Ce vin nouveau (on devrait dire primeur ou vin nouveau, tiré en primeur) est issu comme les autres Beaujolais rouges d’un seul cépage, le gamay noir à jus blanc (le Beaujolais Blanc est issu du chardonnay). Deux appellations sont productrices de Beaujolais nouveau : les AOC Beaujolais et Beaujolais-villages. Elles couvrent 11 000 ha de vignes sur des sols argilo-calcaires et granitiques réparties sur le territoire de 72 villages de la partie sud et est du vignoble.
Le meilleur vin dans un temps record
L’objectif est ici d’accélérer au maximum les processus de vinification tout en offrant couleur et arômes spécifiques à des vins qui auront un faible potentiel de garde (maximum 3 mois), donc à déguster rapidement. Aujourd’hui, 80% des Beaujolais nouveaux résultent de ces techniques œnologiques dont le but est de produire le meilleur vin possible dans un temps record. Attention ! Ces vins sont primeurs et ils n’ont point eu le temps de s’assouplir en bouteille d’où souvent, cette saveur acidulée aux goûts de vernis, de solvant, de banane, de bonbon anglais due à un excès d’alcool amylique.
Les principales techniques œnologiques pour élaborer le Beaujolais nouveau
I/La macération carbonique
C’est une cuvaison rapide de 4 à 5 jours. Elle a été mise au point dans les années 60 au domaine expérimental de l’INRA de Pech-Rouge. Cette technique exploite tout simplement les phénomènes de la fermentation intracellulaire, c’est à dire un autre type de fermentation, celle qui se produit sous la seule action des enzymes propres du fruit. Pour cela, il faut (après des vendanges manuelles) que les baies soient intactes et non foulées ; que ces cuvaisons de grains entiers non écrasés soient placées en anaérobiose (en absence d’air) mais saturée en CO2 (dioxyde de carbone) et que cet apport soit maintenu de 24 à 48 h après l’encuvage. Dernière condition, cette macération ne peut se faire qu’en très petit volume pour que le raisin ne s’écrase pas*.
*A grande échelle, il est pratiqué une macération semi-carbonique (voir plus bas).
Des résultats probants
- Des arômes riches et marqués ;
- Une coloration plus intense ;
- Une baisse d’acidité due à une dégradation en alcool de l’acide malique ;
- Une faible proportion des sucres transformée en alcool (environ 2° d’alcool) grâce à l’action des enzymes du raisin ;
- Une dégradation des protéines entraînant une forte propension du moût à fermenter (fermentescibilité)…
- et enfin, une atténuation des défauts dus notamment à des excès de tannins et une meilleure harmonie générale du vin.
Le dégagement gazeux permet le brassage du moût, l’homogénéisation de la température ainsi qu’une protection de la vendange (réduction des départs en fermentation et protection contre l’oxydation). Après cette phase de macération en milieu gazeux, le raisin est pressé et soumis à une fermentation microbienne dite « classique » déclenchée par les levures et les bactéries lactiques.
II/Macération semi-carbonique
Cette macération est spécifique au Beaujolais. La différence avec une macération carbonique dite normale tient dans le fait qu’une fois la cuve remplie, celle-ci n’est pas fermée hermétiquement. Autre différence, il n’y a pas d’ajout de CO2 ni de levurage. L’apport en CO2 se fait naturellement dans la cuve, sous l’effet de la respiration des cellules végétale de la grappe de raisin, et sous l’effet de la fermentation alcoolique due aux levures. La fermentation va ainsi démarrer spontanément, dans le jus de raisin au fond de la cuve. Cette macération peut durer de 10 à 20 jours, selon le vin qui est à faire, afin d’extraire le maximum de matières et de fixer les arômes. Au moment du pressurage, les jus de presse et de goutte de chaque cuvée sont ensuite assemblés et décantés de leurs lies grossières.
III/La macération préfermentaire à chaud (MPC)
Il faut une vendange à maturité optimale et saine (pas de SO2 pour éviter toute phase de latence). La MPC se fait généralement sur vendange entière car le moût est alors plus facile à pomper. Cette méthode utilisée depuis le début des années 2000, consiste à chauffer la vendange à 70-75° pendant quelques heures puis à la refroidir par circulation dans une tour d’évaporation à pression atmosphérique et l’ensemencer. Elle permet une extraction éclaire et intense d’arômes, de couleur et de fruit. Ce procédé technologique a été inventé au départ pour corriger les défauts d’un millésime difficile. Pour gagner du temps, on pratique également la co-inoculation. C’est une technique qui consiste à co-inoculer un moût en levures et en ferments malolactiques pour accélérer une fermentation malolactique presque en même temps que la fermentation alcoolique.
La chaleur va permettre une meilleure extraction des composés phénoliques. Les vins sont également plus fruités, plus persistants. Ils sont marqués par des arômes de cassis notamment et une couleur pourpre sombre à nuance violacée. La MPC tend aujourd’hui à se généraliser, donnant des vins qu’on considère comme trop standardisés car non marqués par leur terroir.
IV/L’inversion thermique
Cette technique réservée aux macérations courtes (de 5 à 7 jours) consiste à chauffer de façon modérée la vendange en grappes entières, à 35°, juste avant le levurage (on ensemence avec des levures qui transforment le sucre en alcool) sous réserve que la température au moment de ce levurage n’excède pas 40°. Il faut ensuite maintenir cette température pendant trois jours puis à l’abaisser à 27°. C’est une technique récente (2008) bien adaptée au gamay. Elle montre qu’on peut extraire de façon significative couleur et tannins tout en améliorant les qualités gustatives d’un vin face notamment à la vinification beaujolaise traditionnelle. L’inversion thermique est en plus bien moins énergivore que la macération préfermentaire à chaud (MPC).