon cette année. Voir notamment les Beaujolais villages nouveaux qui offrent des vins bien mieux structurés.

Pour son image et depuis quelques années, la profession a réagi en essayant de revaloriser sa production avec une sévère campagnes d’arrachage (on est passé en quinze ans, de 25 000 ha à près de 17 000 ha). Il y eut aussi une modification du cahier des charges pour limiter à 52 hl/ha la production du paradis, nom donné en Beaujolais au premier jus issu du pressurage (c’est lui qui révèle les premiers arômes du futur Beaujolais). Ensuite, pour le  vigneron, obligation est faite à ne pas consacrer plus de la moitié de sa récolte au Beaujolais nouveau. Il faut savoir que l’hectare ici vaut environ 15 000 € soit 6 fois moins que dans les crus du Beaujolais (Chiroubles, Brouilly, Morgon…). Comment alors orienter les meilleurs terroirs vers une production de qualité ? Les grandes maisons de Bourgogne ne s’y sont pas trompées. Elles investissent à tour de bras en Beaujolais, vignoble il est vrai, aux marches de la Bourgogne*(1). Eh puis, le gamay*(2)  n’est-il pas le descendant direct du pinot noir !

Pieds de gamay à jus blanc
Pieds de gamay noir à jus blanc

*(1) Le sait-on suffisamment ? Le vignoble du Beaujolais est légalement rattaché au vignoble de Bourgogne par un jugement du 29 avril 1930 du tribunal de Dijon. Il l’est également en pratique puisque le négoce de Bourgogne est le plus gros acheteur des vins du Beaujolais au point que la majorité des représentants du négoce à l’Inter-Beaujolais sont des bourguignons. Mais quant à la fusion des interprofessions, elle est loin d’être à l’ordre du jour.

*(2) Le gamay serait issu du croisement entre le gouais, cépage blanc aujourd’hui presque disparu et le pinot noir.

François

  • 1990 – Les grands vins du monde, préfacé par Gérard Depardieu. 
  • 1992 – Grands et petits vins de France, préfacé par Jean Carmet.
  • 1996 – Le guide des grands et petits vins de France, préfacé par Alain Favereau.
  • 2000 – The Flammarion Guide to World Wines
  • 2013 – Les vignobles mythiques, aux éditions Belin préfacé par Pierre Lurton (Cheval Blanc et Yquem).
  • 2014 – Prix Amunategui-Curnonsky décerné par l’APCIG (association professionnelle des chroniqueurs de la gastronomie et du vin).
  • 2016 – Cépages & Vins aux éditions Dunod.
  • 2020 – Cépages & Vins, nouvelle édition, éditions Dunod.

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